Après un grand tapage médiatique, les programmes de relogement annoncés par les autorités sont gelés depuis cinq ans pour des raisons non avouées l Des centaines de familles sont exposées à tous les dangers. Les habitants des bidonvilles, vrais laissés-pour-compte de la société, la plaie et la honte du pays, vivent depuis mardi dernier dans la terreur d'être emportés par l'oued en crue. Les pluies diluviennes qui se sont brusquement abattues sur la région sont réellement en passe de provoquer des dégâts humains sans précédent ! Tenaillés par une angoisse indescriptible, ils lancent un cri de détresse en direction des autorités de wilaya, les implorant de faire quelque chose. « Venez à notre secours, nous périssons sous vos yeux, aidez-nous ! » s'écriaient des mères de famille en pleurant. Des dizaines de personnes, notamment celles habitant à proximité de la rivière, n'ayant où aller, n'ont pas quitté leurs demeures de fortune. Découragés par toutes ces années de misère, ils se voient, encore une fois, dans l'expectative du péril. Tenant entre les mains, qui un enfant en bas âge, qui un objet de valeur, ces gens attendaient des secours qui n'arrivaient pas, loin s'en faut ! Des ghettos, on en compte beaucoup à Constantine, à Sarkina, Hai El Filahi, la cité des Frères Abbas, Fedj Errih…en toutes saisons, ils vivent des fléaux spécifiques. En été, ce sont les insectes, vecteurs de maladies, les serpents, les rats, les odeurs pestilentielles, celles des égouts à ciel ouvert…, en hiver, c'est la vase, les labyrinthes visqueux et sinistres provoqués par les intempéries, en plus de la menace des rivières en crue. Un spectacle insoutenable de gourbis abritant des pseudo-citoyens, juste bons pour donner leurs voix aux élus de la nation, qui, une fois en place, s'empressent d'oublier toutes leurs promesses ! « A chaque échéance électorale, on fait semblant de se rappeler de notre misérable existence, on nous promet monts et merveilles, puis plus rien ! Chaque année, on rêve d'un toit décent, et on se retrouve encore une fois avec la même peur, la même misère, la même souffrance… », dit avec amertume une vieille femme, mère adoptive d'une jeune orpheline, qui rêve de se marier pour aller vivre ailleurs, dans une vraie maison, où elle n'aurait pas honte d'inviter ses amies, où elle n'aurait plus l'angoisse d'être emportée dans son sommeil par les inondations. Des personnes sont nées dans ces bidonvilles et y ont fondé un foyer. Ils sont, à présent, pères et mères de famille, perpétuant la longévité de ces quartiers de la honte, qui s'accroissent au fil du temps, empiétant sur de larges pans de cités. Ils jouxtent même les demeures fastueuses, comme c'est le cas à Hai Filahi.. D'innombrables fils électriques se fraient un chemin jusqu'aux habitations précaires, dont les occupants paient la totalité de la note de gaz et d'électricité, faisant les affaires de certains habitants des bâtiments, peu scrupuleux. Du côté des autorités concernées, l'on allègue que nombre des occupants des habitats précaires n'ouvrent pas droit au relogement, ceux-ci « simulent le sinistre dans l'espoir de bénéficier d'appartements, qu'ils s'empressent de sous-louer, ou de vendre dans la clandestinité. » N-y a-t-il pas moyen de séparer le bon grain de l'ivraie ? Pourquoi faut-il que d'authentiques ayants-droit soient pénalisés ? La menace d'une catastrophe est cependant bien réelle, mais alors qui rattraperait les choses ? La démission de l'Etat encourage toutes les spéculations et tous les opportunismes. En attendant, les regards et les avaloirs sont toujours obstrués. Les pluies torrentielles de cet automne précoce, qui ne sont pas évacuées, mettent à nu les lacunes, les improvisations malheureuses et les bricolages ponctuels à tous les niveaux. La ville ressemble à une agglomération moyenâgeuse, et gare aux conséquences !