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« Un mécanisme bien rodé »
Publié dans El Watan le 10 - 12 - 2008

Les violences urbaines en Grèce illustrent la combativité et la capacité d'organisation de la mouvance anarchiste active dans les principales villes du pays.
Dès la bavure connue, samedi soir, de petits groupes de jeunes casqués et cagoulés se sont répandus dans les centres des grandes villes du pays, s'en prenant aux devantures de banques, vitrines de magasins et voitures en stationnement tout en bombardant les forces de l'ordre de projectiles en tous genres. Comptant, selon les estimations , de 2000 à 3000 personnes, la mouvance anarchiste est coutumière, en Grèce de ce genre d'actions qui émaillent régulièrement les manifestations étudiantes ou les grands rassemblements syndicaux, souligne le criminologue Ioannis Panoussis. « Il y a un mécanisme bien rodé en place », dont la rapidité de réaction a beaucoup gagné avec internet et les téléphones portables, estime-t-il, mais « cette fois, c'est parce qu'il y a eu rencontre avec une colère spontanée de la jeunesse que les incidents ont pris une telle ampleur ». L'activisme anarchique a été « le détonateur d'une sorte d'explosion sociale due à l'insécurité économique affectant beaucoup de jeunes, chômeurs ou mal payés », jugait pour sa part l'avocat Dimitris Beladis, expert en guérilla urbaine.
Lundi, l'ensemble des médias estimait que les autorités avaient fait le mauvais choix, en optant dans un premier temps, de ne pas faire intervenir les forces de l'ordre, laissant le champ libre aux casseurs. Pour M. Panoussis, cette option « reflète la tolérance dont l'activisme anarchiste ou d'extrême-gauche semble souvent jouir en Grèce, alors qu'il est tenu pour responsable, depuis des années, de fréquents petits attentats incendiaires contre des cibles publiques, diplomatiques et économiques ». « Les autorités entendent prévenir ainsi plus de radicalisation », dans un pays où la jeunesse reste très politisée et où la méfiance envers les représentants de l'ordre reste forte, héritée d'une histoire qui a vu se succéder les régimes autoritaires jusqu'à la dictature des Colonels (1967-1974), estime M. Panoussis. En dépit du démantèlement en 2002 et 2003 des deux groupes historiques, actifs depuis le retour de la démocratie, le terrorisme d'extrême-gauche reste d'actualité dans le pays. Le groupe Lutte révolutionnaire, considéré comme le plus dangereux, a été inscrit sur la liste des organisations terroristes par l'Union européenne après huit attentats à Athènes depuis 2003, dont l'un à la roquette contre l'ambassade des Etats-Unis en janvier 2007.
Face à cette menace, comme à la violence de rue, les experts grecs et étrangers mettent souvent en cause un manque d'efficacité policière, fruit d'une formation insuffisante, d'une mauvaise planification des opérations et du carcan législatif qui entoure le maintien de l'ordre. Les forces de l'ordre se sont ainsi vu refuser le droit d'utiliser quelque 300 caméras de surveillance mises en place pour les Jeux olympiques d'Athènes de 2004, mais dédiées depuis au seul contrôle de la circulation automobile. Par ailleurs, le droit d'asile universitaire, qui ne permet aux forces de l'ordre de franchir l'entrée d'une faculté qu'à l'issue d'une procédure exceptionnelle, offre aussi des sanctuaires aux fauteurs de troubles, à Athènes et Salonique, en plein centre-ville.


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