Alors que Hamoud Boualem s'est retiré de l'assemblée élective de l'Association des producteurs algériens de boissons (APAB), El Watan Vendredi a demandé à Toufik Hasni d'expliquer pourquoi il y a de l'eau dans le gaz entre les producteurs de boissons… Récemment, lors de l'assemblée générale visant à élire un nouveau président à la tête de l'Association des producteurs algériens de boissons, Hamoud Boualem a pris la décision de claquer la porte en dénonçant la mainmise de firmes étrangères… Je voudrais d'abord préciser une chose : nous n'avons pas claqué la porte, nous nous sommes juste retirés de l'assemblée élective. Nous voulions reporter les élections, nous avons voulu défendre une position, mais les conditions n'étaient pas réunies, compte tenu du contrôle presque total de l'assemblée générale par Castel. Nous avons expliqué que nous étions toujours ouverts au dialogue et à une participation. Nous avons demandé un délai d'un mois pour pouvoir présenter objectivement nos positions à tout le monde et surtout aux partenaires algériens afin qu'ils puissent cerner tous les enjeux. Mais le jour de l'assemblée générale, nos demandes ont été catégoriquement refusées par les autres partenaires. Mais quelle est donc votre position ? Pour pouvoir bénéficier d'une quelconque aide de l'Etat, il faut au moins démontrer qu'elle va aux profits d'entreprises algériennes uniquement et non d'intérêts étrangers. Je ne vois pas pourquoi on donne des subventions à une multinationale. Ce n'est pas normal. Les producteurs algériens paient plus de taxes que les entreprises étrangères parce qu'ils achètent leurs produits sur place. On ne peut pas permettre cela. On ne peut pas accepter de subventionner un produit fait à l'extérieur. Vous voulez donc écarter les entreprises étrangères de l'association ? De la présidence, oui, car leurs intérêts ne sont pas les mêmes que les nôtres. Une association comme l'Apab est censée, dans la conjoncture actuelle de crise financière, protéger les intérêts de l'économie nationale. Elle doit donc être contrôlée par les Algériens. Les multinationales ne sont que des invitées. Elles doivent nous écouter et partager avec nous leurs avis en toute hospitalité. Les firmes étrangères ne doivent pas s'en offenser. Quel est le rôle de ces multinationales dans l'association et qu'est-ce qui vous dérange ? Ces entreprises vont à l'encontre de la protection de l'économie nationale en important tous leurs produits de l'étranger. La seule valeur ajoutée, c'est l'eau algérienne. Les autres vont faire leur valeur ajoutée ailleurs. Or, nous, nous défendons les produits qui sont fabriqués entièrement ici. Qu'en pensent les partenaires algériens ? Pour nous, il était évident que nos partenaires algériens avaient la même approche de la question. Mais devant leur refus unanime de reporter les élections, nous avons compris que la multinationale avait fait un bon travail de lobbying. Nous n'avons pas pour autant baissé les bras. On ne peut pas jeter la pierre aux entreprises algériennes. Nous leurs avons demandé juste un délai d'un mois. La multinationale avait bien compris le danger et c'est pour cela qu'elle a précipité les élections. D'où les tensions lors de l'assemblée… La réunion a été houleuse mais nous aurions souhaité, au préalable, que les discussions se déroulent dans une ambiance sereine, car la défense des intérêts de la multinationale nous a amenés à être virulents dans nos ripostes. Chez Hamoud Boualem, nous avons des valeurs à défendre. Toutefois, si vos partenaires ne sont pas prêts à vous écouter, est-ce que cette fois-ci vous allez réellement claquer la porte ? Oui, car les idées que nous essayons de défendre sont légitimes. Nous avons une passion pour l'entreprise algérienne et pour le pays. Aujourd'hui, l'Algérie a besoin de gens qui croient au développement et à la protection de son économie. Nous sommes au front de ce combat, si nous ne le menons pas, qui le fera ? Maintenant, s'il y a des gens qui viennent nous rapporter une contre argumentation, nous sommes prêts à les écouter et à respecter leurs avis. Iriez-vous jusqu'à créer une association bis dans laquelle vous écarterez les multinationales ? Même si nous créons une autre association, nous n'allons pas en prendre la présidence. Ce que nous voulons, c'est un espace où nous pourrons discuter, échanger et partager des idées dans le respect. Nous ne voulons pas diriger une quelconque association que ce soit. L'Apab a toujours dénoncé un certain archaïsme de la filiale de la production des boissons. Qu'en pensez-vous ? L'archaïsme est un mot avancé par ceux qui ne veulent pas prendre en charge les problèmes du secteur et c'est le cas des multinationales que les petits producteurs gênent. C'est vrai, les producteurs algériens trouvent des difficultés à produire des boissons de bonne qualité qui puissent concurrencer les produits étrangers, car le climat n'est pas favorable et parce que l'Etat ne les aide pas assez. Nous préférons parler de la mise à niveau de ces entreprises. Pour l'instant, nos entreprises ne sont pas capables de concurrencer les autres, et sont loin d'être exportatrices. Est-ce que pour autant qu'il faut les liquider ? L'entreprise multinationale a tout intérêt à supprimer toute concurrence. Nous, en tant qu'entreprise algérienne, nous n'avons pas peur de la concurrence. Notre objectif chez Hamoud Boualem est de devenir le numéro un en Algérie et on détrônera Coca-Cola (Castel, ndlr). Nous avons satisfait toutes les exigences de qualité et nous commercialisons nos produits même aux Etats-Unis. Nous n'avons pas peur de Coca-Cola. Nous sommes pour le renforcement des capacités des entreprises algériennes afin qu'elles puissent sortir de la situation dans laquelle elles sont. Avez-vous saisi les pouvoirs publics ? Nous sommes en train de le faire à notre manière. L'Etat a besoin de gens qui agissent et non de gens qui contestent. Le problème des entreprises algériennes réside dans leur management et, là, l'Etat ne peut rien faire. On imagine que vous êtes pour la directive de Ouyahia qui exige de prendre un associé local… Oui, car elle entre dans la lignée de ce que nous défendons. Oui, nous devons avoir une approche nationaliste de l'économie. Prenons le cas de Coca-Cola : ils importent l'extrait, l'emballage… et ajoutent de l'eau. Est-ce que dans ce cas, Coca-Cola ne peut pas être assimilée à un simple importateur ? Est-ce que ce n'est pas cette menace qui a fait réagir le Premier ministre ? Et vous voulez que je défende les intérêts des multinationales ?! On a été déçus de voir nos partenaires rallier la cause des multinationales. Raghdouhoum kamal, c'est fini. Ils les ont complètement amadoués. Bio express |Diplômé de l'Institut national des hydrocarbures, ancien vice-président de Sonatrach chargé du gaz naturel liquéfié, dont il est un des pionniers en Algérie, Toufik Hasni a ensuite été nommé PDG de ENIL, une filiale de Sonatrach. Aujourd'hui, il est président d'une association de promotion des énergies renouvelables.|