Le président français Emmanuel Macron a proposé, hier à Helsinki, la mise en place d'une «solidarité quasi-automatique» entre les Etats européens en matière de défense qui entraînerait leur intervention si l'un d'entre eux était attaqué. «Notre volonté est clairement que l'Europe assume son autonomie stratégique et renforce sa solidarité en matière de défense», a déclaré M. Macron au cours d'une conférence de presse avec son homologue finlandais. Il a pour cela proposé que soit envisagée «une solidarité renforcée quasi-automatique, ce qui fera qu'entre Etats membres qui seront d'accord avec cette réforme, nous puissions avoir une véritable solidarité d'intervention si un Etat était attaqué». Cela nécessitera de «refonder» les traités européens, en particulier l'article 47.2 du Traité de Lisbonne qui porte sur l'assistance mutuelle entre Etats, que la France a déclenché pour la première fois après les attentats du 13 septembre 2015 à Paris. Cette réforme permettrait à l'UE d'avoir «une espèce d'article 5 renforcé», a précisé le président français, faisant allusion à la disposition de l'Otan qui stipule qu'une «attaque armée» contre un des pays membres est «considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties», déclenchant ainsi une assistance au secours de l'Etat concerné. Emmanuel Macron a indiqué que cette «avancée» n'était «pas contraire» à l'Otan, qui «reste une alliance importante et stratégique». «Mais nous avons besoin d'une solidarité renforcée» entre Européens, selon lui. L'UE tente de s'adapter au nouveau contexte géopolitique lié à la volonté du président Donald Trump de réduire l'implication des Etats-Unis dans la défense de l'Europe. Un Fonds européen de défense doit être mis en place en 2019 pour développer les capacités militaires des Etats membres et promouvoir l'indépendance stratégique de l'UE. Paris a parallèlement initié avec huit partenaires un groupe européen d'intervention destiné à être capable de mener rapidement une opération militaire, une évacuation dans un pays en guerre ou d'apporter une assistance en cas de catastrophe. Des mesures pour «renforcer les initiatives de défense commune» seront proposées «dans les prochains mois», a précisé l'entourage de M. Macron. Dans son discours devant les ambassadeurs français lundi, il avait appelé à «tirer toutes les leçons de la guerre froide», jugeant que l'Europe ne pouvait «plus remettre sa sécurité aux seuls Etats-Unis». Démagogues A ce titre, il a également appelé hier à faire l'aggiornamento complet de notre relation avec la Russie pour ne pas rester sur «des erreurs ou des incompréhensions des deux dernières décennies». «Notre intérêt est d'avoir des partenariats stratégiques, y compris en matière de défense, avec nos voisins les plus proches», a-t-il ajouté. Le président français Emmanuel Macron a averti hier aussi que «la pression migratoire va durer», plaidant pour que «l'Europe s'entende et apporte un réponse précise» à cette crise qui divise encore les pays membres de l'Union européenne. Emmanuel Macron a critiqué ouvertement des dirigeants européens défendant une politique ferme contre le phénomène de la migration et l'austérité budgétaire imposée par Bruxelles aux Etats de la zone euro. «Ceux qui disent mettons dehors tous les étrangers, fermons toutes les portes mentent. Ils n'y arriveront pas, car l'Europe n'est pas une île», a dénoncé le locataire de l'Elysée estimant qu'«un pont s'effondre, c'est celui de l'Europe !». Emmanuel Macron a qualifié de «mensonges d'Etat» et de «démagogues nationalistes» les discours de certains responsables européens qui veulent arrêter l'immigration illégale, faisant allusion notamment au Premier ministre hongrois, Viktor Orban, et au ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini. «Au terme de trois jours en Europe du Nord, pour moi le choix est simple. Il y a ceux qui ont la volonté de prendre l'Europe en otage et de dire que tous les problèmes viennent de l'Europe. Un pont s'effondre, c'est l'Europe ! La démographie galopante en Afrique, c'est l'Europe !», a-t-il affirmé tout en ajoutant : «Ceux-là oublient ce que l'Europe nous a apporté depuis 70 ans et veulent une chose : la division, le repli nationaliste, derrière chaque petite chose qui nous sépare.» Les critiques du président français s'adressent particulièrement au ministre de l'Intérieur italien Matteo Salvini et au Premier ministre hongrois Viktor Orban. Le Premier ministre hongrois et le ministre italien de l'Intérieur ont affirmé mercredi lors d'une rencontre bilatérale à Rome que le président français est à la «tête des forces politiques soutenant l'immigration en Europe». Le ministre italien a accusé aussi «la politique d'austérité européenne» d'être responsable de l'effondrement du pont de Gênes, qui a fait 43 morts le 14 août dernier. Metteo Salvani avait dénoncé aussi «des contraintes européennes qui empêchaient les autorités italiennes de dépenser de l'argent pour sécuriser les écoles et les autoroutes».