La prise de la totalité de la ville antique syrienne de Palmyre (Tadmor), par l'organisation autoproclamée Etat islamique (Daech/EI) a suscité jeudi des craintes de voir les éléments de Daech détruire les trésors archéologiques de cette cité stratégique pour ce groupe armé puisqu'elle ouvre sur le grand désert syrien, limitrophe de la province d'Al-Anbar en Irak, qu'il contrôle déjà en grande partie. Les éléments de Daech se sont emparés jeudi de toutes les parties de Tadmor, y compris près du site archéologique qui se situe dans le sud-ouest de la ville, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme, qui affirme que les troupes gouvernementales ont quitté toutes leurs positions dans et à la périphérie de la ville, notamment des renseignements militaires de toute la Badiya (désert syrien), l'aéroport militaire et la prison. "La plupart se sont retirées vers la ville de Homs", chef-lieu de la province centrale dont fait partie Palmyre, d'après M. Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH, selon lui, une partie des habitants s'est déplacée vers la ville de Homs, tandis que le reste est resté chez soi. Depuis le début de l'offensive de l'organisation armée le 13 mai, la bataille dans Palmyre et ses environs a fait au moins 462 morts selon un bilan de l'ONG --71 civils --dont de nombreux exécutés par Daech--, 241 membres des forces armées et 150 éléments du groupe extrémiste. Réputée pour ses colonnades torsadées romaines, ses temples, ses tours funéraires vestiges d'un brillant passé, la ville inscrite par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité, est une oasis dont le nom apparaît pour la première fois sur une tablette au 19e siècle avant notre ère. Elle fut un point de passage des caravanes entre le Golfe et la Méditerranée et une étape dans la route de la soie. Crainte de détruire 2.000 ans d'histoire Située à 210 km au Nord-est de Damas, la "perle du désert", inscrite par l'Unesco au patrimoine mondial de l'humanité, est une oasis dont le nom apparaît pour la première fois sur une tablette au 19e siècle avant notre ère. La chute de cette ville vieille de plus de 2.000 ans, fait craindre pour le sort de ses célèbres ruines, Daech ayant déjà détruit des trésors archéologiques en Irak. Mercredi, la directrice générale de l'Unesco Irina Bokova a prévenu que les combats menaçaient "l'un des sites les plus significatifs du Moyen-Orient et la population civile", appelant à "un arrêt immédiat des hostilités". Avant le début du conflit en Syrie en 2011, plus de 150.000 touristes visitaient la ville aux 1.000 colonnes, aux statues, et à la formidable nécropole de 500 tombes où les riches Palmyréniens avaient construit une série de monuments funéraires somptueusement décorés, dont certaines ont été récemment pillés. D'après le gouverneur de la province, la ville intra-muros compte près de 35.000 habitants et déplacés qui s'y sont installés depuis le début du conflit, et le double avec sa banlieue. La majorité des habitants sont au chômage faute de touristes. Mais selon l'OSDH, plus de 100.000 personnes peuplent la région de Palmyre. Daech: après la prise de Palmyre, la province d'Al-Anbar en Irak? Avec la prise de Palmyre, qui est stratégique pour Daech puisqu'elle ouvre sur le grand désert syrien, limitrophe de la province d'Al-Anbar en Irak, qu'il contrôle déjà en grande partie, Daech contrôle "désormais plus de 95.000 km2 en Syrie, soit 50% du territoire du pays", selon l'ONG. Située à 100 km à l'ouest de Baghdad, Ramadi chef-lieu de la province d'Al-Anbar est depuis dimanche aux mains de l'EI, mais une contre-offensive d'envergure des forces gouvernementales soutenues par des groupes para-militaires se prépare pour reprendre la ville. Une conquête totale d'Al-Anbar permettrait à Daech de renforcer sa présence aux confins de la région de Baghdad, de la Syrie, de l'Arabie saoudite et de la Jordanie. Face à cette situation, les Etats-Unis ont reconnu mercredi qu'ils réexaminaient leur stratégie en Irak après la prise de cette ville, la victoire la plus significative de ce groupe armé depuis qu'il a conquis de vastes régions à la faveur de son offensive en juin 2014. De son côté, en visite à Baghdad, le ministre iranien de la Défense, Hossein Dehgan, a affirmé que "soutenir l'Irak face aux crises sécuritaires fait partie de la politique immuable de l'Iran". Baghdad veut aussi l'aide de la Russie. Le Premier ministre s'est rendu à Moscou mercredi pour discuter de cette question avec le président Vladimir Poutine, selon le bureau de M. Abadi.