Entre les ambitions du ministère de l'Agriculture et la réalité du terrain, il y a un grand fossé. L'exemple des jeunes agriculteurs du sud du pays illustre on ne peut plus clairement ce décalage. En effet, 1249 exploitants de périmètres de mise en valeur agricole par la concession du programme Sud se plaignent du blocage de leurs projets pour « des raisons inexpliquées ». « Après avoir été choisis comme bénéficiaires dans le cadre du programme spécial de mise en valeur des terres par la concession et après avoir attendu plus de deux années, nous venons d'apprendre que les fonds du programme spécial Grand Sud viennent d'être mystérieusement retirés par l'Etat. Ce qui remet en cause ces périmètres », lancent ces jeunes exploitants représentant trois wilayas (El Oued, Ghardaïa et Ouargla). Dans une lettre adressée au président Bouteflika, ces derniers précisent que « leurs projets risquent d'être compromis définitivement et l'argent investi sera perdu ». « Nous devrons exploiter près de 5000 ha (dont 3000 ha uniquement dans la wilaya d'El Oued). Ces projets devront permettre la production, notamment, de plus de 500 000 q de pommes de terre », affirme Yacine Dardouri, porte-parole de ces jeunes concessionnaires qui ne comprennent pas les tenants et les aboutissants de ce blocage. Un blocage qui dure, selon notre interlocuteur, depuis 2006. « Nous sommes en majorité des jeunes universitaires. Avec ce blocage, nous sommes entre le marteau et l'enclume : on ne sait pas si on va reprendre nos projets ou si on doit chercher du boulot ailleurs », ajoute-t-il. Pour tenter de résoudre leur problème, ces jeunes ont frappé à toutes les portes. Ils ont sollicité les autorités locales et même le ministère de l'Agriculture, en vain. « Il y a deux ans déjà, les responsables régionaux du secteur de l'agriculture soutenaient que l'arrêt des travaux de mise en valeur était dû au fait que ces périmètres étaient sous enquête judiciaire. Ce qui se révéla plus tard une affabulation dont les desseins sont inconnus, car cet argument a été démenti par la justice elle-même », précisent les concessionnaires dans la lettre qu'ils ont adressée au chef de l'Etat. Au ministère de l'Agriculture, on ne donne aucune réponse. Pourtant, les projets sont vitaux et les sommes dépensées très importantes. « Ces projets totalisent une valeur de 5 milliards de dinars. Trois milliards de dinars ont été dépensés. Aujourd'hui, tout le travail fait risque d'être réduit à néant », expliquent encore ces jeunes.