Le journal américain The Seattle Post-Intelligencer est mort, mercredi dernier, à l'âge de 146 ans. N'ayant pu résister à l'assaut du net, le Seattle PI, comme l'appellent les habitants de la ville, deviendra le premier grand journal américain à se convertir au web-journalisme. Le journal, qui tirait à 117 600 exemplaires par jour, a vécu des moments très difficiles. Dans sa dernière édition, il titrait : « One era ends, another begins » (une ère se termine, une autre commence). La disparition du Seattle PI laisse toute grande la place au Seattle Times, qui sera désormais le seul quotidien majeur publié à Seattle. Dans sa une de mercredi, le patron du Seattle Times a souhaité la bienvenue aux lecteurs de son défunt rival. La disparition de ce journal est symptomatique du malaise qui sévit actuellement dans le monde des médias. Hearst, la compagnie propriétaire du journal, a cherché en vain un nouveau propriétaire pour son journal, déficitaire depuis neuf ans. La décision de l'entreprise arrive deux semaines après qu'un autre quotidien américain, le Rocky Mountain News de Denver ait, lui aussi, mis fin à l'impression de sa version papier. Le Seattle PI rejoint ainsi la liste des journaux disparus. Des 167 salariés que comptait le journal, il n'en restera que 30, dont une vingtaine de journalistes. Un autre quotidien historique du groupe, le San Francisco Chronicle, fondé en 1865, est menacé d'arrêt. L'entreprise a prévu de le fermer ou de le vendre, à moins que ses employés n'acceptent des suppressions d'emploi « importantes ». Déjà fin 2008, le journal Christian Science Monitor annonçait que sa publication ne se ferait plus que sur internet à partir d'avril 2009. Avant cela, le Cincinnati Post, le Capital Times avaient également mis la clé sous le paillasson. Mais certains estiment que la disparition du Seattle PI est différente de celle des autres journaux, car elle a une portée « historique ». « L'arrêt de sa parution a beaucoup plus choqué l'opinion... et la profession. Parce que le PI, fondé en 1863, appartenait au patrimoine historique. Parce qu'il s'agit du titre le plus important à disparaître en termes de diffusion », écrit-on dans le journal français Le Monde. Le fait est, par ailleurs, que la ville de Seattle est celle de Boeing et de Microsoft. La disparition d'un journal, dans une ville ayant un bon niveau d'éducation, est indicateur de la crise que traversent actuellement les médias. A l'appel d'un comité de sauvetage du Post-Intelligencer, des représentants de la société civile ont manifesté, lundi dernier, devant les défenseurs de la démocratie et des droits, leur colère face à la disparition de ce journal. Le jour de la fermeture du journal a été, à leurs yeux, « un jour noir pour la démocratie ». En plus de la récession qui a durement touché les Etats-Unis, les journaux souffrent du manque d'engouement des jeunes pour la presse écrite et la désertion des annonceurs des espaces publicitaires qu'offrent les journaux au profit du web. En tout et pour tout, le Post-Intelligencer a perdu 14 millions de dollars en 2008.