Le gouverneur de la Banque d'Algérie, M. Mohammed Laksaci, a soulevé samedi à Washington les principaux obstacles qui entravent encore la reprise solide et durable de la croissance mondiale, citant le poids de la dette publique et les dysfonctionnements du secteur financier des pays industrialisés. M. Laksaci a fait cette intervention au nom du groupe des pays qu'il représente (Algérie, Afghanistan, Ghana, Iran, Maroc, Pakistan et Tunisie) à la réunion du Comité Monétaire et Financier International (CMFI) auprès du Fonds monétaire international, dans le cadre des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale qui se tiennent du 8 au 10 octobre dans la capitale fédérale. "Si l'économie mondiale a poursuivi sa reprise, celle-ci demeure, toutefois, inégale, affichant une force continue ou gagnant en rythme dans beaucoup de pays émergents et en développement, mais restant faible dans les pays avancés où des vulnérabilités persistent aux niveaux de la dette souveraine, du secteur financier et du marché immobilier, qui contraignent la croissance et l'emploi dans beaucoup de ces pays", a-t-il souligné. La crise de la dette souveraine en Europe a "freiné le retour à la stabilité financière et secoué la confiance des marchés dans beaucoup de pays avancés", accroissant les incertitudes et les risques liés à la croissance globale, a expliqué M. Laksaci. Face à ces développements, il a considéré qu'une "coopération continue et une coordination des politique" demeuraient cruciales pour soutenir une reprise durable, solide et plus équilibrée. Bien que les processus de consolidation budgétaire en cours dans plusieurs pays avancés soient essentiels pour mettre les finances publiques sur une voie viable et remédier à moyen terme au problème de la dette publique élevée, "l'impact négatif potentiel sur la croissance et l'emploi ne doit pas être occulté", a-t-il observé. En conséquence, des progrès décisifs doivent être également réalises en matière de renforcement des systèmes financiers dans les pays avancés, a-t-il suggéré. A ce propos, il a estimé que le récent accord relatif au capital et à la liquidité des banques (Bâle III) constituait un pas important, mais beaucoup reste encore à faire en matière de renforcement du cadre de régulation et de supervision et de résolution de la question des institutions financières dites ''trop importantes pour faillir''. Par ailleurs, M. Laksaci a appelé à un engagement clair pour "éviter les mesures protectionnistes afin de pouvoir soutenir une croissance forte et plus équilibrée", ajoutant qu'une "plus grande attention doit être accordée aux risques associés à l'accroissement des flux de capitaux vers certains pays émergents et en développement, particulièrement au vu des rythmes divergents des politiques monétaires, ainsi qu'aux risques qui pourraient potentiellement émerger de mouvements désordonnés des taux de change." S'exprimant sur les pays du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord, le gouverneur de la Banque d'Algérie s'est félicité des performances prévues en matière de croissance dans cette région (4,1 pc en 2010 et 5,1 pc en 2011) où "des années de gestion macroéconomique prudente, des fondamentaux solides et des réponses robustes ont contribué à contenir les effets de la crise économique et financière internationale sur leurs économies et soutenu l'activité économique". Il a observé, néanmoins, que certains pays de cette région pourraient être "négativement affectés par un ralentissement prolongé de la croissance mondiale ou de l'instabilité financière en Europe au vu des liens importants avec cette région". Dans son intervention, il a également salué les perspectives de forte croissance économique en Afrique subsaharienne (5 pc en 2010 et 5,5 pc en 2011), soutenue par la mise en oeuvre de politiques contra-cycliques, une reprise des prix des produits de base et une demande intérieure robuste, ajoutant que "le renforcement de l'assistance de la part de la communauté internationale est essentiel pour aider les pays à faibles revenus à atteindre les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD)". ''La décision de rendre l'évaluation de la stabilité financière obligatoire pour les pays membres à secteurs financiers systémiques devrait renforcer la surveillance. Le raffinement de la Facilité Flexible de Crédit et l'établissement de la Facilité Préventive de Crédit sont des pas importants dans le renforcement du rôle du Fonds en matière de prévention des crises. L'impartialité dans la mise en oeuvre sera essentielle à cet égard. Nous attendons également que le Fonds démontre le même degré de réponse et de flexibilité en matière de prêts aux pays à faibles revenus", a-t-il soutenu. Abordant la question de la gouvernance au sein du FMI, M. Laksaci a souligné que le groupe qu'il représentait prend note du travail en cours relatif à la revue du mandat du Fonds et de sa gouvernance. Sur ce point, il a réaffirmé que "la réforme des quotes-parts est centrale pour redresser la formule dans la distribution des quotes-parts entre pays avancés et pays émergents et en développement et renforcer ainsi la légitimité, la pertinence et l'efficacité du Fonds". A cet égard, a-t-il insisté, "la 14ème revue générale des quotes-parts en cours devrait déboucher sur un transfert significatif des quotes-parts en faveur des pays émergents et en développement dynamiques sans que ce transfert intervienne aux dépens d'autres pays émergents et en développement et des pays à faibles revenus". ''De plus, dans l'attente de la nécessaire révision de la formule de calcul des quotes-parts, celles de tous les pays émergents et en développement ainsi que celles des pays à faibles revenus se doivent d'être protégées contre toute baisse. D'autant plus que beaucoup de ces pays ont été négativement affectés lors des précédents réalignements des quotes-parts. Nous ne pouvons apporter notre soutien à une forte augmentation des quotes-parts que dans la mesure où ces deux objectifs soient respectés'', a-t-il argumenté. Il est à souligner que le Comité Monétaire et Financier International est chargé de donner des avis et de faire rapport au Conseil des gouverneurs concernant la gestion et l'adaptation du système monétaire et financier international. Il surveille aussi l'évolution de la liquidité à l'échelle mondiale et des transferts de ressources aux pays en développement, examine des propositions du Conseil d'administration visant à modifier les Statuts, et réagit à des événements qui risqueraient de perturber le système monétaire et financier international. Ce comité se compose de 24 membres qui sont des gouverneurs de banques centrales, ministres ou autres responsables de rang comparable, et qui figurent parmi les gouverneurs des 187 pays membres du FMI.