Le forcing opéré par les groupes parlementaires du FLN et du RND n'ont finalement pas eu raison du président de l'APN. Au moment où des informations relayées par des sites électroniques annonçaient sa démission, Bouhadja a laissé durer le suspense jusqu'en fin de journée d'hier, avant de lancer l'inattendu démenti : «Je suis toujours là, je ne démissionne pas.» Ainsi, il fait fi des menaces de Djamel Ould Abbès, secrétaire général du FLN, et des invitations à la démission d'Ahmed Ouyahia, patron du RND. Situé au 5e étage du palais Zighout Youcef, à Alger, le bureau du président de l'Assemblée nationale n'a pas désempli durant une grande partie de la journée d'hier. Les va-et-vient des députés de nombreuses formations, y compris ceux de l'alliance, ne se sont pas arrêtés, nous dit-on. Il faut dire que cette journée a été particulière. De nombreuses informations relayées par les sites électroniques et les réseaux sociaux ont fait état d'abord du limogeage du chef de cabinet, puis carrément de la démission de Saïd Bouhadja, exigée depuis plus d'une dizaine de jours par les groupes parlementaires des partis de l'alliance présidentielle — FLN-RND-Taj-MPA et des indépendants. Mais ce n'étaient que des rumeurs. Vers 17h, le président de l'Assemblée nous confirme qu'il est toujours à son poste : «Je suis toujours là, je ne démissionne pas.» La «sérénité» et l'«assurance» dont il faisait preuve dès le premier jour de la crise n'ont pas été touchées d'un iota. Sa réponse s'adresse d'abord au secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, dont les déclarations lors de sa conférence de presse, animée vendredi dernier, en a surpris plus d'un. S'adressant au troisième personnage de l'Etat, qui incarne théoriquement le pouvoir législatif, Ouyahia lui conseille tout simplement de démissionner, en reconnaissant toutefois que ni le retrait de confiance ni le gel des activités parlementaires ne sont prévus par la loi qui, elle, faut-il le préciser, donne toutes les prérogatives à Saïd Bouhadja, en tant que président, de mettre fin aux fonctions du secrétaire général de l'Assemblée (mesure qui a provoqué la crise), de contourner la paralysie de la deuxième Chambre, mais aussi de procéder à des retraits sur salaire des députés qui boycottent les activités parlementaires. La réaction de Saïd Bouhadja est aussi une réponse à Djamel Ould Abbès, secrétaire général du FLN. Sans mettre de gants, ce dernier et à partir de Béchar a exigé la démission du président de l'Assemblée dans un délai de 48 heures, sous peine de lui retirer la couverture politique. Comment Ould Abbès compte-t-il retirer à Saïd Bouhadja sa carte de militant du FLN ? La question reste posée. Artisan de cette crise au sein du Parlement, Djamel Ould Abbès a mis tout son poids pour pousser les députés de l'alliance à collecter les signatures d'une pétition pour retirer la confiance à Bouhadja, et dont le nombre reste vraiment énigmatique. Pour Bouhadja, cette liste ne comporte que 64 signatures, pour Ould Abbès elle en compte 364 et pour Ahmed Ouyahia, 361. Il est clair que le limogeage du secrétaire général de l'Assemblée ne peut être la seule et unique raison de cette crise. Qui a intérêt à ce que l'Assemblée nationale soit l'otage de manœuvres politiciennes, aux visées politiques, comme l'a si bien déclaré Saïd Bouhadja dans un entretien à El Watan, paru jeudi dernier ? Nous n'en savons rien. Ce qui est certain par contre, c'est que cela intervient dans une conjoncture particulière marquée par des luttes au sommet de l'Etat à la veille du rendez-vous présidentiel. Saïd Bouhadja ne veut pas faire le lien et préfère évoquer «une alliance» (FLN-RND) «d'intérêt aux visées politiques» dont il dit ignorer les contours. Il est certain que ce vieux routier du FLN ne prend pas la décision de faire face à «toutes les pressions et l'action psychologique» du FLN et du RND, en refusant de démissionner s'il n'était pas appuyé. De même que l'Onm (Organisation nationale des moudjahidine) n'aurait jamais initié une pétition et une motion de soutien en sa faveur, si, quelque part, un feu vert ne lui avait pas été donné. Toutes ces indications augurent de changements auxquels personne ne s'attend.