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Energies renouvelables : Un statu quo non tenable
Publié dans El Watan le 03 - 10 - 2018


Les limites de l'énergie fossile
Nous avons dans nos précédentes contributions sur El Watan, alerté, au même titre que nombre d'experts et autres observateurs, sur la situation critique du secteur des hydrocarbures et son impact sur les équilibres fondamentaux du pays, tributaires des seules ressources tirées de la vente de gaz et de pétrole.
Au-delà, cette situation pose par ailleurs le problème de la place de l'Algérie dans le marché mondial du gaz, notamment auprès de celui qui est communément considéré comme son marché naturel : l'Europe, qui est convoité, outre par la Russie, qui couvre 35% des besoins et bientôt plus, avec la mise en œuvre en cours du North Stream II, par le Qatar et les USA, ces derniers menant une offensive sans précédent pour fournir du GNL à l'Europe.
En effet, il faut comprendre que nous sommes aujourd'hui intégrés de facto à un marché mondialisé au sein duquel la politique des principaux acteurs est davantage fondée sur des préoccupations de parts de marché, plutôt que par des considérations de prix.
Ceci traduit dans les faits la généralisation de nouvelles conditions commerciales pour le gaz, favorisant l'application de prix «spot», leur déconnexion par rapport au prix du brut, et l'imposition de contrats courts, tout cela en défaveur de pays comme l'Algérie, dont les contrats sont en cours de renouvellement (Espagne, Italie).
Du fait de ce constat, nous avons suggéré quelques pistes de réflexion pour permettre :
– d'optimiser l'exploration et l'exploitation de gaz conventionnel, à travers la révision du dispositif contractuel, la modulation des droits, ainsi que l'ouverture franche du secteur en amont au privé en association avec des compagnies étrangères spécialisées, pour les petits prospects non économiquement rentables pour Sonatrach ;
– le recours au gaz de schiste dans le cadre de partenariats avec les entreprises maîtrisant les techniques d'exploration et d'exploitation les plus modernes (insuffisant à moyen terme).
Aujourd'hui, nous constatons que les exportations de gaz ont diminué en 2017, ce qui n'est pas de bon augure, surtout que les efforts d'investissements annoncés et destinés à booster les gisements de Hassi R'mel et Hassi Messaoud et permettre quelque peu de tenir les engagements pris à l'international vont inévitablement aggraver les coûts de production déjà élevés et accentuer les problèmes de compétitivité vis-à-vis de la Russie qui affiche des prix de revient très bas, mais aussi du Qatar et des USA.
Les investissements annoncés dans les méthaniers pour livrer l'Asie permettront certes de réorienter la commercialisation vers ces marchés, mais cela laisse sans réponse la question de la sous-utilisation des pipes desservant l'Europe (utilisés à moins de 50% de leurs capacités).
Sachant que :
– 98% de la consommation électrique du pays provient du gaz ;
– 2 raffineries vont incessamment rentrer en production (Hassi Messaoud, Tiaret) en plus du revamping de celle de Sidi Rezine ;
– Les engagements pris par Sonatrach dans le cadre de ses investissements à l'étranger (raffinerie Augusta Italie et projet en partenariat en Turquie avec les groupes Ronesans et Bayegan) ;
– Les orientations des pouvoirs publics pour relancer l'économie, et notamment la pétrochimie, et la production industrielle, grosses consommatrices d'énergie (gaz, pétrole) ; L'augmentation annuelle de la population (près de 1 million d'habitants), synonyme d'augmentation de la consommation interne (7 à 8% par an pour 40 milliards de mètres cubes consommés actuellement avec le risque de doublement en 2030).
De fait, l'on se demande raisonnablement comment les autorités en charge du secteur vont faire pour concilier les engagements commerciaux d'exportation, alimenter le tissu industriel en énergie, fournir de l'énergie électrique à la population, poursuivre l'effort d'électrification et de distribution du gaz à travers le pays, et dans le même temps rentabiliser les méthaniers acquis ou en cours d'acquisition ?
Nous pensons qu'en parallèle et avant même d'envisager l'exploitation du gaz de schiste, il devient urgent de prendre à bras-le-corps d'autres pistes comme les énergies renouvelables et le solaire photovoltaïque en particulier, pour lesquelles les autorités ont certes marqué de l'intérêt et pour preuve les nombreuses initiatives de ces dernières années, mais qui, dans le même temps, semblent timides sur le plan opérationnel.
Pour un bouquet énergétique durable
L'Algérie ne peut à l'évidence se contenter du statu quo actuel, elle doit impérativement définir un bouquet énergétique durable à l'horizon 2030, date qui correspond à la durée de vie de ses réserves gaz/pétrole, si on prend en considération les données actuelles qui traduisent par ailleurs sa double contrainte : valoriser les énergies renouvelables et accompagner la croissance continue de la consommation d'électricité par les ménages, les agriculteurs et les industriels, et ainsi économiser le gaz et le réserver à l'export pour tenir ses engagements contractuels et financer le développement via un panier de devises solides.
Si nous dressons un rapide panorama des solutions technologiquement viables et usitées à ce jour, ne demeurent finalement que peu d'options pérennes :
– L'énergie hydroélectrique a été durablement écartée en Algérie, alors qu'elle dispose aujourd'hui d'un certain nombre de barrages qui pourraient constituer une source d'énergie d'appoint renouvelable et permanente dans le temps. Rappelons qu'en France, l'énergie hydroélectrique représente près de 11% de la production totale d'électricité. Cette part est beaucoup plus importante dans des pays aussi divers que l'Albanie, le Brésil, la Norvège, la Nouvelle-Zélande ou encore la Suisse.
Il serait par ailleurs tout à fait envisageable de construire des centrales solaires flottantes, au sein des 80 barrages que compte l'Algérie ;
– Le solaire thermique à concentration (CSP) est une option complexe techniquement, gourmande en eau (alors que la région d'Afrique du Nord est considérée comme étant déjà proche du «stress hydrique») et nécessitant pour atteindre une rentabilité correcte, de lourdes et coûteuses installations. L'exemple de Hassi R'mel, projet SPP1, en opération depuis 2011, développé par l'espagnol Abengoa, est d'ailleurs symbolique de la complexité de tels projets. C'est certainement pour ces mêmes raisons que le gouvernement algérien a choisi de modifier son Plan national des énergies renouvelables, en 2014, en remplaçant le solaire thermique par le solaire photovoltaïque à hauteur de 60% du bouquet total des énergies renouvelables à l'horizon 2030.
– L'énergie éolienne ne sera toujours qu'une force d'appoint en Algérie, car les plus grands foyers de l'Atlas des Vents se situent en off-shore méditerranéen ou sur quelques sites près d'Adrar, dans des lieux où il sera difficile de desservir le plus grand nombre ;
– La biomasse est une source connue, mais elle mériterait que l'on s'y intéresse d'un peu plus près.
Figurant dans le modèle théorique de diversification du bouquet énergétique algérien, il n'existe pas encore de modèle pilote à ce jour. Des deux méthodes existantes à ce jour (par combustion et par méthanisation), la biomasse par méthanisation se rapprocherait le plus du gaz déjà injecté et donc permettrait de mettre à profit les installations déjà existantes.
– La géothermie peut représenter une source d'énergie résidentielle potentielle, en certains endroits, mais sans pouvoir alimenter durablement une ville.
– Le solaire photovoltaïque est enfin la solution la plus logique, la plus simple à installer et à exploiter et celle dont les coûts ont le plus chuté durant les cinq dernières années (et cela continuera à moindre échelle). Pour autant, le solaire photovoltaïque n'est pas la panacée unique à chaque bouquet énergétique et les récents déboires de pays comme l'Inde ou de régions comme l'Australie du Sud nous rappellent que l'énergie solaire photovoltaïque (hors stockage de l'énergie) ne peut raisonnablement représenter plus de 40% d'un bouquet énergétique national. Au-delà, les gestionnaires de réseaux peuvent difficilement garantir leur stabilité (risque de black-out général consécutif à la surcharge du réseau) et doivent surtout investir massivement dans la mise à niveau des réseaux de transport et de distribution.
Dès lors, un bouquet énergétique diversifié et le plus éclaté possible sur le territoire algérien permettrait certainement de répondre aux défis de la croissance de la consommation et du développement de l'économie algérienne. A noter que dans ce cadre, le développement localisé de centrales solaires photovoltaïques de moyenne puissance (5 à 20 MW par unité) représenterait le moyen idoine de répartir la production d'énergies renouvelables au plus près des foyers de consommation, de soulager le réseau en plusieurs endroits et aussi de renforcer les capacités de production en «bouts de ligne».
Ces quelques questionnements qui touchent à la sécurité énergétique, à un moment où il y a un resserrement drastique des ressources financières, nous conduisent à ébaucher ces quelques éléments de réflexion qui vont, pour certains, au-delà des poncifs rapportés.
Contraintes financières
Tout d'abord, quelles que soient les énergies renouvelables considérées, il y a une thématique liée au financement qui s'impose naturellement : comment financer une ou plusieurs centrales solaires sur la durée, à savoir 20 ou 25 années ?
Rappelons ici un élément fondamental : la puissante émergence de l'énergie photovoltaïque dans le monde résulte d'une alliance rationnelle entre la technologie et la finance, entre la recherche appliquée sur les différentes technologies de panneaux photovoltaïques et l'ingénierie financière de longue durée. Les deux sont consubstantiels.
Considérer le développement du solaire photovoltaïque sous le seul angle industriel mène inéluctablement à une impasse. Pour exemple, les récents records de prix annoncés en Egypte pour une centrale solaire photovoltaïque au sol de 200 MW sont dus en partie au fait que la durée des PPA a été étendue durant les négociations de 25 à 35 ans. Derrière ce détail qui n'en est pas un, c'est un ensemble complexe mêlant ingénierie financière, risque pays et engagement politique qui est en jeu.
Le développement de centrales de moyenne puissance (5 à 20 MW par unité), financées au départ par un recours aux ressources classiques (crédits bancaires et apports investisseurs) pourrait dans une seconde étape trouver un relais financier total ou partiel dans la Bourse d'Alger, via un processus de syndication.
Pour cela, ce type de projet devrait bénéficier de conditions claires et lisibles du point de vue fiscal, réglementaire et tarifaire, permettant de générer des niveaux de rentabilité récurrents et attractifs à même de favoriser leur placement massif en Bourse. S'il est véritablement pris en main, à travers un travail de promotion et de communication mettant en avant les aspects de sécurité de placement, de rentabilité, de développement local et d'éthique, ce mécanisme est de nature à constituer un levier supplémentaire pour financer tout un programme de centrales.
Par ailleurs, cette thématique financière ouvre la porte à des innovations frugales, à faible coût, mais néanmoins à grande portée. Outre la dialectique hautement politique du financement non conventionnel/endettement extérieur, il existe des solutions alternatives qui mériteraient d'être testées. Le financement participatif est, par exemple, une option. Au lieu de toujours se reposer intégralement sur les subventions publiques, un projet de centrale solaire de petite puissance (1 à 5 MW) pourrait aisément s'appuyer sur un financement issu de la population. Outre qu'il aurait l'avantage d'intéresser la population quant à son quartier, son village, sa daïra ou sa wilaya concernant la durabilité de son électricité, il permettrait d'intégrer à l'économie formelle certains fonds aujourd'hui non bancarisés (dont les montants cumulés sont estimés par certaines sources à près de 40% du PIB ).
A ce jour, de nombreux projets en Europe sont partiellement financés via un financement participatif ou crowdfunding. Ils représentent en effet un placement rentable, territorialisé, proche de chez soi, palpable, citoyen et éthique.
Cette piste, qui implique une décentralisation territoriale de l'investissement au plus près des citoyens et donc permettant plus de transparence et de contrôle, peut intéresser les détenteurs de capitaux locaux, y compris la diaspora qui y verrait outre une source de rentabilité des avoirs, une autre façon d'être utile, un genre de contribution citoyenne et d'engagement pour sa région natale ou d'adoption. Les crédits carbone et le recours aux fonds multilatéraux spécifiquement dédiés aux énergies renouvelables (tels ceux de l'Alliance solaire internationale domiciliée en Inde) pourraient utilement aider à boucler un ou des tours de table financiers afin de lancer à peu de frais pour le contribuable algérien, de substantielles capacités de production d'électricité d'origine renouvelable.
L'intégration locale
En second lieu, la thématique du taux d'intégration locale est essentielle : nous pouvons lire suivant les articles de presse publiés et les «experts» questionnés, que le taux d'intégration locale d'une centrale solaire serait aujourd'hui compris entre 2 et 30%. Cette forte variation s'explique uniquement par les critères retenus dans le calcul : en effet, un panneau photovoltaïque dont tous les éléments et autres pièces sont importés mais qui est assemblé en Algérie est-il un produit pouvant être considéré comme algérien ? De même, un câble solaire fabriqué en Algérie mais dont toutes les matières premières proviennent de l'étranger est-il un produit algérien ? S'ensuit l'autre élément comparatif lié aux coûts des produits assemblés localement versus ceux importés.
Aujourd'hui, la comparaison est largement en défaveur du produit dit «algérien», qui ne pourra être viable que grâce à de massives barrières tarifaires. Au demeurant, cette approche est valable pour les autres investissements des secteurs dits «industriels», mais dont le taux d'intégration est en général situé entre 5 et 15%, voire beaucoup moins (CKD, SKD dans les domaines de l'automobile, de l'électronique, l'électroménager, la téléphonie), mais aussi d'autres filières tributaires de l'importation (matières premières, intrants, services, pièces de rechanges).
Il nous semble que l'approche ne doit pas résider seulement dans le taux d'intégration, mais plutôt dans la courbe d'apprentissage, de maîtrise des métiers, ou de l'ingénierie inversée qui pourrait être mise en place. Les exemples de l'Arabie Saoudite ou de l'Afrique du Sud en solaire photovoltaïque nous montrent que les taux d'intégration locaux ont évolué au fil du temps, de 0% pour les premières installations jusqu'à 50 à 60% d'intégration locale au fil du temps.
C'est cette courbe d'apprentissage ou d'expérience qui est essentielle et qui montre la capacité d'appropriation d'une industrie locale par rapport à une innovation exogène qui s'impose. Par ailleurs, comme on le voit, la technologie liée à l'énergie solaire évolue tellement vite qu'un investissement de fond peut s'avérer risqué, compte tenu de la rapidité des innovations en la matière et des incertitudes légitimes quant à l'instabilité des dispositifs législatifs (systèmes de taxation, prix), autant de critères décisifs en matière d'investissement.
Plus avant, rappelons qu'une centrale solaire possède une durée de vie de 25 à 30 ans : calculons le taux d'intégration locale de cette centrale solaire sur toute sa durée de vie, plutôt qu'un taux d'intégration a priori et centré sur sa période initiale de construction. Ce taux serait ainsi plus juste et permettrait d'intégrer des réalités d'exploitation et de maintenance d'une centrale solaire qui, elles, peuvent être locales ab initio. Posons la question : existe-t-il aujourd'hui une ou plusieurs entreprises algériennes dédiées à la maintenance des installations solaires déjà existantes ? Pas à notre connaissance.
Pourtant, des milliers de panneaux ont déjà été installés en Algérie, panneaux qui devraient être régulièrement nettoyés et entretenus. Là réside un des enjeux de souveraineté et de durabilité du bouquet énergétique. Par ailleurs, rappelons que la connaissance dans le domaine du panneau photovoltaïque, par exemple, a été tout d'abord une réalité en Europe et au Japon, pays précurseurs, avant d'être quasi totalement absorbée par la Chine.
Cette réalité nous rappelle que l'Algérie aurait pu depuis plusieurs années faire sienne une ou plusieurs techniques d'ingénierie inversée, à savoir démonter, copier, reproduire, comprendre monter en gamme puis s'émanciper, fabriquer son propre verre pour panneaux, ses propres waffers, ses propres lingots, là où réside la valeur ajoutée d'un panneau photovoltaïque.
Elle aurait également pu racheter des entreprises européennes en liquidation judiciaire dans les dernières années (Photowatt, Sillia, Solar World), afin d'acquérir indirectement savoir-faire et brevets industriels qui sont le cœur de toute véritable industrie.
Au demeurant,ce qui est valable pour le photovoltaïque l'est aussi pour le reste des activités industrielles, l'Algérie n'a pas su tirer profit des effets de la crise en Europe pour faire l'acquisition de la technologie, ce qui aurait pu servir de base à toute politique de développement industriel.
Le photovoltaïque : Vecteur de Développement Régional
D'un point de vue plus géostratégique, le Sud algérien représente un réservoir de possibles équilibres énergétiques pour la région du Sahel, qui est unique en son genre. Ainsi, il nous semble que des initiatives européennes Nord-Sud de type Desertec, qui ont tant occupé le devant de la scène médiatique pendant plusieurs années, sont coûteuses, lestées par toute une série de préalables techniques, politiques, financiers et en-deçà des nécessités stratégiques régionales. En comparaison des projets dits «Sud-Sud» d'intégration et d'interconnexions électriques entre plusieurs pays de la région sont porteurs de sens.
Pourquoi le Grand Sud algérien ne produirait-il pas de l'électricité pour ses besoins et pour ceux de la sous-région? Pour Tamanrasset (dont la population est passée de 100 personnes en 1914 à plus de 200 000 aujourd'hui et qui représente désormais un véritable carrefour régional), entre In Guezzam (Algérie) et Assamakka (Niger), entre Timiaouine (Algérie) et Tessalit (Mali) ou Boughessa (Mali), avec Arlit, Agadez, Kidal, Gao et des villes de moindre ampleur ? Pourquoi ne développe-t-on pas les interconnexions électriques avec le Mali, le Niger, la Libye, comme cela se fait actuellement dans les régions de l'Afrique de l'Est ou de l'Ouest (dans le cadre des Power Pools , chapeautés par l'Union africaine, dont l'Algérie est l'un des principaux contributeurs ?).
Ce serait un basculement complet du logiciel intellectuel et une réponse parmi d'autres à l'instabilité chronique et au sous-développement dont souffre cette sous-région. Nous nous étonnons ainsi que l'Algérie soit le grand absent du programme «Desert To Power» initié par la Banque africaine de développement.
Au demeurant, ce type de projet, outre qu'il pourrait constituer un véritable cordon ombilical entre l'Algérie et les pays voisins, viendrait en appoint à d'autres investissements et infrastructures, tel le projet de liaison par pipe Algérie-Nigeria, la route transsaharienne, des zones franches autour des carrefours économiques frontaliers (ex. Tamanrasset), le port centre de Cherchell. Ce type de symbole donnerait tout son sens aux velléités d'échanges et d'intégration au marché africain auxquelles appellent les institutions et les opérateurs, en quête de débouchés pour les productions locales.
Au-delà des engagements internationaux (COP21 notamment), des contingences politiques et économiques, de l'état de ses réserves en pétrole et gaz et de l'accroissement continuel des besoins internes, l'Algérie ne doit pas se satisfaire du report continuel de son engagement franc dans les énergies renouvelables, au risque d'impacter sérieusement sa sécurité énergétique et partant, son avenir.
Alger, le 29 août 2018

Abdenour Kashi, expert
en intelligence économique
(3e cycle EGE- Paris)


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