Amoins d'un mois du Ramadhan, je dois faire d'abord mes prévisions pour la rentrée sociale et scolaire où il faut avoir les reins solides pour pouvoir supporter les dépenses », affirme-t-il. « Même le congé ne rime pas avec vacances, car avec mon salaire et celui de ma femme, enseignante dans un lycée, il va falloir se serrer la ceinture pour pouvoir engager des travaux de peinture à la maison », poursuit Lazher qui, d'ailleurs, n'est pas le seul à avoir choisi la formule des petites escapades en mer pour une journée, histoire de rompre la routine, mais aussi se procurer des moments de détente avec les enfants. Il est loin le temps où des familles se permettaient des vacances populaires sur les plages tranquilles de Annaba, Skikda et Jijel, alors qu'un séjour en Tunisie pour quelques jours est hors de la portée de la majorité des salariés. « Je ne peux me permettre une semaine pour plus de 100 000 DA uniquement pour un couple, pour me retrouver en difficulté financière à quelques jours de la rentrée », assure Smaïn, cadre dans une entreprise privée qui ne manquera pas de noter que de nombreuses familles préfèrent ne pas partir en vacances en raison de l'absence des plus simples commodités. « Même les moyens de transport sont devenus plus chers, à l'instar du train dont les tarifs des dessertes à destination des villes côtières sont quasiment exorbitants pour les citoyens non véhiculés », regrette Salah, agent à Algérie Poste, qui se rappelle avec une certaine nostalgie le fameux train populaire d'été qui assurait aux Constantinois des départs vers la plage de Sidi Abdelaziz, à Jijel. Alors que les habitants de Constantine se plaignent d'une léthargie chronique caractérisant leur quotidien, surtout que les activités culturelles et les soirées d'animation demeurent un vœu pieux, ceux des quartiers défavorisés et des localités lointaines de la wilaya ne sont pas mieux lotis. « La population, dont la majorité est de condition modeste, n'arrive plus à joindre les deux bouts, certains profitent même de leur congé pour dénicher du travail dans les chantiers comme maçons ou simples manœuvres, alors que les plus instruits se débrouillent pour décrocher un poste temporaire dans les commerces et autres services », notera Abdelbaki, qui assure avoir choisi de donner des cours intensifs d'anglais dans une école privée pour des étudiants en quête de perfectionnement. « Cela m'arrange et me permet d'avoir de l'argent surtout qu'il y a une forte demande durant l'été », ajoute-t-il. La solidarité ne profite pas aux pauvres La formule des colonies de vacances pour les familles pauvres, initiée il y a quelques années par le ministère de la Solidarité nationale ne profite pas généralement aux véritables concernés. « Je n'ai pas les moyens de payer des vacances à ma famille, alors il ne me reste qu'à profiter de cette aubaine pour offrir une quinzaine de jours de colonie à mes enfants, mais force est de constater que ceux qui en bénéficient réellement ne sont pas dans le besoin. Il se trouve même, parmi les partants, des enfants de cadres dans des entreprises et de responsables bien placés dans l'administration, ce que je trouve vraiment désolant » , notera un agent de la commune de Constantine. « Ce sont des pratiques que nous avons de tout temps condamnées car elles touchent à la crédibilité des institutions qui organisent ces activités et pénalisent aussi les gens pauvres qui trouvent que d'autres profitent des mesures que l'Etat a décidées pour eux », avouera un cadre à la direction de l'Action sociale de la wilaya de Constantine. Quoi qu'il en soit, le départ en vacances est devenu synonyme de dépenses onéreuses pour les classes moyennes. « Même un séjour dans un camping familial en bord de mer ou la location d'une maison dans une ville côtière coûte cher, ce qui ne manque pas de dissuader plusieurs familles qui préfèrent opter pour des sorties furtives, histoire de changer d'air et procurer la sensation de la plage pour une journée à leurs enfants », notera, non sans regret, un cadre retraité d'une entreprise publique.