Le courant "obscurantiste" qui active actuellement en Tunisie contre l'art et la création, ne prendra pas et il "n'a pas d'avenir" dans ce pays où il butte contre "un bouclier" des forces civiles, a soutenu dimanche à Alger l'écrivain tunisien Habib Selmi. "D'importantes forces civiles (tunisiennes) constituent un bouclier face certains salafistes qui veulent détruire ce que nous avons construit pendant cinquante ans en progrès et modernisme", a souligné M. Salmi en marge d'une conférence débat sur le "combat par la littérature" animée avec l'écrivain algérien Said Boutadjine dans le cadre de la 5ème édition du festival de la littérature et du livre de la jeunesse. Il a condamné à cette occasion les violences déclenchées récemment en Tunisie sur fond de l'exposition plastique "Le Printemps des Arts" organisée à Marsa dont des tableaux ont été considérés comme attentatoires "aux valeurs sacrées". L'écrivain s'est dit préoccupé par la dégradation de la situation soulignant le rôle de ces "forces civiles" que représentent notamment l'union générale tunisienne du travail, les syndicats des artistes, les associations féminines et d'avocats qui refusent catégoriquement, a-t-il dit, "tout projet obscurantiste que certains salafistes veulent imposer à la société tunisienne". Pour lui, "les salafistes représentent un courant obscurantiste qui prône la violence, rejette les valeurs démocratiques". "Ils ne croient pas aux urnes ni à l'alternance au pouvoir en imposant leur opinion par la force, chose que personne en Tunisie ne peut accepter", a-t-il insisté. A une question sur l'appel du comité scientifique de la mosquée de la Zitouna dans le prêche du vendredi au meurtre des artistes ayant participé à l'exposition de Marsa, M. Selmi a souligné que "l'imam n'a pas le droit de s'ingérer dans les affaires de l'art et de la création". "De tels phénomènes sont étrangers à la société tunisienne", selon l'intervenant pour qui "tous les intellectuels et artistes tunisiens doivent militer et résister pour battre en brèche les thèses de ces obscurantistes qui veulent nous ramener (la Tunisie) en arrière". L'écrivain tunisien s'est toutefois dit optimiste quant à l'avenir des libertés en Tunisie même si, a-t-il insisté, les salafistes "tenteront d'entraver la marche des artistes". Dans le même contexte, il a écarté l'éventualité d'un exil des artistes tunisiens comme ce fut le cas pour plusieurs de leurs homologues algériens dans les années quatre vingt dix du siècle dernier car selon lui "les choses n'ont pas atteint le degré de menace de mort". La présidence tunisienne a vivement condamné, samedi, les appels "irresponsables" au meurtre d'artistes "lancés par certaines parties" rappelant que "les libertés d'opinion, d'expression et de création artistique sont des droits irrévocables". Auparavant le président intérimaire Moncef Marzouki, le chef de gouvernement provisoire Hamadi Jabali et le président de l'assemblée nationale constituante. Mustapha Benjaafar ont dénoncé dans un communiqué conjoint "toute atteinte aux acquis sacrés du peuple tunisien" qui, ont-ils précisé, s'inscrit en ligne contraire de la liberté d'opinion ou d'expression. Ils ont appelé à "barrer la route aux provocateurs et autres extrémistes pour éloigner définitivement le spectre de l'ancien régime par l'unité et l'entraide". Plusieurs localités de la Tunisie ont été le théâtre lundi et mardi d'attaques de postes de police, de sièges syndicaux et de partis politiques, par des groupes membres de la mouvance salafiste. Ces violences avaient débuté après le saccage de l'exposition de Marsa (banlieue nord de Tunis). Cette flambée de violences qui a fait un mort, des dizaines de blessés et quelques 200 personnes arrêtées, a poussé les autorités à instaurer un couvre-feu nocturne sur huit régions du pays jusqu'à dimanche.