Des parlementaires, des élus municipaux et des personnalités françaises, de retour de Ghaza, encore sous le choc, ont décrit, à la faveur d'une conférence de presse hier au Centre d'accueil de la presse étrangère (Cape) la situation à laquelle ils ont été confrontés lors de leur visite dans ce territoire palestinien meurtri. Paris De notre bureau Ils ont dénoncé des crimes contre les civils, exigent une commission d'enquête internationale et lancent un appel pour que le gouvernement israélien soit poursuivi pour crimes de guerre. « Lorsqu'on arrive à Ghaza, ce qui saute aux yeux, c'est le faux prétexte avancé par le gouvernement israélien pour attaquer le Hamas. Il s'agit en réalité de la destruction de la bande de Ghaza et de sa population. Rien n'a été épargné », a indiqué Fernand Tuil, co-président de l'association Jumelage France Palestine (AJFP). « L'utilisation des bombes au phosphore blanc ne fait plus de doute », et Fernand Tuil joint le geste à la parole, en montrant un débris d'une de ces bombes. « Le territoire de Djabaliyé est truffé de fragments de ces bombes, comme des champignons. » « En deux heures, le ciel nous est tombé sur la tête, nous ne nous attendions pas à voir cette réalité. On s'attendait à ce qu'on avait vu à la télévision. Les récits qui nous ont été faits sont terrifiants », a affirmé Marc Everbecq, maire de Bagnolet. « Nous n'avons pas vu que des destructions en masse, nous avons vu des traces de l'acharnement contre la population civile, contre des quartiers entiers. Des témoignages accablants, nombreux, qu'il faut, bien sûr, vérifier, bien qu'ils se recoupent. C'est pourquoi nous partageons l'exigence d'une commission d'enquête internationale. Tous les responsables doivent être punis, quels qu'ils soient et à quelque niveau que ce soit », a souligné pour sa part Francis Wurtz, député européen, président du groupe de parlementaires européens GUE. Et d'ajouter que « l'impunité » dont a bénéficié Israël à ce jour « a des limites ». « C'est ce qui commence à effleurer et c'est ce vers quoi nous devons pousser. Le droit international est le même pour tous. » « Des voix disent : 'trop, c'est trop'. » « Le combat que nous menons n'est pas un combat contre le peuple israélien, mais un combat contre un gouvernement vraisemblablement responsable de crimes de guerre », a encore souligné Francis Wurtz. Et « je ne crois pas que les dirigeants actuels veulent la paix, leur objectif fondamental c'est de rendre irréversible l'impossibilité d'un Etat palestinien ». « Nous allons nous battre au Parlement européen pour une levée du blocus de Ghaza, l'ouverture des accès et l'envoi d'une force de protection des populations ainsi qu'une commission d'enquête internationale. Nous avons fait circuler au Parlement européen un appel demandant la suspension de l'Accord d'association avec Israël jusqu'à ce que ce gouvernement ou le suivant accepte de se conformer au droit international comme n'importe quel autre Etat. » Il a été rappelé que les chancelleries occidentales savaient qu'une grande offensive israélienne se préparait. « Ghaza est la région la plus dense au monde, personne ne pouvait ignorer qu'il y aurait autant de victimes », a enchaîné Mériem Derkaoui, conseillère municipale d'Aubervilliers. « Le peuple palestinien est indivisible. Si on veut qu'il y ait la paix, une paix durable, il ne faut pas oublier l'occupation de la Cisjordanie, le Mur continue, les colonies aussi, les humiliations sont quotidiennes. Que doit donner encore le peuple palestinien comme gage ? Il n'a plus rien à donner, la seule chose qui lui reste c'est sa dignité, il ne la donnera jamais », a conclu Fernand Tuil. « La justice c'est l'application de toutes les résolutions des Nations unies. Il faut que le massacre du peuple palestinien s'arrête. » Les autres membres de la délégation française conduite par Fernand Tuil, co-président de l'AJPF qui, depuis plus de vingt ans, organise des jumelages de solidarité entre les camps de réfugiés palestiniens et des villes françaises, sont Alain Blanchard, vice-président du Conseil général de l'Oise, Patrick Braouzec, député de Saint-Denis, M'hamed Henniche, secrétaire général de l'union des associations de musulmans du 93, Patrick Le Hyaric, directeur de L'Humanité, et Yazid Djebara, secrétaire général de l'AJPF. La délégation est partie le 19 janvier en Egypte, elle est entrée le 21 à Ghaza, après 24 heures d'attente. Pendant leur séjour, les personnalités françaises ont visité notamment des camps de réfugiés et des hôpitaux de Ghaza avec des membres de l'agence de l'ONU pour l'aide aux réfugiés palestiniens (Unrwa). Elles ont contribué à l'évaluation des destructions provoquées par les militaires israéliens, à leur dénonciation et au recensement des besoins de la population. Les membres de la délégation ont, par ailleurs, « apporté leur solidarité au peuple palestinien et réaffirmé les droits du peuple palestinien à vivre libre dans la justice et la paix, avec un Etat viable et souverain, avec Jérusalem-Est comme capitale et avec le retour des réfugiés selon la résolution 194 des Nations unies ».