La CIA a encore une fois prouvé qu'elle pouvait être son propre pire ennemi. » La première phrase de l'article du New Yorker résume bien l'état d'esprit provoqué par le scandale du chef de l'antenne de l'Agence à Alger. L'article va même très loin en s'intitulant « Le prochain Abou Ghraïb », en référence à cette prison irakienne où des GI's ont fait subir – en les filmant –- les pires humiliations notamment à caractère sexuel à des prisonniers irakiens. Selon l'hebdomadaire de référence newyorkais, la similitude y est : « American power, the Arab world, sexual violence, and digital photography. » « Il semblerait, selon le rapport des enquêteurs, que plusieurs éléments restent encore à dévoiler dans cette affaire et aucun de ses éléments n'est susceptible d'aider le président Obama dans sa campagne de rapprochement du monde musulman », écrit The New Yorker. Sur le plan des procédures, le même hebdomadaire s'étonne que la CIA, « qui devait avoir connaissance de l'enquête menée depuis au moins octobre 2008 », ait décidé de cacher l'information à la commission du Sénat américain chargée du renseignement. D'ailleurs, les deux responsables de cette commission, les sénateurs Dianne Feinstein et Kit Bond, n'ont été tenus au courant par l'Agence que lorsqu'il devint évident que la chaîne de télévision ABC News allait rendre publique l'affaire. Mercredi, lorsque ABC News a révélé l'affaire, des officiels à Washington ont refusé de mentionner l'identité de l'agent incriminé quelques heures avant la diffusion du rapport d'enquête par la chaîne sur son site internet, un document qui cite l'ancien chef de la CIA à Alger par le nom et le prénom et même sa date d'entrée en service en Algérie en septembre 2007. « Ce n'est pas le genre d'incident à dissimuler facilement sous le tapis », commentait aux télévisions Isabel Coleman, une des spécialistes du Moyen-Orient au Conseil américain des affaires étrangères. Cette affaire, à ses yeux, « a le potentiel d'être très explosif s'il n'est pas assez bien traité par le gouvernement des Etats-Unis ». L'ancien agent de la CIA, le très médiatique Bob Baer, a souhaité que cette affaire aboutisse à une inculpation. Andrew Warren « ne fait que discréditer les Américains, considérés comme de vulgaires goujats ». Baer, ancien opérationnel de l'Agence au Moyen-Orient, n'a pas manqué aussi de s'attaquer à son ancien employeur : il accuse la CIA de ne pas réellement faire attention lors de ses recrutements et de laisser un champ très libre aux agents éparpillés de par le monde.