La commission administrative nationale de l'UGTT a décrété une grève générale dans les entreprises du secteur public le 24 octobre 2018. Le secrétaire général, Noureddine Taboubi, a annoncé, également, une grève générale dans la Fonction publique pour le 22 novembre 2018. «Cette décision est due à la dégradation de la situation politique et sociale, ainsi qu'à la baisse du pouvoir d'achat. Outre l'intention du gouvernement de céder certains établissements publics afin de combler les lacunes budgétaires», a-t-il dit. La centrale ouvrière maintient la pression sur le gouvernement, en situation financière délicate et voulant terminer l'année avec un déficit budgétaire inférieur à 4%. Une première après 2011. Le communiqué de la commission administrative nationale de l'UGTT a fait monter les enchères. «Nous remarquons la volonté délibérée du gouvernement de bloquer les négociations dans les entreprises du secteur public et de l'administration, ce qui constitue une atteinte au climat social, ouvert à toutes les dégradations à cause de la crise socioéconomique, notamment l'inflation déjà à deux chiffres», y est-il mentionné. La commission administrative rappelle, également, l'accord passé avec le gouvernement le 27 novembre 2017, qui stipule la régularisation de la situation des travailleurs de chantier avant le 31 mars 2018, en mettant l'accent sur le fait que ledit accord ne cesse d'être renouvelé depuis 2015. «La volonté politique existe. Mais, pareilles régularisations ont déjà coûté à l'Etat plus de 300 millions de dinars, c'est ce qui explique l'échelonnement sur des étapes», répond le ministre des Affaires sociales, Mohamed Trabelsi. Bras de fer La direction de l'UGTT ne l'entend pas de cette oreille. Le secrétaire général adjoint de l'UGTT, Sami Tahri, a dit avant-hier sur Express fm que la décision de grève générale prise par la centrale syndicale est due à «l'impasse dans le dialogue avec le gouvernement». M. Tahri a ajouté que cette grève avait deux principales revendications : l'augmentation des salaires dans le secteur de la Fonction publique et la préservation des entreprises étatiques. «L'Etat veut donner les entreprises publiques en guise de cadeau aux privés», a-t-il déclaré. Tous les indicateurs montrent que la décision de l'UGTT d'appeler à une grève générale dans le secteur public n'est pas externe à la crise socio-politique traversant la Tunisie. La centrale syndicale étant l'une des parties qui a appelé à la chute du gouvernement de Chahed, aux côtés de Nidaa Tounes. Ainsi, pour faire pression, «la centrale syndicale n'a pas cherché à trouver de compromis avec le gouvernement dans les négociations salariales du secteur public, à l'image de celui passé avec le secteur privé, qui stipule des augmentations salariales de 6,5%, en prenant en considération les cas des entreprises en difficulté», explique le journaliste et politologue Mohamed Bououd. Dans le secteur public, l'UGTT demande des augmentations supérieures à 10%. «Depuis 2011, le pouvoir d'achat des employés de l'Etat se dégrade et l'UGTT ferme les yeux, tenant en considération la situation générale du pays. Maintenant, basta !» a dit Sami Tahri, porte-parole de la centrale syndicale. «Cela traduit une volonté de bras de fer, plus qu'une recherche de compromis», selon Bououd. Il est vrai que les dates annoncées pour les grèves générales (24 octobre pour les entreprises publiques et 22 novembre pour l'administration) prouvent que la centrale syndicale a laissé un délai raisonnable pour les négociations, en montrant, toutefois, qu'elle est prête au bras de fer. Du côté du gouvernement, il y a une double contrainte. D'une part, il y a les revendications des employés et de leurs structures. De l'autre, il y a les recommandations du FMI, préconisant de bloquer les recrutements et réduire la masse salariale des employés de l'Etat qui dépasse actuellement les 14% du PIB, le plaçant dans le top 5 mondial. La situation de Chahed et son équipe est loin d'être confortable sur ce dossier.