Un thriller haletant de deux heures : Jerusalema du cinéaste sud-africain Ralf Ziman en compétition, ou comment la capitale économique du pays est devenue une aventure dangereuse à vivre. C 'est dans les bas fonds de cette mégapole qu'un jeune chef flamboyant et sanguinaire à la fois, nommé Lucky Kunéné, spécialiste du « carjacking » (malheur à l'automobiliste qui tombe entre ses mains), va essayer de détrôner le roi de la drogue, un Nigérian du nom de Tony Ngu. C'est parti pour deux heures de chocs et de temps forts dans la veine des meilleures séries américaines. L'Afrique du Sud produit beaucoup et ses réalisateurs souvent sont dans le bon chemin du cinéma, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui en Egypte. Une pâle copie du thème des « enfants de rue » dans Al Ghaba (les démons du Caire) de Atef Ettayeb, en compétition aussi. L'enfance perdue a toujours été une « terra incognita » pour les cinéastes qui se collent au sujet. On citera cependant des classiques : Les enfants de Bogota, de Ciro Duran et Salam Bombay, de Mira Naïr. Les enfants cairotes, chassés de leurs familles au centre de Al Ghaba sniffent (évidemment) de la colle, chapardent partout ce qu'ils trouvent, sont poursuivis par la police corrompue de l'inexcusable régime de Hosni Moubarak.Mais on souffre plus que les enfants devant le travail raté du metteur en scène. A Ouaga, quand le vent de l'Harmatan souffle très fort, c'est plutôt la coutume. Même pendant la projection nocturne et en plein air, au centre Mélies, du film marocain de Souad El Bouhati : Française. Accueil tiède en dépit du vent.. Malgré la performance remarquable de Hafsia Terzi, le sujet n'est pas très original. L'adolescente ramenée de force au Maroc qui ne rêve que de retourner en France de peur d'un mariage arrangé,…Ici aussi, quelque chose ne marche pas dans le récit. Et pendant ce temps, le Burkina a appris une très mauvaise nouvelle, le Canada a rayé ce pays de sa politique d'aide et de dons, et cela n'est pas lié à la recession globale, mais plutôt semble-t-il à l'ordre donné par un juge parisien courageux de traquer les fortunes colossales mal acquises des dirigeants africains actuels. La guerre des pirates Etrange pays que le Burkina, il s'y déroule en ce moment un festival de films qui est exactement le contraire de l'idée qu'on se fait d'un festival. Un évènement ambigu où l'autosatisfaction injustifiée fait bon ménage avec la dérive des petites com bines. La raison d'être d'un festival africain c'est de laisser toute la place à l'art, à la création cinématographique et non pas passer le temps à faire des courbettes devant les ministres des « pays donateurs », d'être présents pour montrer les films et non pas perdre le temps précieux en inaugutation de statues, en libations archaiques (incroyable, mais à Ouaga, ils ont fait tourner les cinéastes trois fois autour d'une statue...). Ce serait étrange si Khalida Toumi pendant le Panaf de juillet prochain faisait tourner les participants autour d'un monument d'Alger ! Que penseraient les Algérois ? Ne parlons pas des faux colloques où les interminables palabres n'aboutissent jamais à la moindre idée neuve. A-t-on avancé depuis le temps et quelle action concrète a suivi en faveur du cinéma africain, vitrine toujours pauvre et sans appui ? D'inquiétants organismes étrangers à l'Afrique prétendent aider ce cinéma. Sembène Ousmane l'avait dit et redit déjà : ces gens-là défendent leurs propres intêrets plutôt que les intêrets de l'art cinématographique africain. Sarkozy a envoyé ici son secrétaire d'Etat à la coopération, c'est un type qui a une idée infiniment réductrice de l'art et du cinéma. Il a dit aux Burkinabés que son président viendrait assister à une course cycliste. C'est à ce niveau. Et pendant que les tables rondes continuent au Fespaco, la vraie vie se déroule dehors. Dans les rues où la guerre des prirates bat son plein.On ne fait pas un seul pas à Ouaga sans qu'une bande de jeunes les bras chargés de cassettes vidéo piratées vous assaille, vous harcelle en baissant à chaque pas le prix.La piraterie est devenue une industrie trés lucrative à Ouaga. Les petits marchands tarabustent le passant pour qu'il sorte ses francs CFA. Le choix est infini, des films récents le plus souvent. Aujourd'hui, si une production se termine à Paris, Abidjan ou Hong Kong, demain elle sera déjà sur le marché des pirates. A Lagos, au Nigeria, paradis des pirates, on raconte pour rire que grâce à la piraterie, les gens voient un film avant même qu'il soit tourné... Plus rien ne nous étonne plus de l'Afrique. Tous les matins, au Ran Hotel de Ouaga (dont la devise est : cadre enchanteur, personnel qualifié...), arrive un authentique Targui sur son chameau. C'est un artisan. Il choisit un fauteuil stratégique dans le lobby, dépose ses précieux objets sculptés à négocier et sort son Blackberr ,