Le Burkina Faso a été depuis jeudi, le théâtre de manifestations monstres appelant à la fin de la présence militaire française dans ce pays du Sahel où le sentiment anti-français est arrivé à son paroxysme. Selon les organisateurs et les habitants, des milliers de personnes ont manifesté vendredi à Kaya, chef-lieu de la région du Centre-nord du Burkina Faso pour s'opposer au passage d'un important convoi logistique de l'armée française en transit vers le Niger voisin, et réclamer le "départ des troupes françaises". Signe de l'exaspération des manifestants, les slogans scandés pour dénoncer la présence française dans ce pays sahélien. "Armée française dégage!", "Libérez le Sahel", "Plus de convois militaires d'invasion et de recolonisation français", étaient notamment écrit sur des banderoles brandies par des manifestants, rassemblés à l'entrée de Kaya, selon des correspondants de presse sur place. Samedi, au moins quatre personnes ont été blessées dans la même localité, où la tension est montée d'un cran entre les manifestants et les soldats de l'armée française. En provenance de la Côte d'Ivoire et à destination du Niger, l'avancée du convoi avait déjà été bloquée mercredi et jeudi par des manifestants à Bobo Dioulasso (ouest), puis dans la capitale Ouagadougou où les forces de sécurité burkinabè ont dû faire usage de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants, selon Roland Bayala, porte-parole de la Coalition des Patriotes africains du Burkina Faso (Copa-BF), qui a appelé à ces manifestations. Ce sentiment anti-français qui s'est cristallisé au Burkina Faso à travers plusieurs mouvements de contestation fait suite à celui déjà observé au Mali, où des mouvements de la société civile et des partis politiques maliens ont décidé de braver le protocole sanitaire en investissant la rue dès le mois de janvier pour protester contre la présence française au Mali depuis 2013. Ces manifestations, qui se sont poursuivies jusqu'au mois d'octobre, sont intervenues dans un contexte marqué par la multiplication des bavures militaires françaises au Sahel, dont la plus sanglante avait fait en janvier 19 morts, parmi les civils à la lisière du village de Bounti, dans le centre du Mali. Lire aussi: Ethiopie: intensification des efforts pour négocier un cessez-le-feu Plusieurs organisations nationales et internationales à l'instar de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et l'Association malienne des droits de l'Homme (AMDH) avaient alors demandé une "enquête indépendante, approfondie et impartiale". Suite à ces bavures militaires ayant entaché la réputation de la France, déjà ternie dans la région, le président français, Emmanuel Macron a fini par annoncer, le 10 juin dernier, la fin de la mission Barkhane dans ce pays sahélien, actant l'échec d'une politique militaire qui a duré huit ans, alors qu'un sondage réalisé début janvier par l'institut Ifop a révélé que la moitié des Français désapprouvent l'intervention française au Mali. "Nous allons amorcer une transformation profonde de notre présence militaire au Sahel", avait déclaré le président français lors d'une conférence de presse, en référence aux 5.100 soldats déployés dans le cadre de la force française Barkhane. Cette transformation impliquera "la fin de l'opération Barkhane en tant qu'opération extérieure" et la "mise en œuvre d'une alliance internationale associant les Etats de la région et tous nos partenaires, strictement concentrée sur la lutte contre le terrorisme", avait-il ajouté. Auparavant, l'ensablement de l'opération française, en cours depuis 2014, avait poussé le Sénat français à programmer un débat public, le 9 février dernier, pour faire le bilan.