Le procès de Achour Abderrahmane et des cadres de la BNA, qui s'est ouvert le mardi 16 juin, s'est poursuivi, jeudi dernier, au tribunal criminel près la cour d'Alger. A son neuvième jour, ce sont les avocats des directeurs d'agence qui se sont succédé devant le prétoire pour plaider « l'innocence » de leurs mandants, en se basant sur « les vices de procédure » et « l'absence de preuves ». La défense de Amari Mohamed, directeur du réseau exploitation de la BNA, contre lequel une peine de 20 ans de réclusion a été requise, récuse toutes les accusations, car selon les avocats Bekiri et Fissah, elles ne reposent pas sur des preuves matérielles. « Il y a des lacunes et des carences flagrantes dans le dossier », révèlent les deux avocates, qui précisent que Amari « n'a pas les prérogatives d'empêcher quelqu'un d'ouvrir un compte, sauf si c'est sur instruction de la Banque d'Algérie ». Pour les deux avocates, si Amari était impliqué dans cette affaire, il aurait un autre niveau de vie. « Son niveau de vie n'a pas changé entre 2003 et 2005, période des faits, et lorsqu'il a été inculpé, son fils était dans l'obligation d'interrompre ses études universitaires pour trouver un travail et subvenir aux besoins de sa famille », conclut la défense, avant de réclamer l'acquittement. Un collectif de six avocats, maîtres Benaki, Harraoubia, Mouda, Seriak, Boulouza et Houadjli, s'est relayé pour défendre l'ancien directeur de l'agence BNA de Cherchell, Belmiloud Mustapha contre lequel le parquet a requis 20 ans de réclusion. Maître Benaki soulève de lourdes interrogations. D'abord par cette révélation selon laquelle lors de la présentation, deux personnes de la BNA étaient présentes aux côtés du procureur pour l'aider à poser des questions. « Ce sont ces personnes qui ont dit au parquetier que Belmiloud a une part de responsabilité dans l'affaire. Ce qui est très grave, scandaleux et anormal », déclare l'avocat. Ses confrères notent que l'accusation d'association de malfaiteurs n'a été ajoutée que huit mois après l'ouverture de l'enquête, ajoutant au passage que la lettre anonyme, sur laquelle s'est basée l'instruction, ne comporte pas le nom de l'accusé. « Je vous défie de trouver un trou au niveau de l'agence de Cherchell que dirigeait Belmiloud », déclarent les avocats, en soulignant que l'accusé gérait des comptes de sociétés réelles et non fictives. Ils se sont interrogés sur le rôle qu'aurait pu jouer Belmiloud dans la dilapidation, « à partir du moment où aucun centime de l'agence n'a été encaissé par Achour Abderrahmane ». Ils expliquent que c'est la rude concurrence qui a obligé l'accusé à démarcher pour attirer les clients durant une période où l'agence ne pouvait même pas assurer le salaire de ses employés. « Ses supérieurs l'ont instruit à recentraliser tout le chiffre d'affaires du groupe Achour, qui avait des comptes dans d'autres banques. Démarcher un client et lui ouvrir des comptes n'a jamais été interdit par la loi », affirme la défense, en rappelant que l'inspection générale avait bien mentionné dans ses rapports que Achour était « un client digne d'intérêt ». Au sujet des 2 millions de dinars remis par Achour au fils de Belmiloud, ses avocats font remarquer que le bénéficiaire est majeur et vacciné. « Il a obtenu un crédit auprès de l'agence où travaille son père pour acheter un camion neuf après avoir vendu l'ancien. L'accusé s'est lourdement endetté pour la construction d'une maison non achevée à ce jour », notent les avocats, qui relèvent que toutes les accusations portées contre Belmiloud ne sont basées que sur des déclarations, de ce fait, ils réclament l'acquittement de leur mandant. La même demande est formulée par les maîtres Alleg et Khader, avocats de Boughernout Ali, chef de section à l'agence BNA Koléa, contre lequel le ministère public a requis 20 ans de réclusion. Pour la défense, il est vrai que le dossier est très lourd, de même que le montant détourné. Néanmoins, elle estime qu'il n'en est rien pour son mandat, dont les accusations « ne reposent sur aucune preuve ». Elle précise qu'en matière de loi contre la corruption, le procureur ne peut requérir contre Boughernout 20 ans. « Si l'on se réfère au réquisitoire, l'accusé n'est pas le chef de l'association de malfaiteurs, mais plutôt le lieutenant et dans ce cas-là, la peine est comprise entre 2 et 5 ans », expliquent les avocats. Ces derniers rappellent que dans l'expertise, toutes les liaisons sièges, soit les 1957 chèques d'un montant de 21 milliards de dinars, étaient en suspens entre les agences de Bouzaréah et Cherchell. « Pourquoi alors inculper le chef de section de l'agence Koléa ? », s'interroge la défense qui, d'après elle, « l'accusé aurait dû bénéficier d'un non-lieu, comme son directeur, mais il a été inculpé juste parce qu'il est un enfant de Koléa et qu'il a un lien de parenté avec Achour ». Les avocats de Boughernout ont eux aussi demandé l'acquittement avant de laisser place au quatre avocats de Achour Abderrahmane. Deux seulement ont pu plaider en fin de journée, alors que deux autres, maîtres Senoussi et Guettaf, vont clôture la phase des plaidoiries aujourd'hui avant que l'affaire ne soit mise en délibéré. Le verdict sera connu en fin de journée.