En ce sens, et avant de prendre son avion pour un sommet tripartite qui l'a réuni hier avec le Premier ministre israélien et le président de l'Autorité palestinienne, la secrétaire d'Etat américaine a clairement laissé entendre qu'il ne fallait s'attendre à absolument rien de spectaculaire. Et le premier élément en est certainement l'absence de conférence de presse commune. C'est donc Mme Condoleezza Rice qui lira une déclaration. Aussi indiquera-t-elle, les dirigeants israélien Ehud Olmert et palestinien Mahmoud Abbas ont réaffirmé leur engagement pour une solution à deux Etats. «Nous avons tous les trois affirmé notre engagement pour une solution à deux Etats, et nous nous sommes entendus sur le fait qu'un Etat palestinien ne peut voir le jour dans la terreur et la violence», a déclaré Mme Rice qui venait de s'entretenir avec MM. Abbas et Olmert dans un hôtel d'El Qods. Mais quel type d'Etat et avec quelles frontières ? Il faudra attendre puisque les deux dirigeants, apprendrons-nous encore, sont convenus de se rencontrer de nouveau «prochainement». Selon Mme Condoleezza Rice, «le président (Abbas) et le Premier ministre (Olmert) ont discuté de leurs vues concernant l'horizon diplomatique et politique et comment cela pourrait conduire à la réalisation de la vision du président Bush de deux Etats. Elle a affirmé que les deux dirigeants ont demandé l'aide des Etats-Unis pour avancer dans les négociations et qu'elle s'attendait à être de retour dans la région prochainement à cette fin». Ils ont réitéré le désir d'une participation et d'un leadership américains afin de faciliter les efforts visant à surmonter les obstacles, à rallier un soutien régional et à avancer vers la paix. «Dans ce contexte, je prévois de revenir prochainement dans la région, a-t-elle dit, soulignant que MM. Abbas et Olmert ont discuté des questions inhérentes à l'accord pour la formation d'un gouvernement palestinien d'union nationale et de la position du Quartette selon laquelle tout gouvernement de l'Autorité palestinienne doit s'engager à ne pas recourir à la violence, à reconnaître Israël et à accepter les accords passés, les engagements, y compris la ‘'feuille de route''». Venue pour «scruter l'horizon diplomatique» comme elle l'a dit, la secrétaire d'Etat américaine s'était rendue à Ramallah, en Cisjordanie, pour obtenir des éclaircissements sur l'accord de La Mecque, qui doit ouvrir la voie à un gouvernement palestinien d'union nationale. A l'issue de la rencontre avec le président Mahmoud Abbas, qui a duré deux heures et demie, un des cadres du Fatah, Mohammed Dahlane, a reconnu que le programme du futur gouvernement palestinien «ne répondait pas aux conditions posées par le Quartette». Il a ajouté que le président palestinien avait expliqué à Mme Rice que sa priorité avait été de mettre fin aux affrontements entre factions palestiniennes. «Elle respecte notre position là-dessus. Mais sa position à elle, c'est qu'elle n'aura pas de contact avec ce gouvernement, c'est clair», a-t-il ajouté. COLÈRE DE MAHMOUD ABBAS Le Premier ministre israélien avait déjà fait savoir, dimanche matin, qu'il aurait convenu avec le président américain George Bush de boycotter le futur gouvernement palestinien, si celui-ci ne se pliait pas aux exigences de la communauté internationale. Mahmoud Abbas aurait vivement réagi aux menaces américaines de boycottage : «Le président Abbas (…) s'est emporté, en disant "vous faites pression sur moi ! J'ai déjà des pressions internes, c'est insupportable ! De toute façon, soit c'est l'accord (de La Mecque), soit c'est la guerre civile!''.» Telle était la trame de fond de ce sommet déjà hypothéqué par la position d'Ehud Olmert pressé par la droite israélienne de quitter la scène politique pour son implication dans de nombreux scandales. Pour préparer cette réunion, Mme Rice s'était entretenue séparément dimanche avec MM. Abbas et Olmert. Mme Rice a souhaité que la réunion aborde «les contours» du futur Etat palestinien censé couronner les négociations sur le statut final des territoires occupés portant sur des dossiers aussi épineux que les frontières, le sort d'El Qods, les réfugiés et les colonies juives. Mais en faisant la part des choses, on se rend compte que le pessimisme était dominant, surtout au regard des propos au sujet du prochain cabinet palestinien. A ce propos, Mme Rice s'est également montrée peu optimiste. «Je n'ai rien vu pour l'instant qui suggère que le (futur) gouvernement répondra (…) aux principes» du Quartette pour le Proche-Orient, a-t-elle dit. Or les arrangements de La Mecque stipulent simplement que le gouvernement s'engagera à «respecter» les accords conclus par l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), y compris ceux signés avec Israël. Le sommet d'hier a tout juste, et selon les conclusions qui ont été révélées, de rappeler des positions de principe, vieilles de plusieurs décennies. C'est ce qui avait été convenu dans le cadre des accords d'Oslo, mais on sait ce qu'il en est advenu. On a aussi perdu de vue la feuille de route, ce fameux plan du Quartette qu'Israël avait réécrit et même fixé dans ses limites en se lançant dans l'édification du mur dit de séparation, perçu comme une frontière de fait.