L'Afrique, avec ses capacités et son agenda à long terme, est devenue un acteur et un artisan du développement durable, a affirmé mardi au Bourget (Paris) le ministre d'Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Ramtane Lamamra. Au cours de la Journée de l'Afrique (Africa Day), organisée en marge de la conférence mondiale sur le réchauffement climatique (COP21), le ministre a indiqué dans une brève allocution que les ambitions africaines, inscrites dans les contributions nationales, sont liées aux finances, à la formation et au transfert technologique. Avant de prendre le statut de modérateur de deux panels sur les implications et les perspectives des Contributions Prévues Déterminées au niveau National (CPDN), le chef de la délégation algérienne à la COP21 a relevé avec "satisfaction" le niveau des contributions africaines dans l'effort mondial de limiter les dégâts néfastes du réchauffement climatique. A travers ces contributions, a-t-il dit en substance, le monde a une vision "claire" de la situation dans le continent et de ce que pourront être les solutions face aux conséquences du dérèglement climatique. Lamamra a appelé, à cet effet, à mettre l'Afrique en condition pour des engagements contraignants, justes, universels qui reflètent la responsabilité commune mais différenciée. Les différents intervenants dans cette rencontre sont revenus sur le défi climatique de l'Afrique, soulignant que le futur accord de Paris est "vital" pour ce continent qui souffre déjà des "pires effets" du réchauffement climatique. Dans ce contexte, il faudra donc, ont-ils recommandé, approfondir la réflexion sur les défis de développement des pays africains pour atteindre une croissance "rapide et propre". Le représentant du Niger a, de son côté, appelé à "mettre chaque partie devant ses responsabilités", exhortant les pays africains à s'engager pour respecter les CPDN en se donnant les moyens de les réaliser. Roger Nkodo Dang, président du Parlement panafricain, a insisté, quant à lui, sur la compensation au profit de l'Afrique des conséquences du réchauffement climatique. Il a appelé, dans ce sens, la communauté internationale à respecter ses promesses en matière de soutien financier car, a-t-il expliqué, "partir de cette COP seulement avec des promesses, nous conduira vers des répercussions encore plus néfastes pour notre continent". Pour sa part, le chef-adjoint de la Division Changement climatique et énergie au niveau de la Banque européenne d'investissement (BEI), Peter Coveliers, a demandé aux pays africains de travailler, avec d'autres institutions financières, pour le financement des projets dans le cadre du développement durable. Il a estimé que les banques et les bailleurs de fonds doivent intervenir, rapidement, dans les petits projets, notamment dans les pays disposant déjà de mécanismes législatifs. Le directeur général de l'Organisation internationale du travail (OIT), Guy Ryder, a mis e exergue, dans son intervention, la corrélation de la crise climatique avec celle en matière d'emploi, expliquant que vers 2030, 600 millions de demandeurs d'emploi viendront sur le marché. Pour l'Afrique, a-t-il relevé, il y aura un sur trois demandeurs, ajoutant que le continent n'a pas "suffisamment" créé d'emplois pour des raisons liées à son développement qui est affecté par les conditions climatiques. Il a préconisé, dans ce cadre, de trouver des réponses intégrées (climat-emploi), d'autant, a-t-il soutenu, que l'Afrique renferme d'énormes potentialités sur le plan climatique pouvant générer de l'emploi. Les toutes prochaines années verront, a-t-il annoncé, la venue de 60 millions de demandeurs d'emploi et l'Afrique, dans le cadre ses contributions nationales pour la lutte contre le réchauffement climatique, devra saisir cette opportunité pour créer de l'emploi, notamment pour les jeunes, à travers ses projets de développement durable. "Nous devons faire face à un très grand défi et nous sommes optimistes", a conclu de le DG de l'OIT. Allant dans le même sens, la Banque africaine de développement (BAD) a estimé que l'adaptation au changement climatique combinée avec la réduction des émissions de gaz à effet de serre "peut aider à stimuler la transformation économique dont l'Afrique a besoin". Le développement visé par la Africains devra résister au climat, un développement "à faible émission de carbone, qui stimule la croissance, comble le déficit énergétique et réduit la pauvreté", a expliqué la BAD dans une contribution à la COP21 distribuée à la presse. Les sept défis climatiques de l'Afrique (ENCADRE) L'Afrique est particulièrement vulnérable au changement climatique et souffre déjà de ses pires effets. Voici les sept défis de l'Afrique présentés par la Banque africaine de développement (BAD): LES RECOLTES AGRICOLES VONT BAISSER : le changement climatique va réduire les récoltes des principales céréales dans toute l'Afrique. En Namibie, par exemple, les impacts climatiques sur l'agriculture pourraient réduire le PIB de 1 % à 6 %. LES CONDITIONS METEOROLOGIQUES EXTREMES VONT AUGMENTER : le réchauffement mondial change la fréquence, l'intensité, l'étendue et la durée des extrêmes météorologiques et climatiques. Ceux-ci incluent des sécheresses très prononcées, des inondations, des stress thermiques et des cyclones tropicaux. LA MALADIE ET LA MALNUTRITION : des évènements extrêmes comme des inondations peuvent se combiner avec des changements à plus long terme comme l'élévation des températures, et favoriser la propagation de maladies infectieuses, déplacer les zones impaludées et exacerber la malnutrition. LES RESSOURCES EN EAU POURRAIENT DIMINUER : les changements dans les régimes des pluies pourraient réduire la disponibilité de l'eau dans certaines régions. Jusqu'à 90 millions de personnes pourraient être menacées si la pluie diminue à tel point que les ressources souterraines ne pourront pas se renouveler. IMPACT SUR LA PRODUCTION DE L'ENERGIE : la production de l'énergie qui dépend de la force hydraulique sera la plus affectée. Les changements dans la pluviométrie augmenteront peut-être la capacité de génération en Afrique de l'Est, mais diminueront en Afrique de l'Ouest et en Afrique australe. L'ELEVATION DU NIVEAU DE LA MER MENACERA LES VILLES : la plupart des grandes villes africaines sont situées sur la côte, comme Accra, Dar Es-Salam, Lagos et Maputo. Jusqu'à 10 millions de personnes pourraient être menacées par les inondations au Cameroun, au Mozambique, au Sénégal et en Tanzanie. MENACES SUR A PECHE : l'élévation de la température océanique et l'acidification de l'océan altèrent drastiquement les écosystèmes aquatiques. Cela met en danger la durabilité de la pêche et de l'aquaculture, ainsi que les moyens de subsistance des communautés qui dépendent de la pêche.