– Comment analyser les derniers événements en Egypte, notamment les affrontements de la semaine dernière place Tahrir ? Les récents affrontements ont eu lieu en raison du traitement irrespectueux des familles des victimes de la révolution – plus de 850 «martyrs» ont été tués par des bandits et les forces de sécurité. Certains ont été invités à un événement organisé par l'armée, mais les familles ont commencé à se disputer avec les officiers. Selon un compte rendu, un officier a giflé la mère d'un martyr, ce qui a déclenché les protestations. Cependant, la manifestation n'est pas liée seulement aux martyrs. C'est surtout la manière avec laquelle l'armée a mené la transition post-Moubarak – notamment son manque de transparence, les atteintes aux droits humains et son autoritarisme – qui a produit ces mouvements. – Partagez-vous l'avis de ceux qui veulent une deuxième révolution pour l'Egypte, ou pensez-vous qu'il faut achever celle déjà est en cours ? Une deuxième révolution entraînerait très probablement une confrontation avec les militaires et/ou un coup d'Etat par les jeunes officiers. Ce serait une entreprise très risquée et coûteuse. Je pense que ceux qui ont mené la première révolution doivent continuer de mettre la pression sur les militaires et le gouvernement de transition afin qu'ils répondent à leurs attentes, et ils doivent s'organiser politiquement pour former un front uni. Ce sera un travail long et ardu, mais beaucoup moins risqué qu'une seconde révolution qui n'est pas soutenue massivement pour l'instant, à un moment où la plupart des Egyptiens s'inquiètent de la stabilité du pays et de son économie. La transition n'a pas été idéale, mais il est encore temps de parvenir à une véritable transition démocratique. – Depuis la chute de Moubarak, quelles sont les revendications qui ont été satisfaites ? Que demandent les Egyptiens aujourd'hui ? Ce qui a déjà été satisfait ce sont les restrictions sur le mode de présidence. L'ancien parti a été dissous, et de nombreuses personnalités de l'ex-gouvernement emprisonnées. Mais beaucoup de revendications sont restées en suspens et pourraient ne pas être satisfaites jusqu'à la tenue des élections et le retour du régime civil, notamment les nouvelles politiques socioéconomiques, la création de syndicats indépendants, la fin de l'état d'urgence, etc. Certaines revendications peuvent prendre des années avant d'être accomplies, comme la réforme du système policier. Aujourd'hui, l'accent doit être mis sur le volet socioéconomique et politique (le type de système, l'indépendance judiciaire, etc.). Les opinions des forces politiques diffèrent. Elles devront négocier après les élections, une fois la nouvelle Constitution écrite.
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