La quête des droits est, pour la femme algérienne, un défi qu'elle doit relever au quotidien. Elle bataille, quel que soit son statut social, pour arracher l'égalité qui n'est qu'un vain mot couché sur la Loi fondamentale. Lors d'une rencontre à l'Institut Cervantès d'Alger, des femmes savantes ont démontré que malgré le degré d'instruction qu'elle peut atteindre, l'Algérienne demeure prisonnière d'un système de domination par l'homme basé sur un contrat social qu'elle doit subir contester. Un contrat à l'élaboration duquel elle n'a pas été conviée et qui est cousu selon les règles d'une tradition patriarcale aux relents misogynes et sexistes. Si la femme espagnole, comme le souligne Carmen Romero, présidente de l'association Cercle méditerranéen, a réussi à gagner ses droits après la chute du franquisme, l'Algérienne a malheureusement été sommée de reprendre une place de secondaire dans la société après avoir pourtant été aux premières loges du combat pour la libération du pays. Carmen Romero estime que le travail politique a permis aux Espagnoles de s'imposer comme des protagonistes sur un terrain qui était réservé aux seuls hommes. « Les femmes ne peuvent pas attendre qu'on leur offre leurs droits, elles doivent militer pour les arracher. La parité doit se gagner en imposant la discrimination positive », dit-elle. Pour Nadia Aït Zaï, directrice du Centre d'information et de documentation de l'enfant et de la femme (CIDDEF), le mouvement féministe en Algérie a une part de responsabilité dans la régression que connaît la condition féminine : « Nous, militantes des droits des femmes, nous n'avons pas la même compréhension de la notion d'égalité. Et les pouvoirs publics y mettent aussi un autre contenu. Nous nous trouvons devant un double discours. Nous avons le droit de vote, le droit d'être élue, le droit à la santé, à l'éducation. Mais cela ne veut pas dire que nous avons acquis pleinement nos droits », explique Mme Aït Zaï. Et de souligner que l'Etat algérien, qui a ratifié la convention sur l'élimination de la discrimination, continue d'émettre des réserves sur le statut de la femme dans la famille. « Depuis 1962, nous demeurons en transition. Quand il y a des réformes, elles répondent à des intérêts du moment. Nos politiques ont une approche de l'égalité qui balance entre l'universel et les spécificités de la famille algérienne. Nous sommes dans un comportement ambivalent. La société veut aller vers la modernité, mais il y a des réticences à considérer la femme comme un être humain », précise Mme Aït Zaï, en notant l'absence de volonté politique qui aille dans le sens de donner ses pleins droits à la femme. « Le danger est de voir que des adolescents ont les mêmes réponses que les adultes sur la question de la femme », indique l'avocate en évoquant une enquête que le CIDDEF a menée sur la situation de la femme algérienne. « Même le droit au travail de la femme est menacé. 80% de nos sondés veulent que les Algériennes portent le voile. Il est urgent que les politiques accompagnent les principes égalitaires et que les femmes reviennent au combat », note-t-elle. La juriste Wassila Tamzali plaide aussi pour que les femmes réoccupent le terrain de la lutte. « Quand on parle de lutte politique, c'est qu'il faut faire avancer les choses par le chemin du réformisme. Il s'agit de faire une rupture avec les règles d'une société pour en instaurer d'autres », indique-t-elle.