Le secteur des textiles et cuirs vit une crise aiguë. Pouvez-vous nous faire le point de la situation après la réunion, cette semaine, de la base syndicale de votre fédération ? La crise que vit le secteur des textiles et des cuirs ne date pas d'aujourd'hui. Elle remonte à plusieurs années. Il y a eu une perte importante d'emplois qu'on peut estimer aujourd'hui à hauteur de 40%. En termes de chiffres, environ 16 000 à 17 000 postes d'emplois ont été supprimés des suites de la crise que vit le secteur. En un mot, nous constatons un délaissement total du tissu industriel des textiles et des cuirs. A mon avis, tous les secteurs sont aujourd'hui stratégiques, y compris celui des textiles et des cuirs. Mais, en Algérie, l'on continue à alimenter l'idée des priorités, selon l'importance du secteur. Environ 15 entreprises, et non des moindres, ont mis la clé sous le paillasson. L'industrie des textiles est implantée particulièrement dans les régions enclavées, faisant de cette même industrie la seule plate-forme économique dans ces régions. Pour ainsi dire, s'il n'y a pas de reprise en main de ces industries, c'est toute l'activité manufacturière qui risquerait d'être affectée. Vous avez débattu lors de votre réunion avec les représentants syndicaux des travailleurs des textiles et des cuirs du processus de privatisation. Quelle appréciation faites-vous de ce processus et quel est le montant des dettes des entreprises ? Je reproche aux SGP (Sociétés de gestion des participations) leur totale inertie qui a retardé, voire bloqué, la relance de l'industrie des textiles et des cuirs en Algérie. Le travail de ces SGP a été réduit à faire beaucoup plus une arithmétique sur la fermeture des entreprises. Les SGP sont en train de tourner carrément le dos aux orientations du gouvernement, qui prônent la sauvegarde du tissu industriel national. Aujourd'hui, il est plus que jamais indispensable d'encourager l'investissement et la formation dans ce secteur et ce, par un concours et un appui concret du gouvernement. Pour ce qui est de la dette des entreprises, je n'ai pas un chiffre précis, mais elle est très importante. S'il n'y a pas d'aides de la part du gouvernement, on ne risque certainement pas de sortir le secteur de le marasme dans lequel il s'était embourbé. Il reste des possibilités et des solutions, pourvu qu'il y ait une volonté sincère. Concernant le processus des privatisations enclenché par le gouvernement, celui-ci a été freiné, faute de repreneurs qui ne se bousculent pas sur le marché. Par contre, il faut que le gouvernement travaille de sorte à promouvoir le partenariat. Il faut également que les pouvoirs publics changent de méthode de travail avec le partenaire social. Maintenant, s'il y a volonté politique, nous ne pouvons que la saluer. Nous sommes toujours conscients et disposés à participer à une réflexion globale à même de faire sortir le secteur de cette situation que nous jugeons catastrophique. Justement, la question qui s'impose est de savoir s'il existe aujourd'hui une réelle volonté politique pour prendre en charge la situation dramatique dans laquelle se trouvent les entreprises des textiles et des cuirs ? Si l'on prend en compte les nouvelles orientations du gouvernement, on peut constater que cette volonté existe, du moins dans les discours. Mais entre ces discours et ce que l'on constate sur le terrain, la différence est de taille. Il faut que le discours soit appliqué sur le terrain par des encouragements et des incitations ainsi que des aides concrètes en mesure de secourir le secteur. On ne peut pas faire d'omelette sans casser œufs.