Les régions du sud algérien devraient bénéficier d'une "meilleure médiatisation" à travers la présence de supports médiatiques locaux, ont plaidé dimanche à Alger de nombreux intervenants lors d'une conférence organisée sur le thème "Quelle place pour les régions du sud algérien dans les médias?" Co-organisée par l'Institut de la diversité médiatique (MDI) et le quotidien algérien Liberté, cette rencontre a permis de faire un diagnostic unanime quant à un "déficit important" en matière de couverture médiatique des régions sises dans le sud algérien, comparativement à celles du Nord. "Le Sud est souvent présenté dans les médias sous l'angle de la carte postale seulement ou bien par rapport à des problèmes locaux spécifiques celui de la remontée des eaux à El-Oued, alors que d'autres préoccupations existent comme le chômage qui pénalise une frange importante de la jeunesse locale", a déploré le directeur de la publication de Liberté, Abrous Outoudert, dans son intervention inaugurale. Le chercheur en anthropologie sociale, Aaoumeur Bekkili, a considéré, pour sa part, primordial de bien connaître son pays pour "comprendre le fonctionnement social de chaque région", afin d'éviter ce qu'il a qualifié de "standardisation de l'ignorance", tout en déplorant que plus de 80 % du territoire algérien soit aussi peu couvert par les médias. "La description qu'en fait la presse tient compte uniquement d'un point de vue ethnique et des analyses sur des préjugés, alors qu'il n'existe pas de conflits ethniques ou culturels mais uniquement des problèmes d'ordre matériel", a analysé l'intervenant qui fait état, à ce propos, d'une "image biaisée" de la réalité de l'intérieur du pays, citant précisément le cas de Ghardaïa, en proie récemment à des incidents, alors que c'est "l'une des rares régions du pays qui ont su se structurer", a-t-il observé. Plaidant également pour une presse de proximité à même de rendre écho des préoccupations quotidiennes des populations résidant au Sud, le spécialiste en tourisme, Fayçal Mâarfia, a estimé que l'information locale est souvent "à sens unique", en plus d'une "absence de communication". Une situation qui, aux yeux du spécialiste, contribue à accentuer "l'isolement intérieur et extérieur" de ces régions. Le directeur de la publication du quotidien El-Watan, Omar Belhouchet, a reconnu, pour sa part, que le Sud "n'intéresse les médias que lorsqu'il y a crise" et dénoncé les journalistes qui "jettent de l'huile sur le feu et rajoutent à la complexité de la situation" lorsqu'ils entreprennent de couvrir certains événements, faisant allusion également aux évènements qu'a connus Ghardaïa. Estimant néanmoins que "les choses sont en train de changer" dès lors que la presse algérienne a compris "qu'Alger n'est pas l'Algérie", Abrous Outoudert en veut pour arguments l'augmentation de l'espace consacré par sa publication aux sujets liés au Sud, passant de 40 articles seulement pour toute l'année 2005 à un écrit quotidien en 2013. Cela dit, il n'a pas nié, pour autant, que l'enjeu principal pour les éditeurs de journaux et autres responsables de médias est lié à la "rentabilité économique", dès lors que l'existence d'un support médiatique dans une région donnée du Sud doit être financièrement avantageuse, autrement celui-ci serait voué à disparaître, a-t-il suggéré. Le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH), Nouredine Benisaâd, a mis l'accent sur la nécessité d'une "volonté politique" pour l'ouverture du champ médiatique, notamment audiovisuel, eu égard à l'impact de celui-ci pour le développement des régions du Sud et a convié la société civile à "mieux s'organiser" dans cette perspective. Le témoignage vivant d'un correspondant local de presse, celui de Rabah Karèche à Tamanrasset, en l'occurrence, a éclairé davantage l'assistance sur les "multiples contraintes" qui se dressent face au travail journalistique local, notamment s'agissant du manque de moyens matériels et financiers et de la difficulté d'accès à l'information institutionnelle. Lancée il y a 15 ans à Londres, le MDI est une organisation non gouvernementale (ONG) qui cultive l'esprit de "l'inclusion" et de la "diversité" dans les médias de par plusieurs régions du monde, à travers deux bureaux sis à New York et au Caire. Présent en Algérie depuis quelques mois, le MDI a entrepris de former jusque-là 18 journalistes algériens aux notions qu'il véhicule, a indiqué sa coordonnatrice à Alger, Wassila Silarbi.