Le renoncement de certaines candidatures du camp démocratique et de la mouvance islamique, présentées comme potentielles, est en partie le résultat du défaut de transparence dans toutes les étapes de l'organisation du prochain scrutin. L'opacité a toujours été une spécialité du système politique algérien. La tenue de la prochaine élection présidentielle n'échappe pas à cette règle. L'usage du conditionnel a accompagné toutes les étapes de la préparation et de l'organisation de ce scrutin. Le secret sera jalousement gardé jusqu'à la dernière minute sur tout. Sur la perspective de réviser ou non la Constitution. Sur la nature des amendements constitutionnels. Sur le mode d'adoption du projet de révision constitutionnelle par voie référendaire ou par ordonnance. Tout comme l'on ignore également toujours la date de la tenue de l'élection présidentielle, alors que nous amorçons la dernière ligne droite avant la convocation du corps électoral dans quelques jours seulement. Et pour clore le dispositif et ne pas faillir à ce qui apparaît comme une stratégie électorale bien réfléchie qui doit répondre à des objectifs précis, même la candidature du président Bouteflika est frappée du sceau du secret et de la confidentialité. L'opinion ne sait pas encore – théoriquement – s'il est candidat ou non tant que le principal concerné ne s'est pas encore officiellement prononcé sur la question. Quoique, au plan pratique, quand on observe la fébrilité qui s'empare des relais de Bouteflika qui ont déjà investi le terrain électoral depuis plusieurs mois avec l'installation des comités de soutien à sa candidature, en Algérie et à l'étranger, la candidature de Bouteflika ne fait plus l'ombre d'un doute. Il est vrai qu'au plan légal, il n'y a pas d'entorse à la loi liée à cette annonce tardive de la candidature de Bouteflika dans la mesure où il reste encore quelques jours devant le chef de l'Etat pour franchir le pas. COQUETTERIE POLITIQUE Le problème réside dans le message sous-jacent que véhicule le peu d'empressement mis par Bouteflika pour annoncer sa candidature. Cette manière de faire tranche avec les usages établis et compromet le libre jeu électoral qui se trouve ainsi plombé déjà dans la course à la candidature. Le renoncement de certaines candidatures du camp démocratique et de la mouvance islamique, présentées comme potentielles – le dernier à capituler étant Djaballah du parti En Nahda – , est en partie le résultat du défaut de transparence dans toutes les étapes de l'organisation du prochain scrutin qui laisse la classe politique sceptique quant à la régularité du scrutin. Il n'y a que dans les régimes autocratiques où les présidents sortants, candidats à leur propre succession, se permettent le luxe d'attendre l'ultime instant pour abattre leurs cartes, car assurés à l'avance de leur bonne étoile. Bouteflika et ses conseillers ont certainement leur raison pour agir ainsi. Ils ne l'ont sûrement pas fait par simple coquetterie politique. Juste pour l'effet théâtral. En laissant le privilège de l'entrée sur la scène électorale de l'artiste-vedette à la fin du spectacle de l'opération de dépôt de candidature, on cherche manifestement à faire de l'annonce de la candidature de Bouteflika un moment solennel, à boucler l'opération de dépôt de candidature en apothéose dans le plus pur style des grandes cérémonies qui flattent l'ego et agissent sur l'électorat non avisé et clientéliste comme un puissant énergisant pour l'amener à se positionner et à voter « utile ». L'objectif politique étant bien évidemment de donner le sentiment d'un plébiscite avant l'heure. Il reste cette autre énigme – une de plus – qui rend encore les grilles de lecture du prochain scrutin indéchiffrables : pourquoi le ministère de l'Intérieur se plaît-il à maintenir également secrète la liste des autres candidatures à la présidentielle. En dehors de quelques noms qui ont filtré, échappant apparemment à la vigilance des autorités compétentes, on ne sait pas sur la vingtaine de candidatures annoncées ce que contient le panier électoral du prochain scrutin. Selon toute vraisemblance, même les candidats qui ont retiré les formulaires ont dû recevoir la consigne stricte de ne pas rendre publique leur candidature jusqu'à ce que l'ordre leur soit donné d'en haut de le faire. Nul doute que l'on attend le passage du cortège officiel, l'annonce de la candidature de Bouteflika, pour libérer la circulation et permettre aux autres candidats de se faire connaître. Tout semble programmé comme du papier à musique.