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L'hémodialyse et la transplantation rénale : De la technique à l'ETHI
Publié dans El Watan le 10 - 11 - 2009

Les progrès technologiques posent régulièrement de nouvelles interrogations éthiques face auxquelles il est difficile de rester simple spectateur. La vigilance des soignants, des autorités, des patients et de la population doit être constamment présente.
Les médecins et les autorités de santé doivent anticiper les questions à la fois médicales, sociales, juridiques et éthiques qui se posent à la société quant à l'utilisation des nouvelles techniques. L'efficacité et le bénéfice à long terme de l'hémodialyse chronique en Algérie n'est plus à démontrer comme ce fut le cas dans les années 1970.
A cette époque la quasi majorité des patients mourrait à cause du nombre très réduit de centres. D'autres patients un peu plus « chanceux », mais tout de même «naufragés » dépendant de cette technique étaient condamnés à un «exil thérapeutique» à l'étranger. Revenir au pays pour revoir leur famille les exposait au risque de ne pas se faire dialyser faute de places disponibles.
Il est important d'informer régulièrement les professionnels, les patients et plus largement les citoyens sur l'ensemble des sujets sensibles. La réglementation doit régulièrement être mise à jour compte tenu des progrès réalisés. Combien d'établissements privés ou publics fussent ils universitaires ont-ils la possibilité ou les moyens de faire pratiquer en Algérie de façon régulière l'analyse de l'eau pour l'hémodialyse ?
Pourtant la réglementation existe en la matière (circulaire ministérielle de février 1997). Le monde professionnel sait aussi qu'un malade hémodialysé a besoin de 18 tonnes d'eau par an purifiée et analysée.
D'autres problèmes enrichissent le lot des souffrances des patients qui ne peuvent prétendre au remboursement de leurs examens périodiques nécessaires au suivi régulier des dialyses. Les malades sont parfois transportés sur de longues distances du fait de « leur choix » du centre d'accueil. Cela est fort coûteux à la société et le non respect du lieu de traitement le plus proche du domicile désorganise totalement la carte sanitaire de néphrologie. Peut on imaginer le même schéma en pneumophisiologie concernant la prise en charge des patients au niveau des dispensaires anti tuberculeux ?
Cette déstructuration de la carte sanitaire est accentuée par l'ouverture parfois de plusieurs centres dans une même et petite agglomération alors que plusieurs autres régions sont dépourvues de couverture médicale dans le domaine. Souvent le néphrologue se trouve confiné dans certaines structures à des tâches de suivi des séances d'hémodialyse.
La vocation première dans ce métier est la pratique de la médecine clinique avec notamment la recherche du diagnostic des néphropathies, le dépistage et le traitement des maladies susceptibles d'évoluer vers l'insuffisance rénale.
Le domaine de la recherche scientifique qu'ouvre cette spécialité est presque sans égal. Le traitement médicamenteux, par hémodialyse ou suivi des greffés fait partie des tâches habituelles du néphrologue. Le glissement de la réglementation risque de faire perdre à la néphrologie son statut de spécialité médicale. Pourtant celui-ci a été âprement acquis à la fin des années 1980 grâce aux efforts des médecins qui ont su transmettre aux pouvoirs publics les appels de détresse de la société. A cette époque là, le champ de l'expertise médicale et scientifique accompagné de la réflexion éthique sur les pratiques médicales avait trouvé sa juste place dans la prise en charge des patients. Cette voie là a eu la force de proposer des solutions techniquement possibles et humainement satisfaisantes.
Les professionnels de santé impliqués dans le développement et la mise en œuvre de nouvelles techniques ont très souvent un besoin de réflexion et de dialogue.
Néphrologues, médecins cliniciens de toutes spécialités, biologistes, chirurgiens sont tous confrontés dans leur pratique quotidienne à des questions qui ne peuvent trouver des réponses isolées. Comment régler la problématique des patients nécessiteux qui ont besoin d'abords vasculaires impossibles à réaliser dans les hôpitaux faute de places ou de moyens.
Comment donner sa chance à une grande partie de la population qui n'a pas d'assurance maladie et qui ne trouve pas de place en hémodialyse dans le secteur public. La proposition d'une autre méthode substitutive de dialyse n'est pas facilement simple à l'heure actuelle compte tenu de ses multiples inconvénients et des réticences des malades .Le traitement contre l'anémie est différemment appliqué en hôpital et en clinique privée. Le traitement anticoagulant pose aussi des problèmes de coordination. L'utilisation du produit le plus efficace et le moins cher est la voie la plus logique.
La transplantation rénale a elle aussi fait de grands progrès depuis la fin des années 1980.Mais lorsque le progrès touche au plus intime de chaque individu c'est-à-dire à sa santé et à sa dignité il est indispensable d'être très vigilant. Il est indéniable que le nombre de transplantations rénales a augmenté mais il est nécessaire encore d'élever le niveau technique de sécurité et de qualité par la mise à la disposition des professionnels des moyens nécessaires. Néanmoins l'élaboration des règles de bonnes pratiques et des recommandations professionnelles doivent être sérieusement prises en considération.
Les professionnels de santé devraient guider leurs efforts dans la recherche des voies thérapeutiques les plus fiables et les plus sûres, socialement les plus équitables et éthiquement les plus réfléchies. Il faudrait avant tout penser à répondre aux attentes et aux espoirs des patients qui vivent un véritable drame humain en dialyse.
La demande sociale des patients est très forte, elle relayée par l'ensemble des associations de malades et leurs familles qui en mobilisant leurs énergies nous alertent sur certaines insuffisances. Ils nous font ainsi progresser. Aux impatiences manifestées par les malades et par les soignants concernant des insuffisances en matière de prise en charge la réponse institutionnelle ne s'improvise pas. Elle nécessite de nombreuses concertations compte tenu des enjeux majeurs.
Il s'agit donc dans ce domaine de travailler à une harmonisation des réglementations et des pratiques afin de limiter les risques de détourner la législation.
En effet il est toujours important de rappeler que le don d'organe est un acte généreux gratuit et volontaire. La qualité de l'offre de soins dans ce domaine est très sensible car elle touche à la dignité de l'homme et au respect qui lui est dû.
Le consensus professionnel et social est le meilleur garant de l'application effective du respect de la réglementation. Celle-ci peut évoluer de même que les pratiques s'améliorer si les conditions de prise en charge se précisent.
Si la coopération avec les professionnels de santé est essentielle le dialogue avec les associations des patients l'est aussi. Il existe un besoin d'écoute des patients et des familles.Les professionnels de santé devront intégrer dans leur action cette sensibilité et cette réflexion qui part souvent du vécu.
Certes les réactions individuelles de personnes qui ont souffert de la maladie ou du décès de leur proche peuvent avoir un caractère irrationnel, impulsif, gouverné à l'excès par la douleur, le ressentiment.
Il est vrai que le dialogue entre les soignants, l'administration et les associations des malades n'est pas forcément simple.
Il faut donc créer des lieux où il puisse
s'exercer dans de bonnes conditions, où peuvent s'élaborer progressivement une plus grande confiance, une meilleure connaissance réciproque, une réelle prise en compte dans l'intérêt des patients et des citoyens de chaque
décision.
Le dialogue avec la société civile implique à mon sens la mise en place d'une charte de prise en charge du patient insuffisant rénal et d'un observatoire national de néphrologie.
L'auteur est néphrologue, Directeur de la Maison du Rein Palm Beach
Staouéli Alger


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