Le Premier ministre irakien, Nouri Al-Maliki, a lancé jeudi un appel au dialogue pour résoudre pacifiquement la crise dans laquelle se trouve l'Irak, théâtre depuis mardi d'une vague de violences ayant fait plus de 200 morts, une situation qui risque de raviver les tensions confessionnelles dans ce pays. "J'appelle tous les Irakiens à se rencontrer face à face pour résoudre la crise actuelle de notre pays", a déclaré M. Al-Maliki dans un discours télévisé après les violences ayant éclaté dans le nord de l'Irak à la suite de l'intervention des forces de sécurité contre les manifestants anti-gouvernement. Il a également appelé les hommes de religion, journalistes et tous ceux qui s'inquiètent de l'avenir du pays "à prendre l'initiative, et ne pas rester silencieux face à ceux qui veulent ramener le pays à la guerre civile confessionnelle". Face au risque de la détérioration de la situation sécuritaire dans le pays, le Premier ministre irakien a notamment mis en garde contre les tentatives de raviver "la guerre civile confessionnelle", qui rappelle les années sombres de 2005 à 2008 après l'intervention militaire américaine où l'Irak avait connu les pires moments de son histoire marqués par des violences quasi quotidiennes. Avertissant que l'Irak pourrait connaître "une autre guerre civile si la détérioration de la sécurité n'est pas freinée", le chef du gouvernement irakien a souligné qu'"il n'y aura pas de gagnant dans les querelles sectaires". "Tout le monde sera perdant", a-t-il martelé. La politique du Premier ministre contestée Les troubles qui ont été éclaté près de Houweijah (nord), lorsque la police est intervenue sur les lieux d'un rassemblement qui se tient depuis quatre mois pour protester contre la politique de M. Al-Maliki ont progressivement gagné d'autres régions du nord irakien. Les manifestants réclament le départ du Premier ministre, qui est de confession chiite et qu'ils accusent de "marginaliser" les sunnites. Au plan politique, les partenaires d'al Maliki de la coalition gouvernementale accusent ce dernier d'accaparer le pouvoir et le Parlement n'a voté aucune loi d'importance depuis les élections législatives de mars 2010. Les heurts les plus meurtriers se sont produits à Souleimane Bek, au nord de la capitale Baghdad, où cinq soldats et sept hommes armés ont été tués, selon une source sécuritaire. Des hommes armés non identifiés ont ensuite pris le contrôle de Souleimane Bek après des combats meurtriers avec les forces de sécurité, qui s'en sont retirées. Mais l'armée irakienne a renforcé jeudi les mesures de sécurité autour de la ville. Des hommes armés ont également attaqué un point de contrôle au nord-est de Baghdad, tenu par des miliciens du groupe des "Sahwa", qui appuie les forces irakiennes dans le combat contre les élements du réseau terroriste d'Al-Qaïda en Irak, en tuant quatre d'entre eux. A Fallouja, à l'ouest de Baghdad, un obus a visé la maison d'un membre du conseil provincial blessant un homme et deux enfants, le responsable étant sorti indemne. Durant les deux jours, 269 personnes au moins ont été blessées, dont 195 dans des affrontements liés aux manifestations, selon des sources policières et médicales. Les élections provinciales un test pour le gouvernement d'Al-Maliki Ces incidents interviennent quelques jours après la tenue des élections provinciales dans 12 des 18 provinces du pays. Ce scrutin est une occasion de de mesurer la popularité de Nouri Al-Maliki, pour la suite de son mandat à la tête du gouvernement. Ces élections ont un poids particulier dans le système fédéral irakien puisque les assemblées provinciales sont chargées de désigner les gouverneurs. Les trois provinces du Kurdistan autonome (dans le nord de l'Irak) ont leur propre calendrier et à Kirkouk (nord) un contentieux entre les différentes communautés a empêché la tenue du scrutin. En dépit des violences, ces élections, les premières depuis le départ des troupes américaines fin 2011 de l'Irak, n'ont pas connu de dysfonctionnements notables. La campagne électorale a néanmoins été marquée par une nette recrudescence des violences. Quatorze candidats ont été tués depuis le début de l'année et plus de 100 personnes ont péri dans des attentats lors de la semaine précédant le vote.