Alors que la liste des médicaments fabriqués localement et interdits à l'importation a été rendue publique dans le Journal officiel du 14 décembre 2008, des dérogations ont été délivrées à certains opérateurs par la direction de la pharmacie au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, les autorisant à importer certains produits qui prennent une part importante du marché national. Une décision qui vient après celle du gouvernement qui a pour objectif principal la protection de la production nationale, son encouragement pour se relever de son marasme et diminuer la dépendance. Comment peut-on justifier ce genre de décisions sachant que des engagements avec des producteurs nationaux ont été signés et que des mesures ont été prises ? L'on peut trouver une explication dans l'arrêté ministériel qui prévoit « la révision et l'actualisation, en tant de besoin, de cette liste, en fonction des impératifs du marché, des capacités de production nationale et de la satisfaction des besoins nationaux en la matière », (art 2) mais les choses ne sont pas encore à ce stade. D'ailleurs, les opérateurs se plaignent de cette cacophonie qui caractérise aujourd'hui le secteur de l'industrie pharmaceutique et le marché du médicament. « Nous n'avons aucune vision de l'avenir. Rien n'est clair pour nous. Nous avons une masse de décisions courageuses et encourageantes mais sur le terrain, c'est tout autre chose. Nous sommes fin janvier, alors que des programmes pour l'importation de certains produits ne sont pas encore signés, des dérogations sont par contre délivrées. Comment allons-nous y faire face dans les mois à venir ? », nous confie un opérateur en pharmacie, qui met en garde contre un surstockage de produits chez certains producteurs. Lesquels sont dans l'obligation de répondre aux besoins du marché en réalisant un stock de trois mois. « Si des dérogations sont signées par-ci, par-là, nous allons nous retrouver avec d'énormes difficultés à écouler nos produits. Cela veut dire que des producteurs nationaux ne verront rien changer en leur situation. Avec ces décisions de deux poids deux mesures, on ne fera qu'empirer la situation davantage », signale un producteur. Par ailleurs, le ministère de la Santé a affiché une deuxième liste de médicaments interdits à l'importation. « Cette liste ne fait pas office de document officiel, mais son affichage au niveau de la direction de la pharmacie prête à confusion. Est-elle officielle ou officieuse, personne ne vous répondra. Ce qui est sûr c'est que les programmes annuels concernant ces médicaments ne sont pas signés. Cela veut dire qu'ils sont interdits à l'importation », fait-on remarquer dans le milieu pharmaceutique. En attendant la troisième liste qui est en phase d'élaboration. La question qui se pose aujourd'hui est de savoir s'il est réellement possible pour les producteurs nationaux de couvrir les besoins dans les mois à venir, sachant que des programmes d'importation de produits de première nécessité pour le traitement des maladies psychiatriques, cardiovasculaires et digestives ne sont pas encore signés. Sommes-nous prêts à vivre les ruptures connues l'année dernière sur le territoire national ? Du côté de Saidal, le problème ne se posera pas, selon son directeur général. Interrogé à propos de ces dérogations, la cellule de communication au ministère de la Santé signale que les instructions données par le ministre avant la mise en œuvre des décisions du gouvernement ont porté sur la nécessité de veiller à l'approvisionnement régulier du marché national et à la disponibilité de l'ensemble des médicaments, y compris ceux produits localement et interdits à l'importation. « Pour cela, la nouvelle réglementation a introduit l'obligation de détenir un stock de sécurité de trois mois », a-t-on ajouté. Importations : Une facture de 1,85 milliard de dollars Le Centre national de l'informatique et des statistiques des Douanes (CNIS) a souligné que la facture à l'importation de médicaments a doublé durant l'année 2008 par rapport à 2007. Les importations de médicaments ont totalisé 1,85 milliard de dollars en 2008 contre 1,44 milliard de dollars en 2007.