Une chaîne qui juridiquement, selon maître Hocine Zahouane, président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH), est un service public lourd, mais n'a jamais assuré sa mission. «L'ENTV n'a jamais assuré un service public. C'est une chaîne contrôlée par le pouvoir et a fortiori par les services de sécurité. Dans l'ensemble, les gestionnaires de l'ENTV ne veulent pas assurer la mission primordiale de cette chaîne qui est le service public. L'absence de la variété du discours politique et culturel renseigne sur le mode de gestion de cette télévision», a estimé maître Hocine Zahouane. Pour Boudjemaâ Guechir, président la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADH), l'ENTV est réduite à une caisse de résonance du pouvoir. «Malheureusement l'ENTV n'accomplit pas la mission qui est la sienne. C'est une TV qui sert l'Etat, ses agents et ses couloirs de transmission. Elle est très loin d'assurer le service public», a déclaré le premier responsable de la LADH. Pour lui-même, la notion de service public a perdu son sens chez les responsables de l'ENTV. «Même le président de la République a déclaré une fois qu'il ne se laisse pas critiquer par ses propres moyens. Cela signifie clairement que le sens donné à l'Etat n'est pas clair. Que peut-on dire de la définition donnée au service public ? Je pense qu'on ne pourra pas promouvoir la démocratie avec de tels procédés», a-t-il enchaîné. Les partis politiques étaient également du même avis que lesdites organisations. L'absence de débat contradictoire, la fermeture des portes de la TV devant l'opposition et la pauvreté du programme proposé à la société ont été relevées par les responsables des formations politiques que nous avons pu contacter. Télé et Politique Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) considère que l'ENTV est «un média lourd au service du pouvoir central». Selon Mohamed Khendak, chargé de communication du parti, la chaîne nationale de télévision «est au service du pouvoir et n'assure jamais le service public». «L'accaparement des médias lourds par le pouvoir s'accentue à l'approche des échéances électorales locales ou législatives. La réaction de l'ENTV durant la campagne sur la charte pour la paix et la réconciliation nationale, en excluant du débat toutes les voix discordantes, confirme la dépendance de l'ENTV du pouvoir central», a renchéri Mohamed Khendak. Pour sa part, le Mouvement démocratique et social (MDS) estime que l'accaparement et la gestion des médias lourds en Algérie sont une grande dérive. «Le pouvoir a exclu de la télévision non seulement les partis politiques de l'opposition, mais également les citoyens. Ces derniers pourtant payent.» Pour le Mouvement pour la société et la paix (MSP), «la télévision nationale n'accomplit pas sa mission de service public autant qu'elle assure le service gouvernemental». Pour M. Menasra, cadre du MSP, la télévision nationale ne fait son devoir que lors des rendez-vous électoraux. «Hormis le travail effectué à l'approche des échéances électorales, il y a une absence cruelle de débats contradictoires à l'ENTV. On ne voit plus de riches débats basés sur la confrontation des idées», a-t-il expliqué. M. Menasra soulève également un autre point important qui est le rôle de la télévision dans la sensibilisation politique de la société. «Elle ne favorise pas la participation des citoyens dans les débats politiques», a-t-il ajouté. Le MSP, a-t-il soutenu, revendique l'ouverture de l'audiovisuel au privé. De son côté, Saïd Bouhedja, membre de l'instance exécutive du FLN, affirme que l'ENTV n'a pas encore atteint le degré nécessaire de développement pour participer à la promotion de la démocratie. «Nous souhaitons que l'ENTV progresse pour atteindre le niveau de développement des chaînes étrangères», a-t-il souligné.