Alors que s'ouvrait hier à Genève une conférence de l'ONU sur le racisme, de nombreux responsables à travers le monde se livraient à un difficile exercice, comme le font les dirigeants d'un club de football obligés de se justifier après le comportement raciste des supporters, ou encore ce rapport de l'ONU sur les restrictions d'eau imposées par Israël aux Palestiniens. C'est pourtant cette même ONU qui avait assimilé dans une résolution le sionisme au racisme, une résolution qui avait fait grand bruit. Mais ne voilà-t-il pas certains pays qui viennent au secours de ce même Israël qui a bien au contraire aggravé sa politique envers les Palestiniens, prenant prétexte des propos du chef de l'Etat iranien. Une manière de jeter le discrédit sur cette conférence, alors que le racisme d'une manière générale s'empare de l'Europe avec la montée de l'extrême droite, favorisée il est vrai par la crise économique. C'est dans ce contexte que s'est ouverte hier la conférence en question, appelée « Durban II ». Parmi les absents, on compte notamment les Etats-Unis, ce qu'a déploré le secrétaire général des Nations unies qui s'est dit « profondément déçu ». M. Ban Ki-Moon a ouvert la conférence dans un climat de tension. « Je suis profondément déçu (...). Certaines nations qui, de droit, devraient aider à tracer la voie vers un avenir meilleur, ne sont pas là », a regretté M. Ban dans son allocution d'ouverture au Palais des nations. « Hors de ces murs, des groupes d'intérêt de nombreuses obédiences politiques et idéologiques se sont opposés dans un climat d'acrimonie. Eux aussi devraient être avec nous et parler », a-t-il ajouté. Pour M. Ban, la conférence, qui doit assurer le suivi de celle, houleuse et très controversée de Durban, en 2001 en Afrique du Sud, devrait être placée sous le signe d'une « nouvelle ère de multilatéralisme » et se caractériser par « moins de confrontation et plus de dialogue, moins d'idéologie et plus de compréhension mutuelle ». Car « aucune société n'est immunisée » contre le racisme, qu'elle soit riche ou pauvre, a encore déploré le secrétaire général. Mais le racisme peut se manifester de manière moins formelle « comme l'antisémitisme (...) ou plus récemment l'islamophobie ». Dans ce contexte pesant, les Etats-Unis, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas, l'Italie et l'Allemagne ont finalement annoncé qu'ils ne participeraient pas à la conférence. La France et la Grande-Bretagne ont de leur côté annoncé dimanche qu'elles seraient présentes à Genève, quoiqu'au niveau de leur ambassadeur. Israël et le Canada avaient fait savoir de longue date qu'ils ne seraient pas présents. Un fait grave à relever : Israël a rappelé hier pour consultations son ambassadeur à Berne après une rencontre entre le président suisse Hans-Rudolf Merz et son homologue iranien dimanche comme s'il s'agissait d'interdire pareille rencontre, alors que la Suisse est en charge des intérêts iraniens aux Etats-Unis. Le document final, toujours en cours d'enrichissement et entériné vendredi par le comité préparatoire de la conférence, ne fait pourtant plus mention d'Israël ni de la diffamation des religions, deux « lignes rouges » pour les Occidentaux. Le haut commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Navi Pillay, a d'ailleurs « exprimé (sa) gratitude à la délégation de Palestine ainsi qu'à l'Organisation de la conférence islamique pour la flexibilité dont ils ont fait preuve ». « J'espère que les Etats membres qui, à mon grand regret, ne sont pas ici se joindront malgré tout aux efforts pour rendre tangibles les changements dans les vies des victimes du racisme », a déclaré Mme Pillay, qui assure le secrétariat général de la conférence. Si l'ONU à un tel niveau a tenu à mettre les choses au clair, où se situe donc le problème ? Dans le fond admettra, t-on, le racisme n'a jamais cessé d'exister et sous différentes formes. Ahmadinejad critique la création d'Israël Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a critiqué hier la création d'Israël après 1945, l'assimilant à un « gouvernement raciste », lors d'un discours devant les participants à la conférence de l'ONU sur le racisme à Genève. « Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, ils (les Alliés, ndlr) ont eu recours à l'agression militaire pour priver de terres une nation entière sous le prétexte de la souffrance juive », a expliqué M. Ahmadinejad. « Ils ont envoyé des migrants d'Europe, des Etats-Unis et du monde de l'Holocauste pour établir un gouvernement raciste en Palestine occupée », a-t-il affirmé. Les déclarations du président iranien ont provoqué le départ de la salle du siège de l'ONU à Genève de plusieurs représentants européens.