Dès le coup de sifflet final du duel algéro-égyptien, aux sons des « One two three, viva l'Algérie », « Tahia El Djazaïr », des youyous et des klaxons assourdissants, des centaines de Ghazaouis portant des drapeaux algériens et palestiniens ont fêté la victoire des poulains de Rabah Saâdane à Oumdermane, au Soudan, à travers les rues de Ghaza. Ghaza. De notre correspondant Incroyable, on se serait cru à Kouba, à Bab El Oued, à Hussein Dey ou dans n'importe quel autre quartier algérois, oranais ou constantinois. Ce soir du 18 novembre, les Palestiniens étaient tous devant les écrans, que ce soit chez eux ou dans les cafés. Cette rencontre de football très particulière a suscité l'intérêt de tous, y compris de ceux qui n'y connaissent rien à la balle ronde tant les médias égyptiens, qui sont très suivis dans l'enclave palestinienne, ont rabâché le sujet pendant des heures et des heures sur des chaînes satellitaires qui ne reculent devant rien pour augmenter leur audimat. Les défilés de voitures pleines à craquer, beaucoup de familles, ont parcouru les rues de Ghaza, provoquant l'étonnement de beaucoup de citoyens qui ne pensaient pas que l'équipe algérienne avait autant de supporters. Et pas n'importe lesquels. Très bruyants, fiers, au tempérament typiquement algérien. Mais pas seulement. Beaucoup parlent le dialecte algérien de façon parfaite, au point où l'on pense, lorsqu'on discute avec l'un d'entre eux, qu'on est en face d'un « oulid el houma ». Hatem, la quarantaine, né à Alger, était très excité : « Louled djabouha, ya kho. Enhab edzaïr, rani ferhane », en embrassant le grand drapeau dans lequel il s'était enveloppé. Quant à M'hamad, âgé de 18 ans, il dira : « Je suis très heureux, mon cœur a failli s'arrêter pendant les dix dernières minutes, j'ai pensé qu'elles ne finiraient jamais. Vive l'Algérie ! Les joueurs ont montré qu'ils sont des hommes et même plus... des lions. Ils ont bien répondu aux Egyptiens qui nous ont cassé la tête pendant des jours à la télé et qui se voyaient déjà au Mondial. Mais la peau de l'ours algérien est difficile à vendre. J'ai quitté l'Algérie alors que j'avais 3 ans seulement, mais mon père et ma mère m'en disent tellement de bien que je me sens proche de tous les Algériens. Nous sommes fiers de cette victoire. » Un Palestinien d'un certain âge, dira lui aussi : « L'Algérie est mon deuxième pays, j'y ai vécu une grande partie de ma vie. Presque tous mes enfants sont nés là-bas. J'aime l'équipe algérienne et je me rappelle avoir défilé dans les rues d'Alger après la victoire sur l'Allemagne, en 1982. L'histoire se renouvelle, mais cette fois je suis plus vieux et je suis à Ghaza. » Quant à Mahmoud, né à Blida, qui était accompagné de sa femme et de ses deux enfants, un garçon de 10 ans et une fille de 7 ans dont le visage était peint en vert, rouge et blanc, n'arrêtait pas de klaxonner, alors que sa femme et ses enfants criaient « one, two three, viva l'Algérie ! ». « Les Egyptiens ont commis la faute qu'il ne fallait pas en caillassant le bus des joueurs algériens. Je connais bien les Algériens, ils ne tolèrent pas la hogra et ils se sont vengés à leur manière. Je souhaite qu'ils aillent le plus loin possible en Coupe du monde pour faire taire les langues haineuses », nous dira Mahmoud, alors que le cortège dans lequel il se trouvait est arrêté en plein centre-ville, près de la place El Joundi El Majhoul. Dans d'autres localités de la bande de Ghaza, l'affluence est nombreuse, comme à Abassane, à l'est de la ville de Khan Younes où presque toutes les familles ont vécu en Algérie. Des témoins contactés par téléphone ont affirmé que c'était la grande fête. A Ghaza, ce soir du mercredi 18 novembre, le blocus, l'occupation et même la division interpalestinienne ont laissé place à la joie des supporters des Verts qui se sont souvenu des beaux moments vécus au pays des martyrs et c'est bien grâce à ce onze vaillant qui se doit de nous honorer tous.