Des experts économiques ont plaidé, mercredi à Alger, pour une intervention "forte" et "urgente" du gouvernement afin de sauvegarder les entreprises algériennes et certaines professions libérales qui risquent de disparaître à cause des effets de la propagation de la pandémie du coronavirus. Intervenant lors d'une e-conférence portant sur le thème "L'Entreprise et le Citoyen face au Covid-19", organisée par le Cercle d'action et de réflexion (CARE), des experts algériens ont appelé à une intervention "forte" et "urgente" de l'Etat pour sauvegarder les petites et moyennes entreprises et certaines professions libérales impactées par la crise sanitaire du coronavirus. "Certes, la priorité devra être évidemment accordée à la lutte contre la maladie et l'urgence est à la prise en charge de la santé publique de nos citoyens et notre mobilisation solidaire envers nos personnels soignants. Mais notre économie fait également face à une situation très difficile avec une menace de faillite pour des milliers de petites entreprises", a souligné lors de son intervention Nadhir Laggoune, consultant en stratégie d'entreprises et management. Recommandant la mise en place d'un comité technique national qui agira en tant que "task force" pour soutenir les actions du gouvernement, M. Laggoune a insisté également sur la mise en place de mesures financières, bancaires et fiscales à caractère "urgent" en vue de maintenir l'activité des entreprises et professions touchées par le confinement instauré suite à la propagation de la pandémie. A ce propos, il a suggéré l'octroi de crédit bancaire à taux zéro, l'allègement des impositions fiscales et le paiement de créances détenues par des entreprises privées auprès des institutions de l'Etat, des collectivités locales et des grandes sociétés publiques. "Dans une situation exceptionnelle, il faudrait des mesures exceptionnelles. Des décisions fortes et rapides de l'Etat sont nécessaire pour assurer une reprise rapide de l'activité économique après le déconfinement", a soutenu encore M. Laggoune, invitant aussi la Banque d'Algérie à abaisser ses taux directeurs pour soutenir les banques de la place. Dans le même ordre d'idées, l'analyste économique Mouloud Hedir a fait observer que les mesures bancaires prises récemment par la Banque d'Algérie, notamment celles portant sur le rééchelonnement des dettes des entreprises et l'ajournement des remboursements de crédits doivent être soutenues par d'autres dispositions à même de permettre la préservation des postes de travail et les revenus des millions de salariés se trouvant actuellement au chômage. "Les entreprises et les travailleurs ne sont pas responsables de la pandémie", a fait remarquer en outre M. Hedir, tout en reconnaissant que le gouvernement est face à une situation de crise qualifiée de "très difficile" et qui requiert, selon lui, des décisions "urgentes" pour la surmonter. Parmi les propositions soutenues par l'ancien directeur général du Commerce extérieur au ministère du Commerce, la mise en place d'un revenu Covid-19 d'une valeur de 10.000 DA échelonné sur trois mois au profit des 5 millions de travailleurs du secteur informel qui ne bénéficient pas de l'allocation-chômage. Estimant le budget de cette opération à 150 milliards DA, M. Hedir a affirmé que cette enveloppe reste "modeste" comparativement au budget de 2.200 milliards DA alloué par l'Etat au paiement des salaires des fonctionnaires. Il s'est dit favorable, également, au retour à la planche à billets pour surpasser la crise actuelle, mettant en avant, dans ce sillage, que les 1000 milliards d'euros mobilisés par l'Union européenne pour soutenir les entreprises du Vieux-Continent proviennent de la planche à billets. De son côté, Slim Athmani, membre du CARE et qui a modéré les travaux de cette e-conférence, a soulevé "l'incertitude" qui plane sur le monde de l'entreprise, assurant que celle-ci subissait déjà une "grave" crise depuis 2014, lorsque les prix du pétrole avaient chuté de manière conséquente.