Les inégalités sociales, l'injustice et la corruption au Maroc sont continuellement dénoncées à travers les réseaux sociaux, notamment par des dizaines de pages Facebook, dont le contenu exprime l'insatisfaction des populations, leurs besoins et leurs droits, a écrit le site d'information La Libre Afrique. Des dizaines de pages sur les réseaux sociaux ont dénoncé «corruption», «inégalités» et «injustice», qui sont apparues ces derniers mois au Maroc, a indiqué récemment le site d'information, repoussant au – grand malheur du gouvernement – des lignes rouges à la faveur de ces canaux d'expression. Selon un récent rapport officiel, cité par la même source, «l'intolérance par rapport aux inégalités devient de plus en plus élevée», les Marocains sont «plus conscients de leurs droits et expriment davantage leur insatisfaction, leurs besoins et leurs attentes», en liant ce «changement majeur» à l'essor du digital et de son «espace libre d'expression et de débat». Soulignant que «la confiance dans les institutions d'encadrement et d'intermédiation s'est affaiblie», La Libre Afrique, s'appuyant sur un rapport du Conseil économique et social marocain (CESE), souligne que «l'ouverture accrue sur internet, les réseaux sociaux, la presse électronique (…) a énormément facilité (…) la mobilisation de l'opinion publique». Avec son poing levé en guise de logo, la page Facebook Kifaah (lutte) se veut le porte-voix des laissés-pour-compte, avec ses témoignages de familles marocaines délogées de leur bidonville à Casablanca (ouest), ou ses images de jeunes Marocains décidés à quitter leur pays dans des embarcations de fortune, lit-on également. «Les publications de cette page qui totalise un demi-million d'abonnés suscitent des flots de commentaires, souvent indignés, parfois injurieux», regrette l'auteur de l'article. En écho aux statistiques officielles sur le creusement des inégalités sociales, la page Achaab Yourid (Le peuple veut – 1,2 million d'abonnés) fustige aussi la classe politique et parle de la «misère» d'une partie de la population. Sur YouTube, nombreux sont ceux qui publient des vidéos pour commenter l'actualité. Certains critiquent le roi Mohammed VI, en dénonçant ses «choix politiques», mais aussi son «train de vie» ou ses «longs séjours» à l'étranger. Pour le politologue Aziz Chahir et le chercheur Abdelwahab Errami, spécialiste des médias, ces «protestations 2.0» sont des «expressions légitimes de certains (…) marginalisés, des minorités actives qui n'arrivent pas à s'exprimer sur la place publique». «Le propre des réseaux sociaux, c'est de permettre à chacun d'être membre à part entière dans la société virtuelle, à défaut de l'être dans la société concrète.» Ces pages, a expliqué La Libre Afrique, ont vu le jour – ou gagné en notoriété – dans le sillage d'une vaste opération de boycott lancée en avril contre la «Cherté de la vie», campagne virtuelle qui, selon une récente étude publiée par IDS Partners, une agence parisienne spécialiste de l'analyse des réseaux d'influence, a marqué «un tournant dans l'activisme digital au Maroc». Ce boycott faisait lui-même suite à plusieurs mouvements de protestation sociale dans des régions marocaines déshéritées, comme celui du Hirak (Mouvance) dans le Nord.