Il arrive que, pour une raison ou une autre, le transfèrement n'ait pas lieu, créant ainsi une situation triplement préjudiciable aux droits de la défense, en particulier lors de la phase finale du traitement de l'affaire, le procès. Résumons ces trois formes préjudiciables à la lumière d'un cas d'espèce illustré par notre assistance aux assises d'un accusé dans le procès de l'affaire de l'OPGI de Béchar qui devait se tenir le 25 octobre dernier. 1- Privation de la défense du dernier contact d'usage L'avocat sait à quel point est capital le dernier parloir avant le jour fatidique. En effet, la dernière entrevue permet d'affiner les moyens de défense et de fixer les stratégies de cette dernière. Elle a, par ailleurs, une portée psychologique évidente dans la mesure où elle brise la solitude qui frappe l'accusé. Elle le fait sortir de sa torpeur, lui permet de s'extérioriser et de retrouver ses facultés psychologiques affectées par l'isolement, et ce, grâce à son meilleur soutien : l'avocat. Dans le cas qui nous concerne, le transfèrement de Sidi Bel Abbès à Béchar était hypothétique jusqu'à l'ouverture du procès. On attendait de jour en jour, d'heure en heure, l'arrivée des détenus, en vain. 2- Défaut de notification aux accusés de la liste des jurés Même dans la perspective de la tenue du procès si les détenus arrivaient en dernière minute, il y aurait une autre atteinte aux droits de la défense — et elle est de taille —, la violation de l'article 275 du CPP qui exige la notification à l'accusé de la liste des assesseurs-jurés «au plus tard l'avant-veille de l'ouverture des débats». On s'acheminait donc à aborder le procès dans ces conditions quand, appelant l'affaire, le Tribunal criminel annonça la non-exécution du transfèrement de Sidi Bel Abbès et décida le renvoi à la prochaine session. C'est alors que la défense présenta des demandes de mise en liberté. 3- L'imbroglio créé par l'article 131 du CPP Cet imbroglio concerne la mise en liberté formulée par la défense qui considère les accusés lésés par le renvoi. La demande se fonde sur un moyen de droit qui semble pertinent, le caractère devenu injustifié de l'Ordonnance de prise de corps (les accusés n'étaient pas sous mandat de dépôt à la veille de leur procès en 2005) du fait de la correctionnalisation des différents formes de l'acte de gestion, prévues à l'article 119 du Code pénal, suite à son remplacement par l'article 29 de la loi 06-01 sur la corruption. Les demandes de mise en liberté furent rejetées en la forme, probablement en raison des prescriptions de l'article 131 du CPP qui exigent du demandeur, préalablement à sa demande d'élire domicile par déclaration au greffe de l'établissement de détention du ressort du tribunal appelé à juger l'affaire. Or, jusqu'à l'évocation de l'affaire par le Tribunal criminel, les deux accusés intéressés par le transfèrement n'étaient pas arrivés, contrairement au troisième transféré de Tlemcen, et ne pouvaient donc pas faire de déclaration au greffe de Béchar sur l'élection de domicile. Dans ces conditions, il y a manifestement impossibilité physique ou matérielle de satisfaire les conditions exigées par l'article 131. En conséquence, la logique et le bon sens commandent de faire abstraction des exigences du texte cité, d'où la possibilité pour les avocats de présenter des demandes de mise en liberté au nom de leurs mandants absents. A travers cette brève analyse sur le plan du droit, notre souci est d'attirer l'attention sur la situation évoquée pour mieux la prendre en charge. Sans doute convient-il de renforcer la coordination entre les acteurs intervenant dans le processus de transfèrement de façon à ce que celui-ci se fasse dans les délais, que la situation commande. De cette façon, le procès gagnerait à être transparent et les droits de la défense gagneraient à être mieux respectés.