Le secteur de la santé publique n'a pas fini de manger son pain noir. Fréquenter les établissements publics de la wilaya de Béjaïa, dans les conditions de prise en charge qui y prévalent, rend malade. C'est depuis quelques années que ce constat amer est rabâché par le commun des citoyens et des voix plaignantes se font de plus en plus nombreuses et les propos de plus en plus mordants. Cela s'est vérifié dans les débats qui ont eu lieu dernièrement à l'APW, en présence du premier responsable du secteur, le DSP. En témoignages, les élus n'ont pas été avares. L'un d'eux, avocat de profession, rapporte des cas d'erreurs médicales fatales récemment soumis à la justice dont celui d'une fille de 15 ans qui a trouvé la mort à Sidi Aïch pour un problème d'appendicite qui aurait mal tourné. L'anesthésiste, a été mis en cause. « Cet infirmier, 30 ans de service, est victime du secteur. C'est parce qu'il y a manque de médecin » plaide l'élu-avocat. La justice a eu aussi à traiter du cas d'une chirurgienne pour une « erreur médicale » provoquée par un problème d'indisponibilité d'anesthésie. Le malade, dans sa longue attente de subir une opération chirurgicale, est malheureusement décédé. Un autre élu rapporte la mort d'un bébé dans « l'endroit censé être le plus protégé dans une maternité », dans la couveuse. Cela se serait passé le 17 août dernier. Le bébé est né suite à une césarienne. Il est mis dans une couveuse. Il contracte une méningite cérébro-spinale. L'enfant hydrocéphale est transféré vers un centre hospitalisé. « Les parents n'ont même pas été soulagés, il n'y avait même pas de scanner » rapporte l'élu. « Le 8 novembre le prématuré décède. Et son père est dans la salle » termine l'élu. Un autre le succède, le propos aussi amer : « Il faut flirter avec la mort pour arriver à avoir droit à une opération chirurgicale ». D'aucuns dénoncent les longues listes d'attente pour un rendez vous au bloc-opératoire. « À Akbou, le malade a le temps de mourir deux fois » a commenté un autre élu qui apporte aussi son témoignage : « Il y a deux jours, en l'absence de chirurgien à l'hôpital, étant parti chez le privé, un citoyen a du laisser sa femme en souffrance à l'hôpital. Le directeur a supplié le spécialiste privé de venir assister la femme dans son accouchement ». Dans le Sahel, on n'est pas logé à meilleure enseigne. Tout récemment, une grossesse à haut risque s'est présentée à la maternité de Tamrijet. Le manque de moyens a poussé le mari de la parturiente à aller espérer une prise en charge chez le privé. Ce sera fait mais avec une nouvelle orientation vers la maternité de Targa Ouzemmour. « L'unique gynéco était absent, elle a été alors évacuée vers la maternité de Kherrata. Examinée, elle fini par avoir une lettre d'orientation vers Sétif. Epuisé, le couple rentre tout simplement chez lui. Pendant la nuit, la femme a eu des complications. Elle retournera vers la maternité de Tamrijet avant de se retrouver en fin de parcours dans une clinique privée, à Béjaïa, où elle accouchera par césarienne ». « une opération chirurgicale peut coûter 23 millions chez le privé » lance un élu qui dénonce « l'absence de contrôle des cliniques privées ». « La plupart des chirurgiens de la santé publique sont des conventionnés qui travaillent chez le privé vers où ils orientent leurs patients » accusent des élus. Ainsi, l'épanouissement du privé se nourrit des innombrables défaillances du secteur public. Exemples : grand déficit en spécialistes, service de psychiatrie sans psychiatre à Akbou (congé de maternité), un seul médecin pour la population de Beni Maouche, pas de gynécologue dans la région de Tazmalt, insuffisance de centres d'hémodialyse, manque flagrant d'équipements, ….