Autrement dit, une infime partie, le reste des Républiques ayant proclamé leur indépendance. Pas toujours dans la joie, il est vrai. Cette fois, l'ONU est face à un véritable dilemme. Que faire de cette province détachée de fait de la Serbie depuis le printemps 1999, et qu'elle administre depuis cette date ? C'est simple, selon le médiateur qu'elle a nommé. Il faut la placer sur la voie de l'indépendance, surveillée ou contrôlée, cela apparaît comme un point de détail, l'essentiel étant affiché. Mais cela suscite l'opposition aussi bien de Belgrade qui refuse de perdre cette province que de sa population majoritaire qui veut une indépendance réelle. Quant aux grands qui doivent prendre cette décision, première du genre dans les annales des Nations unies, ils sont fondamentalement divisés. Ainsi donc, et après des années d'attente, le Conseil de sécurité entame aujourd'hui des discussions sur le plan du médiateur de l'ONU pour le Kosovo, Martti Ahtisaari, qui s'annoncent longues et difficiles au vu de l'hostilité de Belgrade et de Moscou à cette idée. Le Conseil doit entendre les explications de M. Ahtisaari et procéder à un premier échange de vues sur son plan, sans prendre de décision ni même discuter d'un quelconque texte, selon des diplomates. Le Premier ministre serbe, Vojislav Kostunica, farouchement opposé à l'indépendance du Kosovo, devrait assister à cette réunion, selon Belgrade. «Le Kosovo va être le grand sujet du mois d'avril au Conseil de sécurité», a prédit un ambassadeur occidental, selon qui les discussions devraient durer «plusieurs semaines». Les Etats-Unis et l'Union européenne soutiennent le plan Ahtisaari. Le Kosovo, province serbe dont la majorité albanaise réclame l'indépendance, est administré par l'ONU depuis 1999 après des bombardements de l'Otan pour faire cesser la répression du régime serbe contre les séparatistes albanais. Considérant l'indépendance comme «la seule option pour assurer la stabilité politique et la viabilité économique du Kosovo», M. Ahtisaari propose qu'elle s'exerce «dans un premier temps» sous supervision internationale, civile et militaire, dans son rapport final publié le 26 mars dernier. Selon le plan de l'ex-président finlandais, un représentant civil international, également représentant de l'UE, sera nommé pour contrôler l'application du statut et la présence militaire internationale sera conduite par l'Otan. La supervision internationale sera «dotée de pouvoirs importants mais précisément ciblés dans des domaines clés tels que les droits des communautés, la décentralisation, la protection de l'Eglise orthodoxe serbe et l'Etat de droit». Elle ne prendra fin que lorsque le Kosovo aura «mis en œuvre les mesures prévues dans le plan. Mais la Serbie ne veut pas entendre parler de l'indépendance du Kosovo, qu'elle considère comme le berceau de sa culture, et son alliée la Russie, qui dispose du droit de veto au Conseil de sécurité, a implicitement menacé de l'utiliser. Le président serbe Boris Tadic s'est déclaré «énergiquement opposé» au soutien des Etats-Unis à la proposition d'une «indépendance surveillée» pour le Kosovo. «M. Tadic a transmis au sous-secrétaire d'Etat américain Nicholas Burns qu'il était énergiquement opposé à la décision du département d'Etat de soutenir le plan de Martti Ahtisaari pour une indépendance surveillée du Kosovo», a indiqué un communiqué de la présidence serbe. «Toute forme d'indépendance pour le Kosovo est inacceptable pour la Serbie», a réitéré M. Tadic. Le président serbe s'est prononcé pour la poursuite des négociations entre responsables serbes et kosovars albanais, précisant que la Serbie allait, dans ses contacts avec les membres du Conseil de sécurité de l'ONU, défendre cette option. Quant à l'ambassadeur de la Russie à l'ONU, Vitaly Tchourkine, il a tout simplement claqué la porte lundi dernier d'une séance de consultations au Conseil de sécurité sur le Kosovo. Il a accusé le représentant de l'ONU dans la province serbe, Joachim Rùcker, de se faire l'avocat de l'indépendance pour ce territoire de deux millions d'habitants dont 90% sont albanophones et le reste une minorité essentiellement serbe. Martti Ahtisaari ayant justifié sa proposition en estimant qu'«il avait épuisé ses ressources» après 14 mois de négociations infructueuses entre Serbes et Kosovars. L'UE dont deux pays membres, la France et la Grande-Bretagne, ont aussi un droit de veto au Conseil de sécurité a toujours dit qu'elle soutenait entièrement M. Ahtisaari. La Chine, cinquième membre permanent du Conseil de sécurité, n'a fait aucune déclaration récente qui permette de connaître sa position sur ce dossier. La bataille pour le Kosovo s'annonce véritablement ardue. La Serbie est-elle en train de vivre le dernier acte d'une histoire mouvementée ? En tout état de cause, la responsabilité de l'ONU sera lourde de conséquences.