La vie ne semble pas avoir été tendre avec D. Meriem, lycéenne âgée tout juste de 18 ans, qui comparaissait devant le tribunal criminel au mois de février dernier. Ses grands yeux noirs semblent avoir été mûris dans la souffrance et la méfiance, dans l'adversité et l'amertume. Sa frimousse contraste violemment avec les rondeurs de son corps parfaitement bien sculpté que laisse deviner sa djellaba de couleur claire. A ses côtés, son flirt B. Mohamed, 20 ans, étudiant, un brun d'une taille au-dessus de la moyenne, qui affiche un air effarouché. D. Meriem se prête au jeu des questions-réponses imposé par le président du tribunal, en arborant une attitude résolue. « Je n'ai pas tué mon bébé. Il est mort accidentellement. Il a dû être étouffé par inadvertance », répète-t-elle avec une impatience dans sa voix. Selon l'acte d'accusation, dans l'après-midi du 13 janvier 2008, l'accusée a profité de l'absence de ses parents du domicile familial, sis dans le quartier de Maraval, pour accoucher, sans aucune assistance, d'un bébé de sexe masculin. C'est à l'aide d'une paire de ciseaux, que sa mère utilisait pour des travaux manuels, qu'elle a sectionné le cordon ombilical. D. Meriem a, par la suite, enveloppé l'enfant dans un drap avant de l'enfouir dans un sac qu'elle a pris soin de dissimuler. L'accusée aurait contacté son flirt pour lui suggérer, en premier, une auscultation par un gynécologue du centre hospitalier d'Oran. D'un commun accord, ils auraient convenu de confier le bébé à la pouponnière après la consultation, mais les événements se sont précipités. C'est le médecin qui a alerté la police en constatant les séquelles laissées par l'accouchement. Le nouveau-né, retrouvé derrière la porte de la chambre conjugale des parents de D.Meriem, avait entre-temps succombé à un étouffement, selon les résultats de l'expertise médicale. « Mes parents ont refusé catégoriquement la demande de mariage formulée par Mohamed. J'ai tenté de les mettre devant le fait accompli », se plaint-elle avant de craquer en fondant subitement en larmes. Son co-accusé ébauche un geste pour la consoler avant de se raviser, en se rappelant vraisemblablement qu'il se trouvait dans une salle d'audience. « Nous n'avons jamais eu l'intention de donner la mort à notre bébé, monsieur le juge », explique B. Mohamed, qui était poursuivi pour non-dénonciation de crime. Le représentant du ministère public a mis en évidence la gravité des faits en soulignant que les résultats de l'enquête révèlent que « la mort de l'enfant n'est pas accidentelle », avant de conclure son réquisitoire en requérant une peine de 12 ans de réclusion criminelle contre la principale inculpée et 3 années d'emprisonnement pour son co-ïnculpé. L'avocat de la défense a axé sa plaidoirie sur « l'inexistence de preuves tangibles prouvant l'infanticide » avant de plaider non coupable en demandant l'acquittement au bénéfice du doute. Au terme des délibérations, le tribunal criminel a condamné D. Meriem à 3 ans d'emprisonnement. B. Mohamed a, quant à lui, écopé d'une année de prison avec sursis. A l'annonce du verdict, les deux jeunes gens ont fondu en larmes en oubliant qu'ils étaient dans le box des accusés.