L'université Abbès Laghrour de Khenchela a été fermée durant plus d'une semaine en raison d'une grève des professeurs et des étudiants. L'accès à l'université a été bloqué totalement par les manifestants, a-t-on constaté. Le mouvement de contestation a vite gagné en complexité traduisant la crise que traverse cette «jeune» université. Après deux jours de protestation, organisés une semaine auparavant par les enseignants universitaires affiliés au syndicat autonome Cnes (Conseil national des enseignants du supérieur), les étudiants ont pris le relais pour montrer leur colère, tandis que la présidence de l'université s'est murée dans un «silence méprisant». Les étudiants ont alors entamé une grève illimitée depuis lundi 12 novembre pour protester contre la «dégradation des conditions socio-pédagogiques». L'appel à la grève lancée par l'Union générale des étudiants algériens (UGEA) dénonce la mauvaise gestion des responsables du rectorat qui, selon un communiqué de l'UGEA, dont El Watan détient une copie, «refusent de suivre les instructions de la tutelle, dont l'instauration du dialogue entre l'administration et les représentants des étudiants». Par ailleurs, l'organisation estudiantine a dressé un tableau noir du fonctionnement de l'université sous tous ses aspects. Elle dénonce, entre autres, les conditions de vie «déplorables» dans lesquelles ils vivent à l'intérieur du campus, «la dégradation visible dans les amphithéâtres et les salles de cours, l'absence de stages de courte durée à l'étranger pour les étudiants en mastère et doctorat, en s'interrogeant sur les critères de sélection, la non-application du décret exécutif n°13-306 du 31 août 2013, portant organisation de stages pratiques et en milieu professionnel à l'intention des étudiants, la mauvaise gestion de l'administration et l'absentéisme du personnel administratif, la non-application des diverses dispositions réglementaires du ministère». Et plus grave, le communiqué parle «de la persistance de la discrimination raciale dans l'attribution des notes par les enseignants !» Le tribunal administratif de Khenchela a déclaré «illégal» le mouvement de grève illimitée. La présidence de l'université, pour sa part, a appelé les grévistes à «l'arrêt immédiat» de leur grève et à regagner leurs classes, s'appuyant sur la décision de justice pour l'application des sanctions administratives prévues par la loi contre les étudiants grévistes. Malgré ce jugement ordonnant l'arrêt de la grève, les étudiants ont poursuivi, hier, leur mouvement de protestation. Ces derniers jours ont aussi été marqués par la visite du coordinateur du Conseil national des enseignants du supérieur (CNES), Abdelhafid Milat, à l'université Abbès Laghrour, alors que celle-ci était dans un état d'ébullition. Milat a exprimé son «soutien total et indéfectible aux revendications légitimes des enseignants». Il a indiqué que cette «vague de protestations risque de s'étendre à tous les établissements universitaires si cette situation n'est pas vite réglée par l'adoption d'un dialogue sérieux, dans un esprit de compromis et de souplesse». Milat a dénoncé «les atteintes au droit syndical par certaines administrations universitaires qui ne reconnaissent pas les droits syndicaux». En soulignant que «seule la justice est en mesure de décider de la légitimité des syndicats et pas l'administration».