Jamais de mémoire de festivalier, on n'avait autant parlé de l'Algérie et de son cinéma. Il faut dire que le directeur du festival, Jean François Bourgeot, est très à l'écoute du cinéma algérien. Une présence active qui a tenu en haleine les nombreux cinéphiles venus découvrir un programme très iconoclaste. L'évènement du premier jour fut la projection de l'unique long métrage de Tewfik Farès, Les Hors-la-loi, réalisé en 1968. Ce film dont la copie a été restaurée, doit ressortir dans les salles en France incessamment. Pour son diffuseur, c'était une sorte de générale pour jauger la réaction du public. L'engouement suscité par ce film augure pour lui d'une carrière commerciale indéniable. Et beaucoup de cinéphiles ayant demandé aux organisateurs une deuxième projection, c'est dire combien il a plu. En quarante ans, il n'a pas pris une ride, surtout quand on voit le casting que s'est offert le réalisateur : Agoumi, Djamila, Chouikh, Tayeb Abou Lahacène. L'histoire se déroule à la fin des années quarante où l'éveil au nationalisme faisait son chemin. Slimane, joué par l'excellent Sid Ahmed Agoumi, déserte l'armée pour venir voir son père mourant. Dénoncé par le Caïd du village, capturé par les gendarmes, il s'évade une nouvelle fois pour se venger du Caïd et se débarrasser de l'administrateur et de ses gendarmes. On retrouve dans ce film les codes du western avec des images époustouflantes. Le jeu des acteurs était hors normes avec le regretté Cheikh Noureddine et Arezki Nabti qui ont montré qu'ils avaient beaucoup de classe. Un débat passionnant a suivi la projection rehaussée par la présence de Tewfik Farès. Dans la catégorie documentaire, Mahdi Meddaci et Zineb Sédira qui vit en Angleterre, continuent de prospecter des univers qui permettent d'établir des passerelles entre les pays d'accueil et le pays natal. Zineb Sédira essaye de rendre compte à travers sa caméra des ruptures linguistiques entre générations nées en Algérie puis en France et enfin en Angleterre. Pour les courts métrages, c'est le travail de Katia Kaméli qui a été mis à l'honneur avec l'expérience de l'atelier qu'elle a monté en Alger pour aider des jeunes cinéastes à mettre en pratique leurs rêves cinématographiques. Ainsi, on a pu revoir Les Baies d'Alger de Hassen Ferhani avec ses dialogues croustillants surpris par la caméra à travers les fenêtres. Ce court métrage est devenu un classique du festival qui le projette à chaque édition. En apothéose, le spectacle musical de clôture a été confié au musicien algérien Safy Boutella. Ce dernier a pu recréer toutes les atmosphères des films dont il a composé les bandes originales. La nuit du palmarès a vu le jeune cinéaste de Bejaïa, Mohamed Yargui, obtenir la mention spéciale du jury pour son court métrage Houria. Une belle moisson automnale pour un cinéma qui se cherche.