Le champion du monde de kick-boxing, Zakaria Moumni, a saisi la Haut-Commissaire des Nations Unies aux Droits de l'Homme, Mme N. Pillay, en visite au Maroc, sur "l'injustice extrêmement grave" dont il serait victime dans son pays, où il a été emprisonné "arbitrairement" avant d'être gracié par le roi Mohamed VI. Dans une lettre adressée à la responsable onusienne et dont l'APS a reçu mercredi une copie, l'athlète marocain, actuellement établi avec son épouse française à Paris, dit souhaiter évoquer "l'injustice extrêmement grave" dont il serait victime au Maroc de la part du "pouvoir marocain". Il a rappelé que sa vie a "basculé" le 27 septembre 2010, lors de son arrestation à sa descente d'avion à Rabat par des policiers pour "atteinte à la personne sacrée du roi", puis conduit au centre de détention secret de Temara, où il dit avoir été séquestré et subi quatre jours durant des tortures. "A mon arrivée, ils m'ont mis nu, m'ont ligoté les pieds et les mains. Toujours les yeux bandés, j'ai subi des tortures de toutes sortes : j'ai été électrocuté partout sur le corps, suspendu par les pieds et tabassé avec des barres de fer sur les jambes et les tibias", raconte-t-il, ajoutant que, pendant ces quatre jours, il a été privé de nourriture, d'eau et de sommeil. Selon son récit, Zakaria Moumni n'a su les motivations réelles de son arrestation que le 4 octobre, en apprenant qu'il a été condamné à une peine de trois ans de prison ferme pour "escroquerie" après un "simulacre de procès sans victimes" et des "aveux" qu'il dit avoir signé "sous la torture et les yeux bandés". Au total, l'athlète a dû passer 18 mois en prison suite à une procédure judiciaire jugée "arbitraire" et un procès "inique dans des conditions de détention inhumaines et dégradantes dans les prisons de Salé-Zaki et Rommani au Maroc". Les pratiques de torture dont serait victime Zakaria Moumni et son procès ont été condamnées unanimement par Human Rights Watch (HRW), Amnesty International, la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l'Homme (FIDH) et des associations marocaines de défense des Droits de l'Homme ainsi que par le Parlement Européen. La FIDH avait même envoyé le 8 décembre 2011 une lettre ouverte au roi du Maroc pour ma libération "immédiate", alors que toutes ces associations ont appelé à sa libération en s'adressant aux autorités marocaines à plusieurs reprises. Pour l'athlète marocain, son cas est "symbolique de pratiques scandaleuses" dans son pays alors que le roi a, soutient-il, affirmé à plusieurs reprises son engagement pour le respect des droits de l'homme en signant plusieurs conventions internationales. Il a fait savoir qu'il s'était rendu, le 3 mars 2013, au Maroc avec son épouse, sur invitation d'un ancien ministre marocain en vue d'une audience avec le Roi, qui n'a pas eu lieu car le Roi était "occupé" selon ce qui lui a été avancé. "Après notre retour (à), on m'a clairement expliqué que le Maroc ne pouvait pas me rendre justice parce que les personnes responsables de ce que j'ai subi sont +intouchables+, en parlant des commanditaires et de mes tortionnaires", a regretté Moumni. Ses avocats, Me Patrick Baudouin, avocat au Barreau de Paris et Président d'honneur de la FIDH et Me Clémence Bectarte, ont déposé le 21 février dernier en son nom auprès du Procureur du Pôle spécialisé Crimes contre l'Humanité/Crimes de Guerre du Tribunal de Grande Instance de Paris, une plainte pour Torture visant M. Abdellatif Hammouchi, directeur général de la DGST marocaine. Avril dernier, l'athlète marocain avait saisi, dans une lettre ouverte, le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki Moon, sur "l'injustice" dont il dit avoir été victime dans son pays, dix-huit mois durant.