La Chine a de nouveau exprimé sa colère, hier, après qu'un destroyer de la marine américaine a navigué non loin des îles revendiquées par Pékin en mer de Chine méridionale. Le ministère chinois de la Défense a indiqué, dans un communiqué relayé par des médias, que «le fait que les Etats-Unis aient envoyé à plusieurs reprises leurs navires sans autorisation près des îles de la mer de Chine méridionale, menace la souveraineté et la sécurité de la Chine et endommage sérieusement les liens militaires sino-américains, tout en portant gravement atteinte à la paix et à la stabilité régionales». Le ministère chinois de la Défense évoque des «provocations» et invite la «partie américaine à corriger ses erreurs». Lundi, un responsable de l'US Navy a indiqué qu'un navire de guerre chinois s'est approché «dangereusement» d'un destroyer américain dans les eaux disputées de la mer de Chine méridionale, contraignant ce dernier à modifier sa trajectoire. Le destroyer lance-missiles USS Decatur effectuait dimanche ce que l'armée américaine qualifie «d'opération pour la liberté de navigation», quand il est passé à moins de 12 milles marins des récifs Gaven et Johnson, dans l'archipel des Spratleys – distance généralement admise comme constitutive de la limite des eaux territoriales d'une masse terrestre. Les îles Spratleys sont revendiquées par Pékin (qui y a construit des infrastructures militaires), les Philippines et le Vietnam. Le secrétaire américain à la Défense, Jim Mattis, a annulé, lundi, une visite prévue en Chine courant octobre pour discuter de sécurité avec son homologue, Wei Fenghe. L'incident intervient alors que les relations sino-américaines sont sous tension suite à la décision du président américain, Donald Trump, de revoir à la hausse les droits de douane sur certains produits chinois. Décision qui a lancé la guerre économique entre les deux pays. Pékin, conformément au principe de droit de réciprocité, compte imposer des taxes supplémentaires sur des produits américains. Antécédents Zone de conflits entre Pékin et ses voisins, la mer de Chine méridionale vit au rythme des tensions. Entre-temps, les Etats-Unis surveillent de près la situation dans ces territoires maritimes. La Chine fonde sa légitimité sur ces territoires sur des cartes remontant aux années 1940. Washington prône un règlement multilatéral et pacifique de ces conflits. La vision de Pékin est plutôt favorable à des négociations bilatérales. Les pays concernés par ces conflits sont, outre la Chine, le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et le sultanat de Brunei, qui désignent ces zones disputées selon leur vision de la région : Pékin les appelle mer de Chine ; Hanoï mer de l'Est ; mer des Philippines occidentales pour Manille. En 1977, les Philippins ont tenté d'occuper l'île d'Utu Aba. L'épreuve a échoué face aux forces taïwanaises. Taipei se sent impliqué dans le conflit, même s'il n'est pas reconnu par la Chine, mais constitue, comme Manille, un des alliés des Etats-Unis dans la région. En 1983, c'est au tour de la Malaisie de soulever la question de sa souveraineté sur trois îles des Spartleys, puis récidive en 1986 pour prendre d'autres îles. Le Vietnam proteste. En 1984, Brunei établit une zone exclusive de pêche sans pour autant la revendiquer. En avril 2001, un avion de reconnaissance de la marine américaine entre en collision avec un chasseur de la marine chinoise près de l'île de Hainan, une province de la Chine. D'où un grave incident diplomatique entre Washington et Pékin. En mars 2009, le Pentagone accuse la Chine d'avoir harcelé l'Impeccable, un bâtiment scientifique non armé, opérant à environ 120 km au sud de l'île de Hainan alors qu'il menait une opération de «routine». Pour Pékin, l'Impeccable a violé le droit chinois et la Convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, ratifiée par la Chine mais pas par les Etats-Unis. En avril 2012, des garde-côtes philippins appréhendent huit bateaux de pêche chinois près du récif Scarborough. Pékin y déploie alors une partie de sa flotte et réaffirme sa souveraineté sur le récif. A l'occasion de sa visite à Manille, en novembre 2011, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait rappelé le traité de défense mutuelle de 1951 liant les deux pays.