Comme chaque 23 février depuis 1998, ce mercredi est consacré en Algérie journée de la Casbah. L'occasion pour la wilaya d'Alger d'organiser des manifestations culturelles jusqu'au 3 mars prochain autour de la commune. Pour les associations qui œuvrent à la restauration de la cité cinq fois centenaire, réunies hier au centre de presse d'El Moudjahid, cette date est surtout l'occasion de faire le bilan d'une année de travail. Un bilan pessimiste pour le président de la Fondation Casbah, Ali Mebtouche : « Pour cette journée, j'aurais souhaité vous inviter à visiter un îlot restauré. Mais je peux seulement vous inviter à visiter des gravats et des ruines. » Le plan de rénovation de 1998 prévoyait la subdivision de la Casbah en sept « îlots » urbains, restaurés les uns après les autres, leurs habitants devant, selon les cas, être relogés le temps de l'opération. Des îlots ont été libérés, « ils devaient être restaurés, repeuplés avec des commerces, de l'artisanat, mais ils sont maintenant squattés », poursuit Ali Mebtouche, dont l'association lutte pour la préservation du patrimoine matériel et immatériel - pratiques et us, contes, chants et musique - de la Casbah. Et les palais Dar Essouf ou Dar Mustapha ? Sur le point d'être livrés, après deux ans de travaux, le palais Dar Hassan Pacha ou le mausolée Sidi Abderrahmane ? « Sans Casbah, il n'y a pas de palais », insiste le président de la fondation. « Nous voulons bien avoir des palais restaurés, mais est-ce pour qu'ils soient récupérés par les administrations ? De plus, l'Etat restaure les bâtiments de façon anarchique, alors que la restauration est un art. On a mis des mosaïques sur les murs extérieurs de la Maison du millénaire, alors qu'aucune maison de la Casbah n'est faite avec des mosaïques extérieures ! » Si l'on en croit les intervenants, ce n'est ni l'argent ni les idées qui manquent. « Nous avons déjà sollicité la création de cinq timbres et d'un fonds de solidarité auprès de gouvernements précédents ainsi que la relance de la vignette auto. Cette dernière initiative a été retenue, mais sans que nous en bénéficions. Nous avions même eu l'idée d'une opération pièces jaunes... Je ne sais pas qui l'a soufflée à Mme Chirac », plaisante Ali Mebtouche. Autre solution, le mécénat : « Un fonds de solidarité américain était prêt à verser cent millions de dollars, à raison de dix par an, pour la réhabilitation de la Casbah à condition que les preuves de l'amélioration de la vie des habitants leur soient présentées annuellement », confie Babaci Belkacem, ex-délégué à la restauration de la Casbah à la fondation. Une initiative, comme les pièces jaunes, victime d'un changement de gouvernement. De toute façon, insiste-t-il, « ce que la Casbah va rapporter en matière d'image dépassera largement ce qui devra être investi » pour sa rénovation. Beaucoup de pessimisme et une lueur d'espoir avec Houria Bouhired, la présidente de l'association Sauvons la Casbah, qui revient sur les initiatives récentes du wali délégué de Bab El Oued, Saïd Meziane. « Lorsque les habitants voient que le ramassage des ordures est fait, ils se disent que c'est une forme de reconnaissance, un début de démarginalisation. Le Président avait promis que les jeunes allaient avoir un travail : 500 étals ont été installés. » C'est également sous son autorité qu'a été lancée l'opération d'enlèvement de tonnes de gravats de la Casbah. « J'ai remercié le wali délégué pour cela, se souvient Ali Mebtouche. Mais il devrait également y avoir une équipe de récupération, car ces gravats que l'on dégage, ce sont les maisons de la Casbah. »