Les dialectes berbères étaient à l'honneur durant ce festival qui a consacré l'émergence de jeunes talents de la nouvelle scène maghrébine d'expression amazighe. Fouzia Aït El Hadj, directrice du théâtre régional de Tizi Ouzou, et son staff auront réussi leur pari : organiser un festival maghrébin du 4e art en tamazight, premier du genre depuis l'indépendance. Durant une semaine et à raison de deux spectacles par jour, la grande salle de la maison de la culture, Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou, a vibré aux mouvements scéniques de onze troupes, dont deux venues du Maroc. Tragédie, comédie, one man show, théâtre pour enfants, il y en avait pour tous les goûts, pour le plus grand plaisir des amoureux du théâtre qui ont renoué, à l'occasion, avec l'ambiance des planches créée par une pléiade de comédiens de la nouvelle scène maghrébine. Les marocains de l'association Thifeswin d'Al Hoceima ont laissé une bonne impression à travers la représentation intitulée Taslit n uzru, écrite par Saïd Abarnous et mise en scène par Farouk Aznabet. La pièce narre une histoire ancienne qui remonte à 300 ans avant JC. Les scènes se déroulent dans un village imaginaire. Une autre troupe du royaume chérifien a présenté Tafukt, une pièce tragi-comique qui dépeint des scènes de vie marocaine. Pour sa part, Le théâtre Kateb Yacine de Tizi Ouzou (TRTO) s'est intéressé à une œuvre de Mohia, de son vrai nom Mohia Abdellah, écrivain, poète et traducteur de langue berbère, auquel il rend hommage dans Sinistri, mise en scène par Kamel Yaïche. Dans Business is business, le TRTO a développé un autre aspect. La pièce mise en scène par Fouzia Aït El Hadj met en lumière l'histoire de deux jeunes gens fraîchement sortis de l'université et lâchés dans le marché de l'emploi. Obligés de vivre ensemble dans un sous-sol aménagé en habitation (qu'ils occupaient étant étudiants), Aïssa, ingénieur d'Etat, et Brahim amènent leurs épouses au sous-sol sans se consulter préalablement. Les différences d'humeur, d'idées, de manière de vivre et l'ancienne copine de Aïssa et Nadia (épouse de Brahim et ancienne camarade de lutte de Aïssa) font que la cohabitation devient très difficile, sinon impossible, malgré les lois intempestives du propriétaire du sous-sol. Faudrait-il déclarer la guerre et faire éclater le sous-sol de cet immeuble (habité par les hauts cadres de la nation) ou se résigner et faire semblant de s'occuper dans le mensonge et l'hypocrisie ? D'Oran, la troupe Monastir, exclusivement féminine, a exhumé trois contes kabyles. L'histoire suit le voyage d'une jeune fille jetée de sa maison pour une raison ou une autre et relève des thèmes comme la justice, l'amour, la recherche du bonheur. La troupe Ighellilen de Batna a puisé, elle aussi, dans la sagesse du terroir pour monter Thamza. Les thèmes de la société n'ont pas été en reste de ces journées. Dans Uzzu n tyari (mise en scène de Abdelli Djamel), le théâtre de Béjaïa revient sur l'amour impossible de deux jeunes. Deux nouveaux sujets ont été développés par la troupe Assirem de Larbaâ Nath Irathen et la troupe Hamid Bentayeb de la maison de jeunes d'Iferhounène qui ont traité, respectivement, du sida et du phénomène des harraga. Exprimées dans le langage des jeunes, les deux pièces ont fait bonne impression chez le public. Le théâtre pour enfants a eu également sa place durant ce festival à travers Cna l'dyur, pièce présentée par la troupe du théâtre régional de Tizi Ouzou. Notons qu'en marge de ce festival, des conférences ont été animées par des spécialistes du 4e art venus de Tunisie, du Maroc, de Libye et de plusieurs wilayas du pays.