Chose que conteste Karim Amiti, journaliste culturel à la Chaîne 3 de la Radio nationale, présent lors de la discussion. «On est toujours dans la foire !», a-t-il lancé. Sidali Sakhri a expliqué que seuls les éditeurs ont droit aux stands. Libraires ou importateurs ne peuvent exposer que s'ils représentent une maison d'édition. «Je ne peux plus déposer ma librairie au Sila et je ne peux vendre que 100 exemplaires par titre et des livres de l'éditeur que je représente», a-t-il précisé. La limitation à «100 exemplaires» n'a pas été du goût de certains exposants syriens et libanais qui ont menacé de ne plus revenir au Sila, si cette décision est maintenue l'année prochaine. Ils n'auraient pas été informés à temps de cette nouvelle disposition. «Perte sèche», ont-ils dit. Optimiste, Sidali Sakhri a prévu des «répercussions positives» de ces nouvelles mesures sur les librairies «déjà en crise». «Les importateurs, qui ont des quantités importantes dans leurs stocks, vu qu'ils n'ont pas pu les exposer au Sila, seront obligés de pratiquer des prix plus bas. Dorénavant, ils vont négocier avec nous», a-t-il souligné. Selon lui, les libraires ont décidé d'accorder le prix 2008 au jeune Amar Lakhous, dont le roman va être adapté au cinéma. La cérémonie est prévue pour le mardi 4 novembre à Dar El Djazaïr (Safex). «Ce livre n'a eu aucun écho en Algérie. Il a suffi qu'Amar Lakhous le récidive et le publie en Italie pour que l'on entende parler. Doit-on s'exiler pour s'imposer en Algérie ? C'est malheureux», s'est indigné Karim Amiti. A l'origine, le livre de Amar Lakhous a été publié en arabe par la jeune édition El Ikhtilef. Il avait été entouré par une incroyable indifférence à sa sortie (c'est souvent le cas pour la littérature exprimée en arabe). «L'œuvre de Lakhous est un mélange de Fellini et de Camus. On a pensé à lui, parce qu'on a eu l'occasion de lire son texte», a reconnu le représentant de Aslia. Cette association a, par le passé, récompensé, entre autres, le regretté Djamel Amrani et Yasmina Khadra. Annoncé présent au Sila, Yasmina Khadra, qui a déclaré récemment «qu'il était plus connu que l'Algérie», aurait décidé de boycotter la manifestation. Difficile de connaître la raison. Son dernier roman, Ce que le jour doit à la nuit, est exposé au stand des éditions Sedia, proposé à la vente à 950 DA. Sidali Sakhri a reconnu qu'un jeune auteur a toutes les peines de se faire publier en Algérie. «Quand on parle avec les éditeurs, ils disent reconnaître le talent, mais le marché ne suit pas. Pour eux, le lectorat n'existe pas», a-t-il estimé. Saluant la pluralité des débats dans les cafés littéraires, qui se tiennent au grand chapiteau blanc de la Safex, le représentant de Asli a évoqué l'exemple de la pédagogue Malia Boudalia qui a fait une intervention sur «l'éloge de la lecture». Comment peut-on définir une littérature pour la jeunesse ? Malika Boudalia m'a répondu qu'elle n'avait pas de réponse. Elle n'a pas de réponse parce que c'est nouveau chez nous, a-t-il noté. Le Sila 2008 a choisi comme thématique «Raconte-moi un livre». «La faiblesse de la production algérienne d'ouvrages pour l'enfance et la jeunesse nous a jusque-là conduits à retarder cette initiative. Mais attendre jusqu'à quand ?», s'est interrogé Ahmed Boucenna, directeur général de l'Agence nationale d'édition et de publicité (ANEP), principal organisateur du Salon. «Il faut, selon Sidali Sakhri, insister sur l'apprentissage des sciences humaines.» «Les sciences humaines, c'est le doute, la contestation. Les sciences techniques, c'est la démonstration», a-t-il plaidé. Il va à contresens d'un curieux mot d'ordre lancé par le président Abdelaziz Bouteflika à l'ouverture de l'année universitaire contre les sciences humaines qui, selon lui, doivent être déclassées au profit des sciences exactes. Au chapitre de le censure, la grande invitée au Sila 2008, tout le monde blague sur l'interdiction d'un essai de l'islamologue et philosophe tunisien Youssef Seddik. «Rendez-vous compte, Youssef Seddik est invité au Salon par la présidence de la République !», a remarqué un éditeur. Youssef Seddik a publié un essai, qui a suscité la polémique loin de terres algériennes, Nous n'avons jamais lu le Coran. Il y a fort à parier que la double commission de censure du Sila n'a jamais lu une seule ligne des réflexions du philosophe tunisien, puisque l'interdiction est décidée selon le titre, pas selon le contenu, ce qui est, dans les deux cas, une stupidité.