La bataille entre les pays en développement avec ceux industrialisés a été réellement engagée mercredi, au deuxième jour des négociations sur le climat, en raison des inégalités, des inquiétudes, des aspirations et des intérêts qui ne partagent pas. Selon des négociateurs, qui ont requis l'anonymat, les discussions au Bourget sont "ardues" et "laborieuses" entre les deux "protagonistes" qui pratiquement campent sur leur position, et "tout va lentement". C'est en raison de cette situation qui ne semble pas augurer de jours meilleurs, malgré l'optimisme affiché par les chefs d'Etat et de gouvernement à l'ouverture de la conférence, que le président de la COP21, Laurent Fabius, a appelé les négociateurs de 195 pays à "accélérer" leurs travaux pour conclure le fameux accord, "ambitieux", "universel" et "équitable", tant souhaité pour sauver la planète des conséquences du dérèglement climatique. "Mon message est tout à fait clair: il faut accélérer le processus parce qu'il nous reste beaucoup de travail", a déclaré Fabius lors d'une conférence de presse, organisée mercredi au Bourget, où se déroule, jusqu'au 11 décembre, la conférence mondiale sur le climat. A titre de rappel, la conférence doit permettre de sceller un accord destiné à limiter le réchauffement à 2 degrés C par rapport à l'ère préindustrielle. Voulant donner un coup de semonce aux négociations, le président de la COP21 a souhaité que des compromis soient dégagés "le plus rapidement possible», en rappelant que les chefs d'Etat et de gouvernement "nous ont donné lundi un mandat sans ambigüité, nous devons réussir". Devant cette situation de frustration, exprimée par le pays organisateur, les pays les plus pauvres de la planète, qui n'émettent que 10 % des rejets polluants, souffrent le plus des répercussions négatives du réchauffement climatique. Les représentants des petits Etats insulaires (39 pays) ont indiqué, dans une conférence de presse, que le réchauffement climatique "est déjà une réalité" pour eux, soulignant qu'un accord "juridiquement contraignant" est essentiel, car il y va de leur existence. Un seul message est délivré par cette entité vulnérable : un droit à l'existence. "Je suis venu à Paris pour dire que le réchauffement climatique est déjà une réalité pour nous. Les petits Etats insulaires sont parmi les plus vulnérables de la planète. Et le plus souvent et le plus violemment affectés par la hausse des températures. C'est notre existence même qui est menacée", a expliqué le ministre de l'Agriculture des îles Fidji, Inia Seruiratu. L'élévation du niveau de la mer, les cyclones, les inondations affectent les terres agricoles de ces pays où l'agriculture est la principale ressource économique. Par ailleurs, l'inégalité entre Nord et Sud face au dérèglement climatique pose, selon des observateurs au Bourget, un obstacle "concret" pour l'aboutissement d'un accord, au moment où la majorité des délégations ne veut plus revivre la déception de Copenhague de 2009. C'est dans ce contexte que l'ONG Oxfam, qui milite pour un monde "juste" et "sans pauvreté", a demandé, dans son rapport publié à l'occasion de la COP21 et intitulé "Inégalités extrêmes et émissions de CO2", aux gouvernements des pays riches de "faire quelque chose pour ceux qui n'ont rien". Selon cette ONG, le changement climatique est "intrinsèquement" lié aux inégalités économiques, expliquant que "c'est une crise induite par les émissions de gaz à effet de serre des nantis qui frappe le plus durement des pauvres". Elle indique que 10 % des habitants les plus riches de la planète "sont responsables de plus de la moitié des émissions de CO2, alors que la moitié la plus pauvre du globe n'est responsable que de 10 % des rejets polluants", ajoutant qu'une personne qui fait partie des pays des plus riches au monde "génère en moyenne 175 fois plus de CO2 qu'une personne se situant dans les 10 % les plus pauvres". Sur le plan des actions qui sont menées en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, une autre ONG, 350.org, a annoncé que plus de 500 institutions, représentant 3.400 milliards de dollars d'actifs, ont désormais renoncé à certains investissements dans les énergies fossiles. Cette ONG a précisé, dans un communiqué, que ces chiffres montrent que "les investisseurs comprennent ce qui se passe et réorientent de façon spectaculaire l'argent vers les énergies propres et renouvelables".