Le rappel du soldat Ouyahia pour sauver un bilan bien famélique de Bouteflika aura été l'un des événements marquant de la vie politique en 2008. « Démissionné » deux années plus tôt de manière presque humiliante en l'empêchant même de présenter son bilan à l'APN, Ahmed Ouyahia a été (r)appelé le 24 juin dernier pour la troisième fois pour servir à la tête du gouvernement et pour la deuxième fois sous les ordres de Bouteflika. Une surprise ? Pas tout à fait. Le départ du très effacé Abdelaziz Belkhadem était dans l'air depuis des mois. L'intermède n'aura donc duré que deux années durant lesquelles le Premier ministre sortant aura géré à tâtons un gouvernement sans programme dans une posture d'un secrétaire technique. Ahmed Ouyahia qui fut contraint en mai 2006 de rendre le tablier suite à une fronde à l'Assemblée, orchestrée et téléguidée à partir du palais présidentiel, est revenu comme si de rien n'était… Le président Bouteflika à qui il offrit la planche de salut en mai 2003, en acceptant, contre vents et marées, de le servir comme chef du gouvernement après le limogeage de Ali Benflis, rappelle ainsi l'enfant prodige pour une mission quasi similaire, la crise politique en moins. Bouteflika sait bien sûr que le « pedigree » politique de Ahmed Ouyahia fait de lui un homme de main idéal, à moins d'une année de la présidentielle. Comme en 2003, Ahmed Ouyahia, qui adore le « sale boulot » comme il le reconnaît, devait donc s'attacher sans tarder à requinquer le bilan comptable du président Bouteflika. Le chef du gouvernement passé Premier ministre à la faveur d'une révision constitutionnelle qu'il aura longtemps écartée, voire dénoncée avant de battre la mesure, s'est attelé à relancer les chantiers poussifs du Président sous Belkhadem. Le programme d'un million de logements, l'autoroute Est-Ouest, le métro d'Alger, l'emploi de jeunes, sont entre autres défis que le « revenant » devait relever. Bien qu'il n'ait pas le temps, Ouyahia a tout de même accouché d'un bilan connu de tous qu'il a emballé sous forme de plan de travail et qu'il a habilement « vendu » à l'auguste Parlement. A coups de chiffres à la virgule que le commun des Algériens connaissait déjà, le Premier ministre a su faire passer la pilule avec une faconde et une rhétorique désarmantes. Ceci, même s'il a reconnu quelques jours après devant le Sénat qu'il s'agissait effectivement d'un bilan et non point d'un plan… Il aura donc réussi l'exercice de tribune sans résoudre la problématique du développement national. C'est justement pour son « génie » à transformer les mirages en réalités - virtuelles - que Bouteflika à (re)fait appel à son « talent ». Pour cause, même à un baril de pétrole à 30 dollars, Ouyahia promet la Lune aux Algériens. Quatre mois plus tôt à l'occasion du congrès de son parti, il prédisait une catastrophe (Mahzala) si jamais les cours du brut tombaient sous la barre des 60 dollars…