Comme le commun des Algériens, les journalistes n'échappent pas aux problèmes de la société. En premier lieu : l'endémique crise du logement. A défaut d'un toit décent, des centaines de journalistes (près de 800), tous médias confondus, fréquentent des hôtels de fortune, des hammams ou des abris chèrement loués. Leurs conditions d'hébergement frisent l'indécence. Sans toit fixe, ils vivent une instabilité permanente, allant d'un endroit à un autre comme des nomades. Pourtant, nombreux sont les Algériens qui pensent que, de par leur statut privilégié qui les met en contact avec les hauts responsables de l'Etat, les journalistes bénéficient de tous les conforts et commodités. Mais la réalité de cette corporation est bien triste. Engagés pleinement dans ce dur métier à tenter de défendre les causes justes, à traiter des problèmes de la société, à relever les tares du régime, à signaler les défaillances du système, à dénoncer les injustices sociales, les journalistes oublient souvent leur situation précaire ou feignent d'oublier leurs propres problèmes dont celui du logement qui se pose avec acuité. « Dans d'autres pays, les journalistes sont si bien rémunérés qu'un tel problème ne se pose même pas », concède un confrère qui est à sa trentième année de presse. Et d'ajouter : « En Algérie, ce sont des laissés-pour-compte, des sans-droit qui défendent tous les droits de la société. » Refusant de quémander ce qui est un droit, ils sont nombreux à prendre leur mal en patience, à souffrir en silence dans l'indifférence. Depuis l'ouverture du champ médiatique au début des années 1990, jamais la corporation des journalistes n'a bénéficié de logements comme l'ont fait d'autres corporations. Ce qui empire leur situation, c'est le fait de se retrouver exclus de toutes les formules existant actuellement sur le marché. Ils n'ouvrent pas droit au logement social parce qu'ils perçoivent des salaires supérieurs au SNMG qui est de 12 000 DA. Ils n'ont pas non plus accès aux logements location-vente en raison de « l'offre limitée ». Une bonne partie d'entre eux ne peut postuler ni au Logement social participatif (LSP), pour des raisons bureaucratiques, ni au logement promotionnel dont le prix est hors de portée. Plusieurs initiatives menées par des journalistes pour trouver une formule adaptée aux particularités de la corporation se sont soldées par un échec. La dernière initiative remonte à l'année dernière. Le ministère de la Communication ainsi que celui de l'Habitat se sont montrés disponibles à soutenir toute proposition. Une démarche a été enclenchée et des dossiers ont même été constitués et transmis aux services concernés, sans résultats. « Nous ne demandons pas un logement, mais le droit au logement », ironise un journaliste, qui exerce ce métier depuis une vingtaine d'années dans la précarité absolue.