Les showrooms des différents concessionnaires automobiles d'Alger étaient pris d'assaut, jeudi dernier, par les nouveaux acquéreurs de véhicules. Il ne s'agissait pas cette fois d'une remise exceptionnelle, mais par crainte d'être touché par la nouvelle taxe, des plus impopulaires, introduite dans la loi de finances complémentaire 2008. Cette taxe, payée par les concessionnaires, sera en fin de compte supportée dès aujourd'hui par les acquéreurs. Promulguée mardi et publiée le lendemain au Journal officiel (JO), cette taxe a pris de court et les concessionnaires et les nouveaux acquéreurs. Selon les dispositions de la loi de finances complémentaire, « au titre de la première mise en circulation, la taxe est prélevée par le concessionnaire et reversée comme en matière de droit de timbre ». Chez les concessionnaires, c'est le flou total. Faut-il appliquer cette taxe à tous les clients qui doivent réceptionner leurs véhicules à partir de samedi ou uniquement sur les nouvelles commandes ? La réaction des citoyens qui ont déjà payé leurs véhicules et attendent d'être livrés ne s'est pas fait attendre. Jeudi, chez Toyota, de nombreux clients s'étaient rués pour se renseigner sur l'application de cette nouvelle taxe que d'aucuns qualifient d'« excessive et injustifiable ». Nombreux sont ceux qui n'ont pas pu contenir leur colère. « Je ne comprends pas pourquoi c'est à nous, simples employés, de financer le transport en commun, dont la plus grande partie est exploité par des privés », peste Saïd, un fonctionnaire de Rouïba. Ce dernier, ayant déjà payé rubis sur l'ongle son bien commandé depuis un mois, ne retient plus sa colère face à l'exigence du concessionnaire, en application de cette taxe du paiement de 100 000 DA de plus pour pouvoir sortir son véhicule. R. B. est lui aussi dans tous ses états. Il fulmine de colère. « J'ai appelé pour me renseigner au sujet de ma carte jaune, si elle est prête ou pas, on m'a demandé de me rapprocher au plus vite du concessionnaire pour payer mon véhicule, au risque d'être touché dès samedi par une taxe de 70 000 DA », dit-il. Et de s'interroger en ironisant : « Après avoir criminalisé il y a quelques jours les harraga le gouvernement veut-il en faire de même pour les nouveaux acquéreurs de véhicules ? » Les concessionnaires se disent, de leur côté, « perturbés » par cette nouvelle taxe qui a « chamboulé » toute leur comptabilité. « Nous étions obligés d'appeler un à un nos clients pour les informer des nouvelles mesures qui ont été décidées », avance une source de Toyota. En fait, les concessionnaires ont été pris de court par cette nouvelle taxe. Au début, on leur aurait dit qu'elle ne sera appliquée qu'à partir du début du mois de septembre, mais finalement ils ont été destinataires dès mercredi dernier d'une note de la direction de la législation et de la réglementation fiscale. Du coup, cette taxe n'a pas manqué de susciter l'inquiétude des clients, notamment ceux qui ont acheté et payé leur véhicule sans l'avoir réceptionné encore. « C'est la confusion totale », estime Fatiha qui, après avoir payé son véhicule qu'elle n'a pas encore réceptionné, dit ignorer si cette taxe lui sera imposée. « On ne sait pas encore si on est concernés ou pas », dit-elle, désorientée. « Il faut dire que c'est la première fois qu'une loi est promulguée puis appliquée sans que les concernés ne soient informés. Il aurait fallu mettre en place tout un système d'informations pour préparer les citoyens acquéreurs à une telle mesure », estime un concessionnaire. Il va sans dire que c'est vraiment un coup dur pour les petites bourses. Ces taxes, variant entre 50 000 et 150 000 DA représentent en effet 4 à 10 fois le SNMG (12 000 DA). Des clients qui ont dû faire des économies durant des années ou s'endettent pour acheter leur bien ont été tout simplement choqués. « Cela fait des années que je fais des économies pour enfin acheter mon véhicule et là, c'est tout cet espoir qui part en fumée », rouspète Siham. Nombreux sont ceux qui, d'ailleurs, envisagent de renoncer à l'achat de leur véhicule si cette taxe venait à être appliquée. « Si tel est le cas, il me faudrait un crédit supplémentaire pour acquérir mon véhicule », soutient Ali.Nombreux sont les acquéreurs qui se sont précipités à leur banque pour récupérer les chèques de crédit automobile dont ils ont bénéficié, dans le but de s'acquitter de l'apport initial rapidement, dans l'espoir de ne pas payer la taxe en question. Il s'agissait d'une véritable course contre la montre qui s'est avérée vaine pour beaucoup d'entre eux. Cette taxe a été accueillie comme un coup de couteau dans le dos par les citoyens concernés, qui ne comprennent pas son utilité.