Dans son rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde, publié hier, Amnesty International dénonce le règne de l'impunité, notamment au Maghreb. Et l'ONG de citer le cas de l'Algérie. L'impunité semble renforcée en Algérie selon Amnesty international, « avec la réélection, en avril, pour un troisième mandat, du président Abdelaziz Bouteflika après que la Constitution eut été modifiée afin qu'il puisse présenter à nouveau sa candidature ». Amnesty International s'en prend à la Charte pour la paix et la réconciliation nationale qui empêche « d'engager des poursuites contre les commanditaires et les auteurs de crimes commis dans le cadre du conflit des années 1990 au cours duquel des milliers de personnes ont été tuées ou ont “disparu” ». L'ONG poursuit la dénonciation de la Charte en pointant le fait que le texte rend passibles « de poursuites pénales les personnes qui dénoncent les agissements des forces de sécurité et réclament la vérité et la justice. » Même impunité au Maroc, selon Amnesty international qui rappelle que les familles des personnes victimes de disparition forcée sous le règne de Hassan II - décédé en 1999 - n'ont toujours pas reçu la liste détaillée des cas de disparition sur lesquels l'Instance équité et réconciliation (IER), un organe créé par le roi Mohamed VI et qui a terminé ses travaux à la fin de 2005, avait mené des investigations. Retour des émeutes de la faim en Afrique Pour le reste de l'Afrique, Amnesty International met en garde contre le retour des émeutes de la faim. L'envol des cours du blé, du riz, de l'huile sur les marchés mondiaux en plus des récoltes ratées et du manque de régulation des prix font que les réserves alimentaires sont à leur plus bas niveau depuis trente ans. Amnesty international constate notamment que, face à la crise, les gouvernements ont privilégié la relance de la machine économique au détriment de la question des droits de l'homme. Un des constats les plus sévères concerne l'Afrique, avec notamment la flambée des prix alimentaires qui a « eu un impact disproportionné sur les populations vulnérables » du continent, note le rapport. « Les forces de sécurité ont blessé et tué de nombreuses personnes qui revendiquaient le droit à un niveau de vie décent, y compris le droit à l'alimentation », rappelle Amnesty. Le bilan le plus lourd est à mettre à l'actif des autorités du Cameroun, où au moins 100 manifestants ont été tués. Des manifestations similaires, également parfois durement réprimées, ont aussi eu lieu au Mozambique, Côte d'Ivoire, Bénin, Guinée, Mali, Sénégal, Somalie, Afrique du Sud, Egypte, Maroc ou Mauritanie. Au Zimbabwe, où cinq millions de personnes dépendaient de l'aide alimentaire, le pouvoir est allé jusqu'à utiliser l'alimentation comme une arme politique contre l'opposition, dénonce le rapport. « Lorsque les gens commenceront à exprimer leurs préoccupations et descendront de nouveau dans les rues, la réaction risque d'être la même, met en garde le directeur d'Amnesty pour l'Afrique, Erwin van der Borght. Avec la crise économique actuelle, cela peut recommencer, voire s'aggraver dans les mois et les années qui viennent. » De quoi entraîner davantage « d'instabilité politique » et « une violence de masse », prévient Amnesty.