Une prise de bec a eu lieu mardi en fin de journée au Sheraton à Oran entre le chef de la tariqa âlaouiya, Khaled Bentounes, et deux militants de l'association locale des ouléma. L'objet de la discorde, des miniatures perses de l'ère musulmane représentant le Prophète et ses compagnons ainsi que Adam et Eve. Les images sont reprises dans l'ouvrage signé par le premier mais aussi dans le documentaire projeté à l'occasion de cette rencontre pour annoncer officiellement, à partir d'Oran, le contenu du programme de la célébration du centenaire du Cheikh El Alaoui, devant avoir lieu à Mostaganem entre le 24 et le 31 juillet. Ce grand rendez-vous pour lequel sont attendues près de 4000 personnes venant de 37 pays est disproportionné par rapport au contenu de la polémique qui a éclaté entre les « soufistes » et les « oulémas » d'Oran. Il y a des siècles de cela, de manière probablement très sereine, un débat à un haut niveau de la hiérarchie entre théologiens musulmans a eu lieu pour permettre ou pas la représentation du Prophète à l'instar de l'iconographie chrétienne. Contrairement à l'Eglise, les musulmans ont finalement opté pour l'interdiction, ce qui explique par ailleurs l'essor des arts décoratifs au détriment de l'art figuratif. Mais dans l'histoire des arts du monde musulman, ont subsisté, quoique rares, des œuvres figuratives produites à des périodes diverses dont les dernières remontent, dit-on, à presque 200 ans. Pour le représentant « alaoui », ces œuvres sont un patrimoine universel à sauvegarder. Les ouléma locaux ne l'entendent pas de cette oreille, brandissant l'interdiction comme argument. C'est d'ailleurs en se soumettant à cette même interdiction (à ne pas confondre avec la notion de haram) que le cinéaste syrien Mustapha El Akkad s'est gardé (interpellé à titre préventif malgré ses bonnes intentions par certains docteurs de la foi musulmane), pour les besoins de son film le Messager, de prêter un visage humain d'un acteur pour représenter le Prophète dont il retrace le parcours. Mais dans la joute verbale, ce qu'il fallait éviter c'était sans doute de faire le parallèle avec la caricature car ce n'est pas l'objet des images montrées qui, au contraire, glorifient.